Incipit :
Entre le massif de l’Assaba et le fleuve Sénégal, on ne dit pas un mot de l’aventure vers l’inconnu. Rien ! Pas un son articulé, ni un bruit ayant la forme d’une syllabe, d’un cri, d’un soupir ou d’une respiration bruyante. Chut ! Ne faites pas fuir la bravoure dans le cœur des jeunes garçons endormis. Mettez des mains fières devant vos bouches ensanglantées. Enfouissez vos visages disgracieux dans la terre. Cachez-vous derrière la maison de votre père, et ne revenez pas avant d’avoir camouflé l’excrément de lâcheté qui a giclé sur votre honneur, dès que votre bouche a souhaité dire la vérité. Un homme ne se plaint pas.
Mon coeur est sec d'avoir pleuré, et mon corps est embué de souvenirs imprécis. Les Noirs, ça ne pousse pas comme ça en France.
Vous, monsieur , vous écrirez, vous écrirez à fusionner votre main avec le stylo, puisque la civilisation à laquelle vous vous soumettez prétend mettre en signe tout ce qui est capable de sortir de la tête d’un humain, vous allez consigner les beautés et excréments de ma pensée. […] Ils posent des questions par dizaines, centaines, milliers. Vous répondez, répondez, répondez, répondez jusqu’à ce que vous vomissiez vos intestins avec la réponse qu’ils espèrent, puis ils enjambent votre corps inerte, traitent votre vomi avec le plus grand des soins avant d’en extraire le mot qui manquait à leur tableau.
Caro nous attend avec impatience pour entamer le chapitre sur les adjectifs démonstratifs et possessifs : « Montonson ! Matasa ! Notrevotreleur ! Nosvosleurs ! Mestesses !
En vérité, lorsque le ciel s'assombrit, que la terre se déchire et expulse les graines, que les arbres se meurent et donnent leur corps au feu purificateur des incendies, y a-t-il encore de l'espoir pour le paysan ? Lorsque les pâturages jaunissent, que les puits et les rivières s'assèchent, y a-t-il encore de l'espoir pour l'éleveur ? Lorsque le lit du fleuve devient une forêt, que les barques s'enfoncent dans le sable et que l'odeur des poissons morts envahit les berges, y a-t-il encore de l'espoir pour le pêcheur?