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Critique de Pitchval


Je sais ce que je reproche à « Bouvard et Pécuchet » bien que je ne puis nier la haute qualité de l'oeuvre. C'est cette sorte de répétition outrée qui m'importune. Je songe, après dix épisodes plus ou moins similaires, même si cocasses : « C'est bon. On a compris ». Et c'est strictement la même chose pour Baudolino, à la différence importante que c'est nettement moins bon que chez Flaubert.
C'est à Bizance et à la fin de sa vie que notre personnage raconte son histoire. Baudolino est un grand affabulateur, on le comprend très vite. Orfèvre sans doute, spécialiste du mensonge de haut vol autant que du vil et du grossier. Gamin campagnard dans un contexte d'Italie du douzième siècle, il croise la route de l'empereur Barberousse. Ce dernier le considérera comme son fils et le gamin menteur deviendra, par la même occasion, une sorte de surprenant rouage de l'Histoire.
C'est environ un roman historique. Baudolino, au surplus de mentir et d'influer le cours de l'histoire, est à peu près omniprésent. Il fût présent au couronnement de son père adoptif autant qu'au pillage de Constantinople, mais également à la bataille de Legnano, et aussi à Paris. Et voici qu'il serait même plus ou moins à l'origine - à lui tout seul- de chaque fait historique d'importance. Ses mensonges prennent vie et deviennent à peu près réalité : le graal, Alexandrie, Etc. Tout viendra d'abord de son invention, et puis, persuasif, il parvient à donner vie et sens à ce qui sort de son imaginaire. Improbable, drôle, rocambolesque… ça l'est fort au début.
Passés ses événements historiques d'importance, Baudolino passe au récit de son grand voyage à la recherche du Prête Jean et du Graal. le roman historique devient rapidement une sorte de conte, un recueil de légendes, et s'apparente également à un roman d'aventure, un peu à la façon des chevaliers de la table ronde, la bouffonnerie en plus.
Environ inclassable, donc, ce Baudolino. Et je demande bien pardon d'avance aux nombreux admirateurs d'Eco : ce me fût assez indigeste, comme manger le même plat plusieurs jours d'affilée. Après avoir lu un quart du roman à peine, on comprend et devine que la suite ne sera que répétition du même schéma narratif, des mêmes façons d'annoncer un nouveau mensonge éhonté qui prendra vie et réalité. Bien sûr, il y a un peu de drôlerie, une sorte d'extravagance qui divertit et rafraîchit au début, mais je me suis demandé à quel moment serait pris le virage, le passage à autre chose. Jamais. Plusieurs centaines de pages ainsi, sur le même ton et pour passer en revue le même procédé et le même tempérament… seuls les événements historiques changent (encore heureux !).
Les dernières pages, toutefois, sont plus plaisantes. Seulement, on aurait pu y parvenir en deux fois moins de longueurs et d'impatiences. Néanmoins Baudolino est tout de même un personnage plaisant. Ah, que ces mensonges éhontés et effronteries sont tout de même réjouissantes ! J'aime son tempérament, en somme : une sorte d'ardeur, un entrain, une insolence et une propension au mensonge tout à fait assumés. Il faut se méfier de lui comme d'un petit animal inoffensif en apparence et qui mord par ruse. Et puis on se laisse aller à croire presque à ses mensonges. C'est un conteur, voilà. On entreprend le récit avec défiance et puis il nous y conduit tout de même, et parfois avec plaisir. Peut-on le cerner cependant, ou décider de manière péremptoire qu'il est inconséquent ? Difficile à dire. Il fait partie de ces gens extravagants à qui l'on pardonne un mauvais penchant, non seulement parce qu'ils l'assument mais au surplus avec aplomb et audace.
Ce roman m'a aussi fait penser à Rabelais, mais moins distrayant, plus pénible, plus ennuyant.
Je vais m'en tenir là pour Eco je crois. du moins pour un moment. Si la lecture distrait un temps, elle m'a vite ennuyée. On m'a dit que ce n'était pas le meilleur roman de l'auteur, que d'autres en valaient la peine, et je le crois volontiers. Cependant, pourquoi écrire Baudolino si l'on est capable de beaucoup mieux ? Même le style est assez lourd, brouillon, sans fulgurances. C'est long, trop long.
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