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Critique de Ludo78600


Lorsqu'Edouard Roussel débarque un vendredi après-midi, dans une petite paroisse des Ardennes, il n'a qu'une idée en tête : faire la peau au prêtre qui a abusé des mois durant de son fils Benjamin.

L'église est vide et le saccage qu'il y perpètre ne met pas fin à la rage qui l'anime.

Fortement marqué par l'ancien testament, et « le sacrifice d'Abraham » dont il ne retient finalement que « le silence » d'Isaac (cet enfant dont le père pour prouver son Amour de Dieu était prêt à le tuer et qui vivra plus de centenaire sans s'exprimer sur ce traumatisme), Edouard, fils de boucher, orphelin à quinze ans, veut entendre la vérité de la bouche du monstre qui à voler l'innocence de la chair de sa chair.

Il rencontre le père Grégoire Delaunoy qui lui apprend que le violeur d'enfant a été « déplacé ».

Le représentant de l'Eglise accepte néanmoins de le contacter pour tenter de le faire venir à la demande de celui qui culpabilise d'avoir trahit la confiance de son enfant.


On attend pas forcément Grégoire Delacourt sur ce genre de sujet, et c'est incontestablement ce qui m'a encouragé, même si je suis « presque » un inconditionnel de l'auteur (« La femme qui ne vieillissait pas » étant le seul de ses romans que je n'ai pas encore lu) de faire la demande sur Netgalley pour obtenir les épreuves non corrigées de son prochain livre qui sort le 20 février.

J'ai dévoré littéralement « Mon père » ; en une journée.

En étant un moi-même, il est bien évident que je ne pouvais pas rester insensible au calvaire d'Edouard, à la rage, alimentée de culpabilité et du sentiment de trahison, qui l'anime.
Difficile de ne pas s'interroger sur nos propres réactions face à une telle épreuve : on comprend sa peur de sombrer dans la violence la plus primitive et animale qui soit. La loi du Talion fait parti de la Bible.

Grégoire Delacourt ne livre pas ici un véritable huis clos puisque sa narration est également l'occasion de revenir sur le parcours de son personnage principal (une mère « bonne du curé », la mère de son fils se révélant une institutrice également portée par la religion catholique) qui part en croisade pour Benjamin et son frère symbolique Isaac.

Le Nord n'est jamais loin dans les histoires de cet auteur est c'est là aussi ce qui me fait l'apprécier car j'ai des liens avec cette région.
J'apprécie ces clins d'oeil à nos origines communes et plus particulièrement lorsqu'il parle de l'endroit où se trouve ma maison secondaire, mais je m'égare…

L'angle choisit se révèle très actuel à un moment où la libération de la parole prend de plus en plus d'importance dans notre société.
Le livre est dédié à des victimes.
Le propos étant de la nécessité de mettre fin au silence, même si celui-ci a favorisé des errements dans le passé.
La culpabilité d'Edouard a de sérieuses bases de par sa scolarité en pension, celle de sa mère n'est pas, elle non plus, dénuée d'intérêt.

Grégoire Delacourt flirte à la limite du blasphème à certains moments, il ne franchit néanmoins jamais, à mon sens, la frontière.

Si certaines de ses paroles sont crus, certains de ses propos provocateurs, il contrebalance par des connaissances sérieuses sur le culte et des tentatives de susciter de sincères réflexions. Ce livre est d'une vraie intelligence ; à commencer par le choix du titre.

Cette histoire c'est un peu celle des croyants confrontés aux contradictions de la mise en place de la religion.

Grégoire Delacourt fait-il preuve de démagogie ? La réponse à cette question est sans conteste dans le rebondissement final de « Mon père » un roman superbe qu'il faut absolument se procurer.
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