AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations sur La consolation des grands espaces (16)

Parce que ces hommes travaillent avec des animaux, pas des machines ni des numéros, parce qu’ils vivent en plein air dans des paysages d’une beauté torrentielle, parce qu’ils sont assignés à un lieu et un quotidien embellis par d’impressionnants impondérables, parce que des veaux naissent et meurent dans leurs mains, parce qu’ils vont dans la montagne comme des pèlerins pour connaître le secret des wapitis, leur force est aussi de la douceur, leur dureté, une rare délicatesse.
Commenter  J’apprécie          30
Tout arrive soudainement dans le Wyoming, la ronde des saisons, les changements de temps ; pour les gens, les brutales fluctuations de la solitude. Mais la bonne humeur va de pair avec cette austérité. La bienveillance est de tradition. Des inconnus se croisant sur la route se salueront de la main. Il est courant de voir deux pick-up stationnés côte à côte sur une piste de terre serpentant dans les broussailles. Les chauffeurs partagent une cigarette, dévissent leur thermos, se passent une timbale de café bouillant par les vitres abaissées. Ces rencontres sont l’occasion d’échanger des renseignements concernant plusieurs générations, car dans le Wyoming la vie privée de chacun est largement de notoriété publique.
Commenter  J’apprécie          10
L'automne nous enseigne que tout accomplissement est aussi une mort; que la maturité est une forme de déliquescence. Les saules, à force de rester près de l'eau, commencent à rouiller. Les feuilles sont des verbes qui conjuguent les saisons.
Aujourd'hui, le ciel est une hostie. Placée sur ma langue, c'est une plénitude qui s'est déjà désintégrée. Dessous, elle fait battre mon coeur si fort que tout mon être se tend vers les splendeurs de l'hiver. A présent, je sais la fragilité à laquelle cette saison aspire. Sa vulnérabilité ne peut plus être corrompue. La mort est sa pureté, sa douce boue. La ribambelle d'orages qui défilent à travers le Wyoming, tels des éléphants se tenant par la trompe, faiblit et pleure jusqu'au silence.
Plus de soleil, plus de vent, ni de chutes de neige. Les chasseurs sont partis; les oies des neiges se dandinent dans les champs. Déjà, les wapitis sortent des montagnes pour gagner les refuges où ils seront nourris. Leurs grands bois tomberont bientôt comme on décroche les lustres d'une salle de bal. Sans eux, la lumière de ces jours d'automne, baignés de ce que Tennyson appelle "une parodie de soleil", aura totalement disparu.
Commenter  J’apprécie          30
Tout l'automne, nous attendons une double voix: l'une dit que tout est mûr, l'autre que tout se meurt. Paradoxe subtil. Nous éprouvons ce que les Japonais nomment "éveil" -- un mot presque intraduisible signifiant à peu près "une beauté teintée de tristesse". Certains jours, il nous faut résister à une mélancolie qui rôde. Des rêves obsèdent comme des hallucinations: dans l'un, un mourant regarde, depuis l'intérieur d'un gros cocon, de jeunes étalons galopant dans une boue épaisse; leurs bourses éclatent et leur semence se répand sur le sol noir. Mes lectures me ramènent à cette pensée du dément moine zen Ikkyu: "Souviens-toi que sous la peau que tu caresses, le squelette est là, qui attend son heure." Mais un autre jour, je m'en vais à cheval dans la montagne. Sur fond de rocher, les trembles tendent leur gracieux cou de girafe et un autre bosquet, pas encore jauni, diffuse une clarté virginale qui transperce toute pesanteur.
Commenter  J’apprécie          10
Nous avons tendance à le nier, et pourtant malgré toute notre richesse, nous ne nous reconnaissons plus dans nos biens matériels. Il suffit de regarder nos maisons pour constater que nous construisons "contre" l'espace, de même que nous buvons "contre" la souffrance et la solitude. Nous "remplissons" l'espace comme si c'était une coquille vide, avec des choses dont l'opacité nous empêche de voir ce qui est déjà là.
Commenter  J’apprécie          100
J’ai passé des heures dans un pick-up qui montait à un campement, à l’aube, sans qu’aucune parole ne soit échangée ; j’ai connu des repas où les seuls mots prononcées étaient : « Merci, m’dame » marmonnés à la fin du dîner. Le silence est profond. Plutôt que des paroles, c’était un regard que l’on partage. Observé avec intensité, le monde se transforme. Le paysage fourmille de détails, et sur le fond de ce décor, le moindre geste se détache avec une précision presque douloureuse. L’atmosphère entre les gens est tendue. Les jours se déroulent, baignés de leur propre musique. Les nuits deviennent hallucinations, les rêves des prémonitions.
Commenter  J’apprécie          90
"Pour vivre bien ici, il faut savoir se débrouiller tant au plan affectif que matériel. Traditionnellement au moins, la vie d'un éleveur n'a rien à voir avec le matérialisme : elle représente les petits exploits dont l'homme, uni à l'animal, est capable, ainsi que les plaisirs simples -comme écouter la radio la nuit ou reconnaître les constellations. La dureté que j'apprenais n'était pas l'opiniâtreté du martyr, un héroïsme stupide, mais l'art d'endurer. Je me disais : pour être dur, il faut être fragile. La douceur est la vraie pugnacité".
Commenter  J’apprécie          30
Pour être dur, il faut être fragile. La douceur est la vraie pugnacité.
Commenter  J’apprécie          50
Il n'y a rien de plus fragile qu'une femme, si ce n'est un homme.
Commenter  J’apprécie          00
La vraie consolation, c'est qu'il n'y a nulle part de consolation. Nulle part, c'est-à-dire partout.
Commenter  J’apprécie          30






    Lecteurs (229) Voir plus



    Quiz Voir plus

    Nature writing

    Quel philosophe est considéré comme le fondateur du Nature writing?

    Ralph Waldo Emerson
    Henry David Thoreau
    Benjamin Franklin

    10 questions
    100 lecteurs ont répondu
    Thèmes : nature writing , écologie , littératureCréer un quiz sur ce livre

    {* *}