Quand est-ce qu'on biaise ?

Les travaux des scientifiques montrent que l'essentialisme est l'une des principales sources de la pensée raciste et de sa grosse cousine la pensée communautariste ; de manière générale, elle est le carburant de la rhétorique querelleuse partout où l'on entend des phrases qui affrontent des Nous (normaux) et des Eux (les salauds, les escrocs, les pauvres, les étrangers, les riches, faites votre choix). L'essentialisme est aussi la force motrice qui continue à propulser le sexisme sur les rails du bon sens à bon marché au prétexte qu'il doit exister une nature masculine et une nature féminine.

Telle une langue non pratiquée, la pensée, quand elle se fixe, meurt. Le scepticisme est une mise en mouvement permanente, à l'opposé de tous les dogmatismes, pensées cadavériques et contagieuses prêtes à tout pour ne pas se voir telles qu'elles sont.

Une poule vient nécessairement d’un œuf. Et un œuf est forcément pondu par une poule. Dès lors, comment tout cela a pu commencer ? (…) Aristote a sa réponse: c’est la poule qui existe avant l’œuf. (…) [Les généticiens répondent maintenant que] le tout premier individu correspondant aux critères qui distinguent la poule de la "non-poule" a été un œuf de poule pondu par une "non-poule.
En réalité, le paradoxe est de nature sémantique: les mots « poule » et « œuf » constituent des outils conceptuels qui sont subtilement différents des véritables objets qu’on trouve dans la nature. Dans la nature, les œufs de poule sont tous un peu différents les uns des autres, et les poules également, et il n’existe pas réellement d’ensemble homogène qu’on puisse appeler « les poules » ou « les œufs de poule ». (p. 95-99)

[au sujet du "naturel"]

La frontière entre naturel et artificiel est très complexe, voire complètement floue. Si elle existe, elle ne peut être superposée à celle des produits sains d’un côté et des produits dangereux de l’autre. (..) L’appel à la nature est une forme d’argument d’appel à l’autorité, une autorité ultime, indiscutable, la manifestation d’un besoin de repère universel. (p. 174-178)

S’ouvrir soi-même aux alternatives et donc renoncer à toute posture dogmatique apparait comme la la réponse la plus efficace à notre légitime crainte d’être influencés jusqu’à la manipulation. Cela peut paraitre paradoxal: il faut s’ouvrir pour être en sécurité. (p. 216)

Quelqu’un qui a des propos sexistes n’est pas forcément une personne sexiste. Dire le contraire serait essentialiste. Ce serait donc d’une part faux, et d’autre part sans espoir : les gens seraient condamnés à ne jamais changer.

Si nous passons notre temps à chercher des coupables plutôt que des solutions, nous trouverons des coupables, à coup sûr. Mais c’est tout ce que nous aurons.

Mais si nous comparons l’humain à ses proches cousins chimpanzés, on constate que nous tuons deux à quatre fois moins nos congénères, et que surtout nous leur infligeons beaucoup moins (100 à 1000 fois moins) d’agressions physiques.

Mendax – Es-tu en train de dire que si on investit des milliers de milliards d’euros et de dollars dans la publicité, c’est parce que ça marche ?
Vled – Eh bien oui.

Que les bonobos, nos plus proches parents actuels dans le règne animal, règlent toutes leurs tensions sociales par le sexe, n’implique pas que nous devions nous adonner à la même pratique.