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Critique de Lamifranz


Le titre bien évidemment fait penser à la fois aux « Mystères de Paris » d'Eugène Sue (1842-1843) et au « Dernier des Mohicans » de Fenimore Cooper (1826). Et ce n'est pas tout à fait un hasard : ce roman-fleuve (le plus long de l'auteur des « Mousquetaires ») emprunte beaucoup au premier, et un peu au second.
Dans la mesure où nous sommes en plein « roman-feuilleton », il ne faut guère s'en étonner. Eugène Sue, un des pionniers du genre, avait posé les bases, la plupart des grands auteurs de l'époque l'avait suivi, de Victor Hugo et George Sand (pour les plus connus) à Paul Féval, Amédée Achard et Frédéric Soulié (pour les méconnus) et bien d'autres (pour les inconnus). Alexandre Dumas, tout naturellement, s'inséra dans ce créneau. Spécialisé dans le roman historique, il lui manquait de tenter sa chance dans le roman social, à la façon d'Eugène SueLes Mystères de Paris », « le Juif errant ») ou Paul Féval (« Les Habits noirs »).
« Les Mohicans de Paris » constituent donc, à plus de dix ans de distance, une réponse, ou en tous cas un écho, aux « Mystères de Paris »
A Fenimore Cooper il emprunte le nom et le concept de « Mohicans ». Ce terme peut correspondre à plusieurs acceptions : on peut y voir une catégorie d'humains persécutés par le pouvoir en place, ou bien des ennemis de la société (ancêtres de nos « apaches »), ou bien simplement des marginaux, ou carrément des révolutionnaires partisans d'un nouveau régime…
L'emprunt à Eugène Sue est beaucoup plus conséquent : le héros est un noble, en difficulté avec sa famille, qui se cache en homme du peuple. Beaucoup de personnages des « Mystères » se retrouvent sous d'autres identités dans les « Mohicans », et bien des éléments d'intrigue sont communs aux deux ouvrages.
Mais il serait extrêmement restrictif, de commenter les « Mohicans » uniquement par rapport aux « Mystères ». Dumas a écrit un roman historique, politique, social, éminemment romantique, et très nettement autobiographique : ce feuilleton paraît dans la presse juste après les « Mémoires » de Dumas, et s'il n'en constitue pas la suite, il complète parfaitement les éléments autobiographiques déjà fournis par l'auteur : s'il ne se met pas directement en scène, il est transparent dans le rôle de Jean-Robert, l'écrivain, et même de Salvator, le commissionnaire. Dumas dresse un tableau très plausible du romantisme en 1827, et applique dans son roman tous les éléments du romantisme littéraire, tant dans le roman noir, le roman sentimental, le roman policier, le roman de meurs, que, nous l'avons vu, le roman historique.
C'est donc un roman total que propose ici Alexandre Dumas : moins linéaire que Monte-Cristo mais plus fourmillant (plus de six intrigues simultanées !), « Les Mohicans de Paris » proposent au lecteur une plongée totale dans le Paris de 1827 : on y côtoie toutes les couches sociales, tous les types humains, toutes les couleurs politiques ; on retrouve avec un plaisir non dissimulé le style jovial et enjoué des Mousquetaires (d'ailleurs le quatuor formé par les principaux personnages Salvator, Jean -Robert, Ludovic et Pétrus n'est pas sans nous le rappeler) ; enfin on prend ici une leçon de romantisme « par l'exemple ». Pour qui veut comprendre cette période, ce roman est aussi important que « La Confession d'un enfant du siècle » De Musset ou les oeuvres majeures de Hugo, Vigny et Nerval.
Un roman pas très connu, pas très facile à trouver, mais qui ne doit pas vous rebuter par sa longueur ni par son volume : ça se lit comme du… Alexandre Dumas !
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