AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,93

sur 688 notes
Mon Père - Grégoire Delacourt - Éditions le livre de poche - Lu en avril 2020.

C'est complètement retournée que j'ai fermé hier soir la dernière page du livre Mon Père de Grégoire Delacourt.

Nous passons de chapitre en chapitre de l'enfance d'Édouard, père de Benjamin à l'enfance de Benjamin lui-même et du père au père, ecclésiaste.

Après 138 critiques déjà postées sur Babelio, que puis-je ajouter de plus à tant d'horreurs décrites dans ce livre, ce petit Benjamin, fils d’Édouard et Nathalie, l'innocence, la candeur, la confiance qu'un gamin peut avoir dans les adultes qui va voir sa vie basculer dans l'enfer.

Mais avant d'en arriver là, l'auteur nous parle de l' enfance d'Édouard, de son père boucher qui lui apprend à manier les couteaux bien plus qu'il ne peut lui communiquer d'amour et de tendresse, qui a honte de ses mains de boucher incrustées du sang des animaux, de sa mère qui travaille au presbytère, une femme très pieuse, qui ne jure que par Dieu et tout ce qui tourne autour. Édouard dira "Sans la chaleur de ses mains, ma mère avait froid" "Plus tard, j'ai pensé qu'un père qui n'étreint pas ne façonne pas et qu'on en conserve pour toujours une infirmité. Une sorte d'inachèvement" page 32.

Venons-en à Benjamin, enfant né d'une union presque forcée, ayant été conçu dans "l'illégalité", Édouard et Nathalie doivent se marier. Et puis, Nathalie s'en va, premier déchirement pour ce petit garçon. Sa maman l'emmènera avec elle à 200 km de son père.
Et puis, un jour, Benjamin est envoyé en colonie de vacances, et c'est là que son enfer va commencer avec ce père ecclésiaste qui sous couvert de l'amitié va soumettre Benjamin à l'insoutenable. Benjamin qui envoie une carte à son père "viens me chercher", mais le papa n'a pas compris, n'a pas imaginé ça, n'a pas pris au sérieux l'appel au secours de l'enfant.
A son retour, l'enfant dépérit, ne rit plus, à des douleurs au ventre, de la fièvre, des maux de tête, ne mange plus bien, mais ne dit rien, ses parents ont beau l'interroger, il se tait.

Jusqu'au jour où il entre à l'hôpital et que les médecins découvrent la vérité.

"Il est des silences qui se brisent trop tard" - page 111

Le papa de Benjamin n'aura de cesse que de retrouver ce prêtre qui a abusé de la confiance de l'enfant avant d'abuser de son corps. C'est un cri, un long cri de rage, un cri de révolte, un cri de honte. Il ne croit pas en la justice. "Pourquoi n'avons-nous rien vu, Nathalie ? Pourquoi ?" page 152.

Vous l'aurez compris, ce n'est pas facile à lire, mais l'auteur a dû avoir encore plus difficile à mettre noir sur blanc ce vécu pour briser le silence qui se fait autour des abus d'enfants par certains hommes d'église en qui les enfants devraient avoir toute confiance. le silence de l'Église elle-même jusqu'il n'y a pas longtemps.

Ce que j'ai moins aimé, mais j'ai bien compris la démarche, c'est le parallèle que l'auteur fait chaque fois avec Abraham à qui Dieu demande de sacrifier son fils Isaac, et dont le geste fût arrêté par un ange (ancien testament). Il compare le silence d'Isaac qui n'a jamais demandé à son père pourquoi, le silence de ceux qui savaient (les serviteurs) et qui se sont tus et n'ont pas bougé. Est-ce que la vie d'un enfant compte si peu ? Que l'auteur nous explique cette comparaison, oui, mais y revenir jusqu'à la fin du livre, c'est juste un peu trop.

Un livre que j'ai lu avec le cœur chaviré du début à la fin, mais il fallait que je le lise.
La préface est absolument splendide, je vais la mettre en citation. Elle dit bien mieux que je ne pourrais le faire pourquoi l'auteur a écrit ce livre.




Commenter  J’apprécie          16136
Si Mon Père n'était qu'un roman, qu'une histoire inventée de toutes pièces, je n'aurai probablement pas un océan de douleur salée dans les profondeurs de mes yeux noyés. Car il s'agit de l'histoire de trop nombreux enfants arrachés à la vie, à leur enfance et à la promesse.

Notre Père qui est aux cieux,
Ne nous soumet pas à la tentation,
mais délivre nous du mal.

Grégoire Delacourt signe un roman magistral sur les dérives perverses ecclésiastiques mais il signe surtout un portrait glaçant des rouages du silence. Mon père est un roman-tiroirs où grouille, tels des milliers de vers, toute la misère du monde.

On ne met pas au monde un enfant pour le plonger dans l'horreur, non, on aspire pour lui à lui montrer combien le monde est beau, bon et juste. On va l'aimer du mieux que l'on peut cet enfant. On va l'aimer pour qu'il grandisse bien, pour qu'il s'épanouisse, pour qu'il soit heureux. Voilà le rôle d'un père. Édouard c'est ainsi qu'il prend à coeur son rôle de père auprès du petit Benjamin, dix ans.
Si les parents peuvent sauver un enfant par l'amour écrira Delacourt, un enfant ne sauve pas ses parents par l'amour. Parce que l'enfant est arrivé avant qu'Edouard et Nathalie ne soient un couple, parce que Nathalie est volage et passionnelle, le couple ne tient pas. Dans ce divorce sans histoire, le petit Benjamin se met à changer. Insomnies, cauchemars, problèmes alimentaires,... On imagine que l'enfant réagit mal au divorce. Car bien évidemment, qui peut imaginer le pire ? le pire est insoupçonnable. On n'en veut pas, on ne le voit pas, on ne l'entend pas, on ne l'imagine même pas.

Parce que la confiance est là, parce que l'enfant se montre fragile, différent, réceptif à l'amitié, parce que l'enfant est insouciant, parce que la peau d'un enfant est chrysalide, douce, qu'un enfant est « séduisant et désirant », Mon Père use, touche, abuse et saccage.
À vomir.

Le silence est omniprésent. Taire l'horreur. Taire ce qu'un enfant ne peut comprendre.
« Le silence est un assassin qui ne dénonce pas.
Le silence est le seul refuge des enfants quand ceux qui devaient inconditionnellement vous aimer vous ont trahi. »

Pas un mot de trop.
Comme une histoire vraie qui fait mal, c'est cela Mon Père. Horriblement mal pour tous ces enfants sacrifiés au nom de la jouissance d'hommes de dieu qui sous la joute de lois de chasteté, cherchent le plaisir dans les peaux jeunes.

Un roman fort, qui trouverait sa place sur les planches d'un théâtre tant les scènes entre Édouard et le Père sont intenses et bouleversantes dans un huit-clos insoutenable.

Grégoire Delacourt expliquera dans une interview qu'il lui a fallu du temps pour mûrir ce roman, qu'il était là Mon père, mais qu'il n'était pas prêt. Élevé dans la foi de Dieu et les préceptes chrétiens, il a vu enfant, les jeux auxquels s'adonnent les prêtres. Il a vu cet enfant revenir de la chambre du prêtre et pleurer sous sa couverture. Et lui priait que son tour n'arrive pas.

Un roman nécessaire pour mettre toute la lumière sur ces immondices au sein des églises.
Un roman qui ne prétend pas guérir mais qui rappelle que trop d'enfants seront à jamais damnés du paradis.
Un roman où Dieu, je l'espère, pleure des larmes de sang de voir le monde de dégénérés qu'est devenu son paradis.

Amen.

Commenter  J’apprécie          15030
C'est plein de colère et de rage qu'Édouard pénètre dans le silence sépulcral de l'église. Bascule le bénitier, fracasse la Mère du Christ contre le mur, lance les vases, renverse les chaises, démembre les prie-Dieu, arrache les pages d'un missel, brise un vitrail. Une haine tournée vers l'église, la religion. Entendant tout ce raffut, un prêtre affolé bondit vers lui et lui demande les raisons de son geste. Ce à quoi Édouard, repensant à son fils, Benjamin, lui demande aussi pourquoi ? Pourquoi avoir fait ça à son fils ? Pourquoi l'avoir violé ? Pourquoi lui ? le père de famille veut des réponses. Là. Maintenant. Ne veut aucune zone d'ombre. Des réponses, Édouard en aura... Aussi cruelles, violentes et inimaginables soient-elles...

Grégoire Delacourt nous plonge dans un huis-clos aussi terrifiant qu'impensable. Durant 3 jours se confrontent le père et le prêtre qui a violé son fils. Parce qu'Édouard veut tout savoir, tout comprendre, quitte à se montrer violent, le prêtre n'aura d'autre choix que de se confesser. Ce roman paraît alors qu'un nouveau scandale de pédophilie éclabousse l'église catholique et que sort sur les écrans le film de François Ozon, "Grâce à Dieu'. Non seulement Grégoire Delacourt parle de pédophilie, aussi crûment et bestialement soit-elle, il aborde également divers thèmes tels que la vengeance, le pardon, la lâcheté humaine, la justice. Il entrecoupe, également, les confessions du prêtre avec les souvenirs d'Édouard. Souvenirs de son enfance au sein d'une famille très croyante et souvenirs des moments emplis de joie avec son fils. "Mon père" est un cri du coeur d'un papa qui n'a rien vu venir, un cri de révolte, d'indignation, d'horreur et de colère.
Percutant, étouffant et bouleversant...

Commenter  J’apprécie          9410
Que dire qui n'ait déjà été dit à propos de ce roman (?) d'une force incroyable porté par une écriture maîtrisée à l'extrême, des phrases percutantes , violentes , effilées comme la lame d'un scalpel , un vocabulaire riche , précis, sans concession .Pour moi , Grégoire Delacourt montre dans ce court ouvrage , toute l'étendue de son immense talent et nous avons besoin de ce type de récit pour nous ouvrir définitivement les yeux sur ces horreurs qui , enfin , en défrayant de plus en plus l'actualité, touchent les consciences et semblent (!) quelque peu les réveiller .Oui , ces atrocités existent , oui les bourreaux sont protégés par des Institutions plus soucieuses de ne pas ébranler les murs qui les soutiennent et de conserver leur pouvoir que de rendre leur dignité aux victimes dont ils ont , et pour toujours , gâché la vie.... grâce à la cécité de la plupart d'entre nous....
Au - delà , je retiens , dans la préface, la remarque de " la dame de Vannes " qui n'a pas souhaité, et c'est son droit , affronter la difficulté humaine de ce livre .Cette dame , c'est toi , c'est moi , c'est nous....Et , oui , c'est comme ça et pourtant , il faudra bien l'affronter cette réalité et tant mieux si elle nous choque .Ça fait partie de la Connaissance . Ne rien vouloir savoir ....Ne se mêler de rien ....
J'ai adoré le conte " Lucas " . Ancien enseignant , ayant côtoyé des jeunes toute ma vie , j'ai fait partie de ces gens dont le métier consistait d'abord à " gagner la confiance des enfants " pour faciliter les apprentissages" et pas pour les soumettre à de telles horreurs....Il n'y a pas que les prêtres, les instits ou les profs ......Le monde est violent et le manque de communication de plus en plus fréquent , jusque dans les familles parfois fragilisées par les difficultés et aléas de la vie ...
Une anecdote pour terminer .Dans le village de mon enfance , nous allions tous au catéchisme, nous faisions tous notre Communion....Notre curé était un brave homme à la " main leste " face à nos facéties...nombreuses et pas toujours très " malines " .
Le dimanche , après la messe , il passait au bar " prendre " un ou deux... pastis " avec les " hommes ", montait sur sa moto et allait manger " le poulet dominical " chez sa maîtresse que tout le monde connaissait et aimait bien...( il se disait même qu'il avait permis à la démographie du village de ne pas s'effondrer....) . Pas très moral tout ça ? D'accord , mais quand même moins traumatisant que " Mon Père " , non ? Les enfants , notre curé , il les respectait , les histoires de grands , c'est autre chose , non ?
A ma connaissance , il n'a jamais été " déplacé " .Vous imaginez la réaction des paroissiens ....et paroissiennes....si tel avait été le cas....
Merci à Grégoire Delacourt de nous aider à ne plus jamais dire " je ne savais pas " , on l'a trop entendue cette phrase ...Moi , j'dis ça , j'dis rien , mais ...je n'en pense pas moins.....
Commenter  J’apprécie          675
Ce livre m'a été proposé par mon amie Marilyn de la médiathèque .
Lu d'une traite l'histoire d'un père Edouard qui apprend que son fils Benjamin a été violé par un prêtre.
S'ensuit une confrontation et un huit clos étouffant ....
«  Pourquoi nous n'avons rien vu ? »
Ce livre noir, coup de poing, violent, percutant , met des mots et quels mots ? sur un sujet explosif, tabou et cruel, des actes innommables, intolérables, indignes , destructeurs , une ignominie qui n'a pas de nom...
Une provocation pour le lecteur , cloué par l'émotion—— indigné par ces monstruosités .
La manière de traiter ce sujet, qui mêle la vie d'avant , celle du couple et la scission du récit où l'auteur insère des « paroles bibliques », l'histoire d'Abraham , ( bible, ancien testament ) interpellent.
J'en ai été gênée . La chute de l'ouvrage m'a laissée pour le moins perplexe ....
Un sujet sensible presque insoutenable , révoltant, sur lequel je n'ai pas envie de m'étendre tellement il est douloureux, un ouvrage étouffant difficile à oublier ...qui déstabilise ...
Commenter  J’apprécie          6715
C'est volontairement que j'ai choisi de découvrir cet auteur avec « Mon Père » de Grégoire DELACOURT. En effet, son dernier opus «l'enfant réparé », y fait suite dans le passage du silence à la vérité.

J'arrive après de nombreuses belles critiques de mes amis Babélio.

Je cherche ici à exprimer mes ressentis.

Au cours de ma lecture, je suis passée par de nombreuses émotions et me suis interrogée sur l'origine de ce roman, qui ressemble à une confession, à un drame vécu dans la vraie vie.

Page après page, mon coeur s'est serré toujours plus. Je m'en suis arrachée des pétales de larmes.

Grégoire DELACOURT a les mots justes qui vous mouchent, qui vous bousculent et vous font sortir de votre zone de confort.

Je n'en suis pas remise.

Un cri de douleur pour dire l'indicible dans la vie de ce jeune couple séparé, rattrapé par son destin.

L'histoire d'un père, Edouard, qui cherche à comprendre son fils Benjamin 11 ans, qui n'est plus le même depuis qu'il est allé en colonie de vacances avec la paroisse.

Pourtant, il lui a envoyé une carte postale avec une seule phrase : viens me chercher. Edouard n'a pas compris le message.

L'auteur fait un parallèle biblique avec Abraham qui obéit à Dieu en acceptant le sacrifice de son fils Isaac, sur le bûcher pieds et poings liés. Il en fait une autre lecture tout à fait adaptée aux circonstances dans lesquelles il se trouve.
« Je suis seul dans ma douleur
Benjamin, frère d'Isaac, est seul dans son silence ?
Les fils sont des égarés »

Son fils est mutique, mal dans sa peau, mais son corps finit par manifester des signes inquiétants.

Il est hospitalisé et les meurtrissures sont là.

Edouard sait et réalise maintenant.

Il va aller retrouver le curé Préaumont, pédophile et lui régler son compte.

Une fureur sauvage habite Edouard, il va saccager l'église. Ce face à face avec le curé abuseur, tourne en un moment de vérité. Il va le faire passer aux aveux, le torturer de ses abominations et le briser.

Il s'est fait justice lui-même pour que son enfant puisse être reconnu comme victime et entamer un travail de réparation.

« je veux te demander pardon de n'avoir pas su te protéger mais je crains que tu ne sois plus capable de pardon. Plus capable de rendre un bien pour un mal. C'est quelque chose dont le poinçon de ton abuseur t'a aussi amputé. En cela nos vies attentées, nous sommes toi et moi semblables désormais. Nos coeurs se sont retournés tout à fait. Nous avons arrêté de croire aux Eglises, à la mansuétude et à la bonté de nos frères humains. Nous croyons désormais à un châtiment, et cela tant que l'amour sera plus vulnérable que le mal. Et le mal, croyez-nous, vous qui connaissez maintenant notre histoire, prolifère à une vitesse vertigineuse, il n'est pas rare qu'un dépravé en remplace un autre qui en remplace un autre ainsi de suite pour l'éternité car ils sont comme du chiendent ».

Ensuite, j'ai lu "l'enfant réparé", mais il est encore trop tôt pour en dire un mot, mon émotion est encore trop vive.
Commenter  J’apprécie          6611
Oh! my god ! Je viens terminer le livre Mon père de Grégoire Delacourt qui m'a complètement chamboulé. Je ne m'attendais pas à une lecture d'une telle envergure, qui tombe au moment où le Vatican se trouve éclaboussé par les scandales de pédophilies régnant au sein de ce cercle bien fermé et trop bien protégé.

Dès le début le ton est donné lorsqu'un père de famille fait irruption dans une église, détruisant tous les objets sacrés qu'il trouve à portée de main. Sa haine est telle que le bruit attire le prêtre de la paroisse. Interdit devant les détériorations occasionnées par cet homme qu'il ne connaît pas, en tentant de le ramener à la raison, ce dernier n'est pas au bout de ses surprises.
Au fil des pages, l'auteur nous plonge dans un huis clos époustouflant entre un abbé ayant abusé d'enfants et dont le père de l'un d'eux, habité par un désir de vengeance, va entrainer cet abbé dans un processus de divulgation de sa perversion à l'encontre de son fils Benjamin.
Parce qu'il pense ne pas avoir su protéger son enfant des griffes de son violeur, ce père va tenter de faire justice lui-même des abus subis sur son enfant de dix ans, durant son séjour en colonie de vacances, puis chaque mercredi de la rentrée.
Habitué à manier les couteaux lorsque son père exerçait le métier de boucher, l'abbé devra, sous la contrainte, décrire dans sa totalité le déroulement exact des actes exercés sur le petit Benjamin.
Si certains passages sont réellement abjectes, l'écrasante divulgation des faits ne sera pas sans exercer un profond dégout au lecteur même, à l'encontre du père Préaumont.

Attendez vous à dénouement final des plus surprenant !!!

Un récit marquant, dérangeant, violant, qui se lit pourtant d'une seule traite, dénonçant les actes de pédophilie hélas, encore bien présents dans le milieu ecclésiastique.



Commenter  J’apprécie          6111
« Il me demande si je vais le tuer. »
Difficile de faire un commentaire à la hauteur de la laideur et de l'horreur.
Je ne peux pas être mièvre. Les frissons l'empêchent. Les mots oppressent.
Colère pure et primitive d'un père qui n'a rien vu.
« Ma merde dans les yeux, je te dis. »
Silence d'un fils.
« le silence est le seul refuge des enfants quand ceux qui devaient inconditionnellement vous aimer vous ont trahi. »
Un prêtre souille un enfant.
« Tu es plus bas qu'un chien. Plus vil qu'un rat. Car ni l'un ni l'autre ne forniquent avec leurs petits. »
Palette de sensations exacerbées. Sombre peinture contemporaine d'une barbarie sexuelle.
« Je lui répète ma question. –Pourquoi mon fils ? »

De la fureur à la vengeance, du pardon à l'incompréhension, de l'écoeurement à la panique Grégoire Delacourt fouille toutes les données d'une crise d'actualité d'une main maitrisée avec l'intelligence fine de laisser ouverte toutes les possibilités de se réfugier dans nos idées.
« Qu'il est dur de faire ce geste de couper l'autre du monde. de sectionner du vivant. »
Que feriez-vous, vous, si l'on faisait gouter la boue des hommes à votre enfant ?

J'ai été élevé dans le plus pur environnement catholique qui soit, fait mon catéchisme, mes communions, servi la messe des années durant, gravi maintes fois les chemins de croix de France, fréquenté tous les patronages possibles.
Jamais aucun prêtre, curé, abbé, n'ont eu de comportements équivoques ou déplacés envers moi.

« Vous avez martyrisé mon fils, vous l'avez condamné à une réclusion perpétuelle en
lui-même »

Le châtiment doit être à la hauteur du crime.

Commenter  J’apprécie          576
Grégoire Delacourt fait partie, de ces auteurs qui me sont chers, dont les nouveaux romans sont incontournables dans mon année de lecture.
Il m'avait plus habituée à ses personnages féminins, en se glissant brillamment dans la peau de femmes, parfois amoureuses, parfois blessées, écorchées, tourmentées...
De femmes, aussi fortes, que fragiles à la fois...
A nous parler d'amour.
De ses bonheurs, ses plaisirs, toutes les émotions qu'il nous procure...
Et de toutes ses désillusions aussi...
Des histoires d'amour, de couples, de bouleversements, qui me parlent et me chamboulent à chaque fois.

Cette fois, son roman nous parle d'un homme, d'un père !
Enfin... de deux pères...
Celui qui engendre la vie d'un enfant, l'élève et celui de l'Eglise, qui montre la voie de Dieu.
Ici, il aborde un sujet sensible de l'actualité : L'abus sexuel de certains de nos prêtres, sur nos enfants.
L'histoire d'un homme, d'un père, anéanti, démuni après les révélations de son jeune garçon, et dont la rage et la colère sont incontrôlables...
Un père empli de vengeance et de haine, face à ce représentant de l'Eglise, en qui il accordait toute sa confiance...
Ce sentiment de culpabilité de n'avoir pas pu, pas vu, que la chair de sa chair, son propre fils, était dans une détresse profonde.
Trop préoccupé par ses propres problèmes, ses soucis trop envahissants du quotidien...
De n'avoir rien fait à temps.
Un père qui ne sait que faire face à son fils souillé, sali, brisé...

Un huis clos dérangeant, saisissant, déchirant...
Un roman qui n'a fait que renforcer toute ma confiance et mon admiration pour cet auteur, qui sait décortiquer toutes ces situations de nos vies, qui nous touchent de près ou de loin.
Un récit pour mettre des mots sur ces actes intolérables, odieux, ignobles...Ne plus se taire.
Pour mettre fin au silence...

Je remercie Netgalley et les éditions JC Lattès, pour leur confiance.
Commenter  J’apprécie          538
En écrivant ce livre, d'un père apprenant la sauvagerie d'un prêtre sur son fils de onze ans, c'est le silence assassin qui a entouré les faits qui le crucifie.
Son propre silence, parce qu'il ne savait pas, parce qu'il ne pouvait pas savoir, parce qu'il aurait dû savoir.
Le silence de son fils, dont il voyait le mal être, à qui il disait tu peux tout me dire, dis moi, et l'enfant s'enfermait dans un silence de choses indicibles.
Et le silence d'Isaac, le fils unique d'Abraham, qui se laisse lier sur un autel de bois, qui demande où est le bélier, puisque c'est un sacrifice, et qui, sauvé par l'ange, s'enfonce dans le silence, ne se révolte pas, ne demande pas pourquoi. Son père a voulu l'immoler, point.
Personne n'est intervenu, le silence inexpliqué s'instaure pour des siècles, sur ces petits crucifiés, muets, jusqu'au nouvel Isaac, Benjamin, parti faire une colonie de vacances en été. Il écrit bien pourtant à son père : « viens me chercher » et pourtant la pesanteur endors ce dernier, pesanteur de la religion, du désir de sa mère à lui, un peu bigote, bref.
Et aussi parce que dire, c'est faire exister l'horreur, c'est reconnaître l'odeur du sang, c'est nommer l'innommable.
Le silence couvre toujours une grande souffrance, voilà pourquoi il est si difficile de le briser, nous dit Grégoire Delacourt, dans un livre totalement différent de son premier ( la liste de mes envies) car, lui, il brise le silence en écrivant sur ce petit innocent qu'est son fils et sur tous les petits innocents , en disant sa colère que cela, la violence faite sur des petits continue encore et encore, en deux mille ans de honte.
Abraham n'a même pas imploré le pardon de son fils après avoir tenté de l'immoler.
Et le père de l'histoire n'a pas réussi à protéger son fils.
Grégoire Delacourt tisse les deux histoires millénaires qui n'en sont qu'une, le martyr d'enfants violés, condamnés au silence où ils sont seuls désormais. Et « l'impuissance de l'amour des pères à parfois ramener leurs petits à la surface du monde »
Aujourd'hui, Benjamin parle un peu, son père a compris son calvaire, et l'auteur nous confie son cheminement.
C'est Yvan-T qui m'a conseillé de lire « Mon père » avant « l'enfant réparé ». Je dois sécher mes larmes d'abord.
Commenter  J’apprécie          5013




Lecteurs (1349) Voir plus



Quiz Voir plus

La liste de mes envies

Qui est l'auteur du roman ?

Grégoire Delacourt
Grégoire Delcourt
Grégoire Delacroix

20 questions
334 lecteurs ont répondu
Thème : La liste de mes envies de Grégoire DelacourtCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..