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Critique de PetiteBichette


Yaaaak ! Êtes-vous fait de l'étoffe dont sont tissés les vents ? Prêt à contrer ?
C'est grâce à mon amie Nicola que j'ai tenté le grand saut. Pas celui en parachute, mais dans le domaine du contre, de la horde, la horde du contrevent.
Je n'aurai sans doute pas tenté l'aventure seule tant ce livre m'intimidait. Mais à la faveur d'une lecture commune, des ailes m'ont poussé et j'ai fait le grand saut dans le vide.
Fffflousschh !!!! dérapage sans trop de casse dans le sable, attention aux projections de gravier au passage.
Je redoutais cette lecture et après avoir ingurgité mes 701 pages, le voyage a tenu ses promesses en termes d'enchantements et d'embûches.
Le démarrage s'est avéré laborieux et ardu, Damasio n'épargne pas son lecteur et en guise d'introduction, il lui plonge la tête directement dans le sable, en vérifiant que les grains crissent aimablement sous les dents. J'ai eu la sensation d'être emmurée sous une gangue de sable, lorsqu'à la plage des gamins vous enterrent sous le sable mouillé et que vous arrêtez de rigoler au bout de 2 minutes quand vous avez l'impression qu'il va être difficile de s'en sortir sans une aide extérieure. le sable je l'ai avalé, recraché, comme une sensation de vent violent qui me le remettait dans la bouche sans se lasser. Après cette première mise en bouche originale, le lecteur atterrit brutalement dans la flaque de Lapsane, où là, l'idée est plutôt de vous plonger la tête sous l'eau pour vous empêcher de respirer. Cette eau, elle va s'infiltrer en vous par tous les pores de la peau. Mais dommage pour vous, une fois la tête sortie de l'eau, ne vous croyez pas aussi facilement sorti d'affaire, vous ne pourrez que constater qu'un immense siphon s'est formé, prêt à vous aspirer.
Heureusement, entre deux sablés, une petite noyade et un combat mortel, M. Damasio vous a prévu des petites récréations bienvenues.
Comme le vent, unique héros de cette horde, mon ressenti a beaucoup fluctué lors de cette lecture, tantôt happée, ferrée, tantôt détachée par des pseudos considérations technico-vento-métaphysiques, un charabia sans queue ni tête qui m'a fait lever les yeux au ciel et survoler certains paragraphes.
Parfois un peu trop de testostérone à mon gout, la majorité des personnages sont masculins et les femmes réduites à des rôles très classiques, bonnes à faire la cueillette, la popotte, jouer à l'infirmière, râleuse, en passant de la chaudasse de service à la pure intello qui n'est intéressée par rien d'autre que la science et son nombril … Quand les stéréotypes ont la vie dure, même dans les autres mondes…
Les personnages masculins sont bien plus attachants et sympathiques ; la verve de Caracole, la bienveillance de Sov, l'intégrité de Pietro, la douceur de Steppe, la fraîcheur d'Arval, la relation joyeuse et fusionnelle des jumeaux Hosrt et Karst. En revanche, la volonté sans faille de l'imperturbable, bas du front et violent Golgoth ne m'a pas convaincue.
Le bilan est une lecture que j'ai trouvé trèèès longue, ardue, avec des personnages qui manquent parfois de nuances (je ne sais pas pourquoi, mais j'ai l'impression de creuser ma propre tombe là, peut-être rapport aux nombreux fans dont je sens les yeux dans mon dos me lancer des éclairs/voire tirer des balles).
Cependant, j'ai été bluffée par la maîtrise de la langue française de Damasio et ses innombrables jeux de mots, son incroyable scène de joute verbale par Caracole, son inventivité à créer des mots, les détourner de leur sens premier (de quoi donner un sacré fil à retordre aux traducteurs, je serai curieuse de savoir comment ils s'en sortent pour les palindromes).
L'auteur a su créer un univers unique, une multitude de personnages, je salue en particulier des éléments typographiques vus dans aucun autre livre auparavant (en ce qui me concerne tout du moins, si des lecteurs connaissent d'autres livres avec ce type d'audaces, racontez-moi !) : des pages numérotées à l'envers comme un compte à rebours de leur fabuleuse quête, des personnages identifiés à chaque paragraphe par un symbole permettant au lecteur de savoir à chaque fois qui s'exprime).
La quête de l'Extrême-Amont a pour moi quelque chose de mystique, chacun y cherche son graal, son paradis, la définition de ce dernier étant bien sûr différente pour chacun. le décompte jusqu'à l'atteinte de l'objectif s'égrène comme les pages. Les chiffres défilent comme le temps, en parabole de la vie, pleine d'idéaux lors de notre jeunesse, d'objectifs, qui se muent au fil des ans en cortège de désillusions, d'embuches, de renoncements, des décès des gens aimés qu'on croyait éternels.
Trois semaines de lecture marquantes et inconfortables, parfois intenses, ou décousues. Je sais que je vais en garder des magnifiques plans-séquences, des mondes bruts et terrifiants avec leur part de mystère...
Une aventure marquante, qui même si elle ne m'a pas complètement embarquée me laissera de beaux souvenirs. Tous en goutte derrière Golgoth !
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