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Critique de NMTB


NMTB
20 décembre 2014
Le vice-consul est le pendant masculin de Lol V. Stein. On y retrouve les personnages d'Anne-Marie Stretter et Michael Richardson (ici, Richard tout court). On retrouve aussi chez ce vice-consul la même insensibilité, folie, solitude, exclusion que chez Lol. Là aussi, beaucoup de mensonges et de comédie, de toutes parts. Mais le texte m'a quand même paru plus clair. L'ambiance est cependant très différente, puisque l'histoire se situe dans une Inde colonisée qui ressemble beaucoup à l'Indochine d'Un barrage contre le Pacifique : L'intense pauvreté des autochtones et le grillage infranchissable qui les sépare des colons. L'atmosphère est pestilentielle, lourde ; on a tout le long du roman cette impression de macération malsaine et particulièrement quand on suit l'histoire parallèle de cette mendiante au pied purulent qui cherche à refourguer son bébé (la même que dans le Barrage contre le Pacifique). Mais la plus grande partie du roman se passe malgré tout dans le milieu des ambassades, avec encore un bal où la danse tient un rôle prépondérant. Ce roman m'a paru plus clair parce que le dernier dialogue est une référence évidente à la psychanalyse. Et on a peut-être un début de réponse, psychanalytique en effet, au mystère de ce vice-consul. Mais c'est une vision des choses qui ne doit pas non plus occulter le reste de l'histoire, car ce vice-consul, qui ne dit pas la vérité, qui est dans le non-dit, il est aussi celui qui a regardé la misère irrémédiable qui l'entourait et qui a agi face à elle, d'une manière folle peut-être mais d'une manière humaine, alors que tous les autres personnages sont derrière leur grillage et ne veulent pas voir. Seule Anne-Marie Stretter a fait un geste pour la mendiante au pied purulent. Un geste qui n'a servi à rien (plus inutile dans l'allègement des souffrances que le coup de folie du vice-consul, il faut avoir le courage de se l'avouer). Qui est le plus insensible dans ce livre ? Qui se cache le plus de la réalité ? Certainement pas Anne-Marie Stretter, mais peut-être pas non plus le vice-consul. Si on veut bien lire ce roman, il faudra mettre de côté toute la fausse morale humaniste, bien-pensante, rassurante et être capable de regarder les choses en face. le vice-consul s'est débarrassé de cette fausse morale, mais c'est un mort-vivant. Anne-Marie Stretter le comprend, elle souffre aussi, mais elle sait (et non sans un paradoxe insoluble) que l'espoir réside dans l'oubli et elle le dit aux autres : il faut oublier ce vice-consul et sous-entend, cruellement mais lucidement, qu'il faut également oublier la misère des autres pour être heureux. Ce même oubli que les psychanalystes appellent forclusion. Au fond, le constat de ce livre est terrible. Seule la douleur, celle qui mène à la folie, est vraie et seuls les oublieux, les indifférents, les insensibles peuvent espérer être heureux ensemble.
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