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Citations sur Les billes du Pachinko (34)

Plus loin, une autre jeune femme. Visage rond, bras mous. Pantalon mal ajusté, il faudrait le raccourcir. En bougeant les jambes, je m'aperçois qu'il s'agit de moi. Je me redresse et pour tromper mon embarras, fais semblant de jouer au Tetris.
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Une fois dehors, je ferme les yeux, les oriente vers le soleil. Des points de lumière se forment sous mes paupières. Je reste ainsi un moment, éblouie.
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Mieko m’attend devant l’église où nous nous sommes quittées. Sur ses genoux, l’emballage d’un sandwich vide, et une canette de Pocari Sweat qu’elle me donne encore pleine. Je prends une gorgée du soda. Il est chaud, légèrement salé. Je le pose entre nous. Mieko le désigne timidement :
- J’ose ? Demande-t-elle en français.
Je le lui donne aussitôt, honteuse de ne pas avoir compris qu’elle attendait que je boive en premier. Je ne me suis pas souciée de savoir si elle avait soif ou faim. Je devrais aussi lui expliquer qu’on n’emploie pas ce verbe dans ce genre de circonstances. Maintenant c’est trop tard. Et puis, je suis secrètement contente de constater que cette enfant est capable d’erreurs.
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Nous mangeons sur la table basse du salon. Mon grand-père amène la cuillère à sa bouche dans un mouvement lent, vacillant. Enfin, il aspire d'un coup, comme si le contenu laborieusement amené jusqu'à ses lèvres pouvait s'évaporer. De temps en temps il repose la cuillère, remplit un verre de soju. Il le fait avec application, sa main tremble mais rien ne déborde. Ma grand-mère, penchée sur son bol lape vigoureusement, relève parfois la tête et me demande :
-Is good ? Is good ?
Je réponds tout bas :
-Ye, mashissoyo, c'est bon, oui.
En face d'eux, je m'efforce de manger aussi lentement que mon grand-père. Retarder le moment où nous aurons tous terminé, que le silence se fera plus lourd entre nous.
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Nos trois bols restés sur la table forment un visage. Mes grands-parents les yeux, moi la bouche. Une bouche ronde comme étonnée.
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Le gouvernement japonais ne prévoit pas de rente pour les salariés. Sans fortune ni famille pour prendre soin d'eux, les vieillards sont contraints de travailler jusqu'à leur mort. Presque tous les établissements de Pachinko ont un policier à la retraite dans leur salle de surveillance.
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Cette nuit-là, je rêve d’une silhouette humaine qui rase le sol. Elle se faufile dans les ruelles, chacal, fouine dans les poubelles. La ville s’est vidée de ses habitants, c’est peut-être le Nouvel An, quand tout le monde a rejoint ses proches en province. Devant chaque Pachinko, la personne s’arrête. Elle guigne à travers les fenêtres, avant de revenir à Nippori s’assoir devant les portes du Shiny. Elle sont closes mais la silhouette a confiance. Ce n’est qu’une opération de maintenance. Demain, on les lui ouvrira. Depuis l’intérieur, le gardien lui parle. Il ouvre et ferme la bouche. Je n’entends pas ses mots. Dans les poches de son manteau, toutes les billes du Pachinko.
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Quand la Corée a été divisée, notre nationalité était encore celle de la Corée unifiée. On l’appelait Choson. A la séparation, le gouvernement japonais nous a autorisés à conserver l’identité coréenne, mais il fallait choisir entre le Nord et le Sud. Beaucoup ont choisi le Nord, pour leur famille, ou alors parce qu’ils estimaient que le Nord était plus proche des traditions de notre pays. On ne pouvait pas savoir comment la situation évoluerait. Ta grand-mère et moi avons choisi le Sud parce qu’on venait de Séoul. C’était l’unique raison. On ignorait tout du reste. On ne savait rien des raisons politiques, la guerre froide, la Russie, les Etats-Unis. Pour les Coréens du Japon, il n’y a jamais eu de Nord ni de Sud. Nous sommes tous des gens de Choson. Des gens d’un pays qui n’existe plus.
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Le sœur dans cette chambre, il me rapportait leurs échanges, sur la Corée le plus souvent, leur vie d'avant, sous l'occupation du Japon.
- Quand parler coréen est devenu passible de mort, la mère de ta grand-mère a préféré se trancher la langue plutôt que de se soumettre à l'éducation japonaise, tu savais?
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L'embarcadère est plein de Coréens, dispersés sur les sièges de la salle d'attente. Un couple entre deux âges. Des adolescents. Une équipe de base-ball, qui parle fort, qui rit. Un garçon crache. Je sens ma grand-mère, la pression de sa main dans la mienne, ses ongles dans ma paume. Sa moiteur. Je la serre à mon tour. Dehors, la brume masque l'horizon. C'est à peine si l'on devine les bateaux dans le port, les conteneurs, des tâches d'aquarelle.
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