AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Zephirine


Dans le Paiko, massif montagneux De Grèce, la vie est rude. La vieille Elliniki, au physique et à la réputation de sorcière, vit chichement avec ses chats. Sa modeste et minuscule maison, c'est son défunt mari qui l'a construite pour abriter leur amour. C'est là qu'elle veut finir ses jours. Mais voilà que, traqués par les policiers, déboulent dans son existence bien tranquille des clandestins afghans. Feriel et Hamza, une fillette et un adolescent, tentent de rejoindre l'Autriche où les attend leur grand frère. Ils ont connu l'enfer des camps de migrants, vu disparaitre nombre de leurs compagnons d'infortune et, au pire moment, alors qu'ils sont traqués par les policiers, une vieille femme un peu fêlée les tire de là en les cachant chez elle. Hamza, farouche comme un chat sauvage ne se laisse pas facilement apprivoiser tandis qu'une complicité immédiate nait entre Feriel et Elli.
La vieille Elli s'est mis dans la tête d'aider les enfants à traverser la mer pour atteindre l'Italie. Elle est comme ça, Elli, derrière ses airs bourrus c'est son coeur qui parle. « Elle reconnait cette sensation. La peau de son coeur. Voyez-vous, c'est comme ça qu'elle craque, quand ça doit arriver » Elle a connu la peur et les guerres successives, la mort de sa mère et de son grand frère qui la protégeait. Mais plus que tout, il y a eu ce jour terrible, ce jour où elle a arrêté de grandir. Alors, en se revoyant enfant dans le regard confiant de Feriel, elle se promet de tout faire pour que la petite afghane ne vive pas la même tragédie que la sienne.
Car des tragédies, on en croise pas mal dans ce roman lumineux et pétri d'humanité.
Les grecs du Paiko ont subi durant 25 ans ce qu'on a appelé plus tard « les guerres balkaniques » Ici, les frontières ont été mouvantes, l'exil on ne connait que trop et les habitants sont restés méfiants. Alors, tous ces émigrés qui menacent leur tranquillité…
Ce livre pourrait être un énième roman sur l'émigration mais l'auteure évite l'écueil du misérabilisme ou de la mièvrerie. Elle donne vie sans prétention aux habitants de ce village reculé et nous rend attachants, non seulement les jeunes afghans et la vieille Elli mais aussi Milios, le tenancier de l'épicerie-café, amoureux transi d'Irina, ou encore Abel, « grand lézard maigrichon » et quelque peu bêta.
L'écriture de l'auteure se teinte aussi de légèreté narquoise lorsqu'elle croque les rapports entre les villageois. Les dialogues sont d'une grande drôlerie, du Pagnol à la sauce grecque.
Á ces personnages de chair s'ajoute, en filigrane, l'ombre tutélaire d'Ulysse, ce héros de la mythologie grecque que Feriel va découvrir dans un vieux livre de Constantin, le mari d'Elli. La gamine se passionne pour Ulysse, fascinée par l'analogie entre les aventures du héros et sa propre odyssée.

Sous la plume alerte de Carole Declercq, cette histoire violente et douce à la fois m'a séduite de bout en bout. Un beau roman à découvrir.
Commenter  J’apprécie          341



Ont apprécié cette critique (31)voir plus




{* *}