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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
La phrase-seuil donne immédiatement une idée du voyage proposé par l'auteur : « A la maison tout le monde parle songhay, peul, bambara, soninké, senoufo, dogon, mandinka, tamasheq, hassanya, wolof, bwa. Mais à l'école, personne n'a le choix : il faut parler français. » Ce sont bien les langues qui sont au coeur du livre, avec le drame pour le jeune Hamet, le narrateur, de ne pas pouvoir parler dans sa langue natale, celle qui l'amuse, le distrait : « langue de nos meilleures amitiés, nos meilleurs souvenirs »

Hamet est un écolier de Bamako, plutôt turbulent et en froid avec cette langue française qu'il doit pratiquer à l'école alors qu'elle n'est pas parlée dans sa famille. Il a bien des difficultés à la comprendre et devient le souffre douleur du groupe et des enseignants, Mme Guindo et M. Diarra . Il fait l'école buissonnière pour s'adonner à ce qu'il aime : lire, jouer, manger des beignets. Cette partie est parfaitement traitée, elle débouche sur un éloignement du jeune garçon chez les grands-mères dans un village reculé où Hamet est censé apprendre le respect des traditions et l'obéissance. le voyage en bus, décrit à hauteur d'enfant, l'installation à la campagne où il observe un monde nouveau, découvrant la pêche collective de la mare, la culture aux champs – sous la surveillance de Demba, au turban bleu azur et chapeau conique –, sont autant d'épisodes charmants, drôles et poétiques.

Ce roman d'apprentissage, avec l'invention de mots et de phrases insolites, est un vrai régal. On doit deviner le sens des expressions qu'entend le jeune Hamet, mais ce n'est pas gênant dans la mesure où cela permet d'adopter la position du jeune garçon, de ressentir la frustration dont il souffre. Je dois avouer que l'absence de lexique pour les expressions en italique m'a désorienté dans un premier temps, alors que je ne trouvais pas certaines traductions sur internet. Maintenant j'ai envie de sourire et d'applaudir à l'ingénieuse perfidie de Diadé Dembélé, consistant à me mettre dans une situation analogue à celle vécue par le petit personnage du roman.

L'auteur s'est inspiré d'un séjour en 2008 au Mali. Un roman à lire pour l'originalité de traitement de thèmes forts : la langue, la liberté, l'insoumission… Et aussi ce duel des grands-mères, apparaissant tardivement, comme une scène finale signant la quête des origines.

Diadé Dembélé est né à Kodié, dans l'ouest du Mali. Diplômé du Master de création littéraire de l'université Paris VII, il travaille en tant qu'interprète au sein d'une association d'aide aux migrants. le duel des grands-mères est son premier roman, couronné du Prix littéraire de la Vocation 2022.
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«Je suis l'enfant seul au cordon ombilical cisaillé à l'épée, assoiffé de lait, pourtant la tête noyée dans le sein de sa grand-mère. Je ne sais pas si la lune bleue ou grise, si les vagues de l'Atlantique veulent engloutir toute la côte ouest, affamées de terres à inonder ou si les forêts profondes du Sud-Ouest peuvent se révolter contre ces terres d'assignations et envahir Bamako. Mais je veux être une fine goutte de mer ou une fine herbe insignifiante, que personne ne surprendrait à exister ostentatoirement. »

Quel excellent texte parsemé de poésie dans lequel l'auteur, Diadié Dembélé, pratique un exercice linguistique prodigieux.
Dans ce très beau premier roman, l'auteur bâtit l'histoire d'un jeune garçon, Hamet, autour de la question de la langue.
Le « Taboussi » aime ouvrir son frigo linguistique et pavaner avec cette langue française de manière extravagante. Mais à Bamako on parle le soninké et le bambara entre autre. Insolent, pratiquant l'école buissonnière et oubliant sa langue maternelle il exaspère sa mère qui ne comprend pas et décide avec son père (résidant en France) d'envoyer Hamet dans son village, Yélimané, pour retrouver un rapport avec ses origines culturelles et religieuses, ses coutumes, ses superstitions. Grace à ces quelques mois initiatiques il redeviendra obéissant et soumis.
Il y rencontrera ses grands-mères, Mama Cissé et Mama Hata, participera aux récoltes, à la pêche collective, écoutera les légendes et assistera aux palabres auxquelles prendront part piqure-douce, mouche-silencieuse, quatre-pile et chapelet-court. Hamet par ce retour aux traditions va s'émanciper et grandir.
Diadié Dembelé aborde dans ce récit fertile et touchant la question identitaire et de liberté avec beaucoup d'humour.
Une lecture que je conseille vivement !

« Écrire, déposer sur la feuille des mots que me dicte la petite voix qui hurle car elle ne sait pas encore sa langue, traumatisée par le « symbole » et fascinée par le gros-gros français ».

Lien : https://blogdelecturelepetit..
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J'ai découvert la plume sensible de Diadié Dembélé lors de la parution de son recueil de poésie en 2019, et j'avais déjà été conquise. Il s'agit donc ici de retrouvailles. Des retrouvailles en forme d'hommage, à une terre justement, aux hommes qui l'ont habitée et l'habitent, aux traditions, aux langues et à tout ce qui l'anime.

Hamet, garçon impertinent et jamais à court d'imagination, se sent parfois à l'étroit et rêve de liberté - celle qui n'est pas de son âge, et qui le conduira à se faire envoyer loin de Bamako et de l'école, dans le village d'origine de ses parents. Yélimané. Ce territoire qui recèle tant de souvenirs ou de secrets est un personnage à part entière dans le récit. Difficile de rester insensible aux images évocatrices de la place principale, des champs, et à l'indispensable compréhension du rôle et statut de chacun.

Aux côtés de ses grands-mères, et du reste de la famille plus ou moins élargie, il apprend, découvre, et fait finalement preuve de maturité, lui le petit Taboussi venu de la ville. Il comprend bien des choses, et devient un grand, à qui on demande de ne pas oublier d'où il vient ❤

À travers ce récit initiatique, se dessine la cohabitation des coutumes et de la religion, celle des enseignements ancestraux et des salles de classes, dans un équilibre fragile mais (presque) toujours maitrisé. L'éloignement et le départ sont aussi abordés, car les parents d'Hamet ont d'abord voyagé vers la capitale, puis son père est parti travailler en France, dans l'espoir de garantir un meilleur quotidien à ceux qui restaient.

Servi par un style enlevé et savoureux, des expressions de là-bas et d'ici que l'on entend claquer à nos oreilles ou les caresser, l'histoire d'Hamet et des siens est un régal auquel vous devriez, tout comme moi, vous laisser aller!
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Etre un enfant à Bamako n'est pas chose facile. Il faut obéir aux parents. Ne pas répondre aux adultes à moins qu'ils ne le demandent. Ne pas les regarder dans les yeux. Surtout, supporter stoïquement d'être grondé par ces personnes bizarres et incompréhensibles que sont les adultes. Il faut dire que c'est le cas de la plupart des enfants de l'Afrique subsaharienne. Mais, Hamet n'est pas de cet avis. Les adultes ne veulent pas le comprendre et le punissent pour rien. Dernière punition: il est envoyé au village afin de connaitre la vraie vie et revenir sur le droit chemin.

Le retour au village, une punition? Pas pour Hamet. Ce genre de punition est encore d'actualité, de nos jours. Combien de petits enfants qui « tournent mal » sont renvoyés au village afin d'y apprendre les vraies valeurs de la vie. Loin des tentations, des « mauvaises fréquentations« . Pour Hamet, ce retour aux sources lui permet de retrouver ses grands-mères. Elles lui apprennent avec amour ce que les coeurs gardaient. Elles lui apprennent les richesses traditionnelles ainsi que sa responsabilité vis à vis de ces traditions oubliées. Il s'intègre bien dans la vie du village jusqu'à un certain point. Il ne se sent plus pris au piège où qu'il soit. Cette terre, il la porte en lui. Dans son sang. Dans son âme. Au fond de lui, il le sait très bien. Malgré un moment de révolte, l'aventure commence pour lui. C'est la découverte d'une nouvelle vie. La découverte des non-dits. Des secrets tus par la famille.

Avec beaucoup d'humour, Hamet nous raconte son humble vie. Il est arrivé au village tel un petit enfant écrasé par une décision parentale qui échappe à son accord. Pour lui, le village est cource de connaissances. le lien est renoué aves les Ancêtres, par le biais du fromager centenaire, témoin muet de tous les secrets. Un vénérable arbre sacré couvrant de son ombre, les turpitudes humaines. Hamet est reparti vers la ville. Il a laissé son enfance au pied du fromager. Il a revêtu ses vêtements d'homme. de celui qui connait les secrets qu'aucune bouche n'osait exhumer. Il porte, désormais, en lui, le poids des traditions qu'il devra enseigner à ses enfants. Il est devenu le lien vivant entre le village et la ville. Entre la tradition et la modernité. Il fera sienne, cette particularité. Ainsi l'a t-il compris, au pied du fromager.
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Un premier roman prometteur. Dans cette histoire d'un gamin puni car il avait fait l'école buissonnière...il est envoyé au village chez sa grand mère, tout le monde s'y retrouverait.
Au départ, Hamet veut absolument apprendre le français, le "gros, gros," français...il s'ennuie, passe son temps à lire des livres. un jour il fait l'école buissonnière et ses parents l'envoie au village auprès de sa grand mère. il va découvrir ses racines, ses origines, un autre monde qui va lui apprendre bien plus que les livres.
C'est écrit tout en délicatesse, c'est poétique, un français magnifique agrémenté d'expression du pays. un vrai hommage à la Francophonie...celle qui s'ouvre aux autres, qui fait tomber des frontières, qui ose les mélanges, pas celle qui se complaît dans la nostalgie comme on peut trop souvent le constater tous les jours.
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