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Citations sur Mon coeur au ralenti (6)

— Gérard, vous me serez fidèle en voyage ?

-- Oui, Griselda.

— J'espère que vous ne m'avez jamais trompée en Europe.

— Non, jamais.

— Vous n'avez pas eu la tentation de revoir quelqu'une de vos anciennes amies ?

— Pas une seule... Mais s'il m'arrivait de vous être infidèle et que vous en eussiez connaissance, que feriez-vous ?

— Je ne sais pas. Les femmes ont plusieurs armes : le divorce, le revolver, le talion et le mépris ; chacune a ses bons et ses mauvais côtés. Le divorce est net et précis comme un bilan de comptabilité. Le revolver est dangereux parce qu'on hésite à tuer le coupable, à abattre la complice ou à se tirer une balle au cœur... Il en résulte qu'on s'envoie par accident du plomb dans le pied. Le talion est simple en apparence ; mais comme on n'a pas toujours un amant présomptif sous la main, on fait une bêtise avec le premier imbécile venu. Le mépris est peut-être la meilleure solution. Mais c'est un luxe qu'on peut se permettre quand on est très riche et quand on a un mouvement d'horlogerie à la place du cœur.

— Griselda, vous avez oublié une cinquième arme.

— Laquelle ?

— Le pardon.

— Peut-être.

— Oui, c'est une fleur rare qui ne s'épanouit que dans les âmes de choix.
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—Vous êtes cynique, miss Swanson.

— On dit des autres qu'ils sont cyniques quand ils expriment tout haut ce que nous pensons tout bas.
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— Madame votre mère vit encore ?

— Je n'en sais rien. J'avais deux ans quand elle s'est séparée de mon père. Danse-t-elle toujours ? Tient-eIIe une pension de famille dans Russel Square, à Londres ? A-t-elle épousé un lord ? Fait-elle de l'élevage en Australie avec un gars de Sydney ? Elle n'a jamais daigné s'occuper de moi. Je ne la blâme pas. Je l'ignore, voilà tout. Les thons de la Méditerranée ont aussi une mère. Savent-ils si elle marine dans une boîte ou si elle se promène sous les canons anglais de Gibraltar ?
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Je me levai, le tympan assourdi ; je pris brusquement congé de Billie Swanson et de mes amis et me hâtai vers la place Blanche. Je marchai sur le boulevard mal éclairé, indifférent aux œillades des oiseaux de nuit, qui ouvraient et fermaient leurs paupières sur mon passage. Je fus insensible aux invites mélancoliques d'une pauvre grue esseulée, affalée sur son banc et qui portait sur son faciès, peint de rose et de vert-de-gris, toute la tristesse des renoncements. Je n'avais nul besoin d'être harcelé par ces marchandes de plaisir, puisque j'étais poursuivi de nouveau par mon spectre familier qui murmurait à mon oreille :

Elle emporte ton portrait quand elle va dans la ville chinoise !... Elle emporte ton portrait... Ton portrait !... Ton portrait l...
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— Les Français sont des hommes d'affaires manqués, mais ils excellent dans la galanterie.

— Ils ont le culte de la femme, monsieur Chambers.

— Nous aussi. Nous gâtons les nôtres. Elles le savent bien d'ailleurs.

— Non. Il ne suffit pas de gagner des millions pour rendre une femme heureuse. Il ne suffit pas de l'embrasser distraitement le matin en lui disant : « Darling, voici un chèque de 5 000 dollars. Amusezvous bien pendant que j'irai en faire d'autres. » De petites attentions valent souvent mieux. qu'un nombre à trois décimales. Le culte de la Femme, ce n'est pas travailler pour elle, sans arrêt, dans Wall Street, c'est vivre dans sa pensée, c'est modeler sa volonté au moule de ses petites mains, c'est se souvenir de la couleur de la robe qu'elle portait certain jour et d'une phrase qu'elle a murmurée certain soir ; c'est attacher autant d'importance qu'elle, à des riens qui lui semblent des tout et se passionner comme elle pour des vétilles dont elle fait des montagnes... C'est perdre du temps avec elle, monsieur Chambers ! Comprenez-vous : perdre du temps ! Cette hérésie que repoussent avec horreur les grands-prêtres de vos cathédrales à cent étages et les camériers de votre Stock-Exchange !

Le prince Séliman a raison, approuva Mrs Turner, conquise par ma conviction. Vous autres, Yankees, vous ne savez pas aimer !
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M. Tsing-Hou vient de rentrer. Ses deux mains jaunâtres sont avalées par ses manches flottantes, jointes sur sa poitrine.
– Honorable miss, déclare-t-il, vous aurez ce soir une voisine de case… Une Anglaise titrée qui, lors de ses séjours à New York, ne manque jamais de délaisser les soupers du « Plazza » pour venir manier mes bambous.
– Ça m’est égal, monsieur Tsing-Hou.
– Quant à votre estimable compagnon, voudra-t-il lui aussi imiter votre exemple ?
Evelyn répond pour moi :
– Non, monsieur Tsing Hou. Le prince Séliman n’aime pas les ascensions. Il préfère piétiner dans la boue. Pour lui faire prendre patience, vous lui raconterez des histoires de votre pays.
Je proteste :
– Me laisserez-vous au moins jeter un coup d’œil sur l’orée du sentier qui conduit vers les cimes ?
Evelyn m’entraîne dans un couloir mal éclairé. Elle soulève une tenture et me montre une pièce au plafond si bas que je dois me baisser pour mieux voir. J’ai fréquenté dans les capitales européennes des sanctuaires improvisés que les névropathes occidentaux décorent fièrement du nom de fumeries. Autant comparer le Musée Grévin à la Galerie des Glaces !
La fumerie de M. Tsing-Hou ?… Une cage aplatie doublée de laque de Coromandel. Une caisse dont les parois ont été éclaboussées de sang et qui invite à se coucher dans les alvéoles sombres, capitonnés de coussins verts, flanqués de tabourets portant les commodités de l’intoxication. Il y a quatre alvéoles qui se font vis-à-vis avec quatre lumignons opalescents qu’entretient un « boy » qui se meut en silence comme une ombre irréelle. L’Anglaise est déjà couchée. Son torse est nu comme celui d’un mitron; elle n’a gardé que sa jupe de drap sombre; seule la résille rose du soutien-gorge voile ses seins ambrés. Elle ne nous regarde même pas, toute aux préparatifs du « boy »agenouillé.
La main d’Evelyn se crispe sur la mienne. Ses ongles laissent de petites parenthèses blanches sur ma peau brunie. Pauvre enfant qui porte avec orgueil les hontes héréditaires ! J’ai envie de l’enlever dans mes bras, de l’arracher malgré elle à ce poison qui la tuera lentement… Si j’osais ! Elle est là qui frémit et qui piaffe d’impatience, comme la cavale superbe de Mazeppa avant la course à l’abîme… Faut-il ? Oui ! Advienne que pourra… Ce ne sera pas le geste désespéré de l’amant qui veut libérer celle qu’il aime, mais l’impulsion qui vous pousse à sauver une créature humaine sur le point de se noyer… Je me penche vers elle, je la saisis à bras-le-corps, pour paralyser sa résistance possible… Je vais l’entraîner loin du gouffre… Je me retourne… Une voix arrête net mon élan.
– Qu’est-ce qui vous prend ? Vous êtes fou ?
Le comte Alfierini est là. Il me regarde, les yeux fixes, les sourcils tendus, les mains derrière le dos. Je suis paralysé. Je lâche mon étreinte… Alfierini ricane. Evelyn me toise curieusement. Elle s’adresse au comte :
– Est-ce que votre ami a toute sa raison ?
– Excusez-le, ma chère… C’est un Français… Ils sont parfois un peu cavaliers avec les femmes.
Je voudrais protester. Je serais navré qu’Evelyn se méprit sur mes intentions. Mais elle a déjà disparu et la tenture est retombée sur elle. Alfierini me regarde toujours. Il prévient mon apostrophe :
– Vous voulez donc ameuter le quartier ? Recevoir d’un de ces Chinois un coup de stylet entre les omoplates, un coup qui vous clouerait au sol comme un rumsteak sur l’étal du boucher ? Parisien chevaleresque et ridicule ! Vous me faites pitié… Allons ! Rentrez les belles phrases qui chatouillent votre glotte ! Je les lis dans vos yeux… Est-ce que je vous ai chargé de veiller sur la destinée de cette femme ?
À mi-voix, me contenant avec peine, je réplique :
– Prenez garde !… Je sais tout de votre affreuse vengeance. Si je voulais, je révélerais…
– Qu’est-ce que vous révéleriez ? Que vous vous nommez simplement Gérard Dextrier, que le prince Séliman n’existe que dans mon imagination et que j’aurais dû vous laisser à votre misère d’émigrant famélique ? Essayez, mon ami. mais vous apprendrez bientôt qu’on n’a pas de pitié pour les déclassés à New-York.
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