Citations sur Axion Esti (suivi de) L'arbre lucide et la quatorzième .. (25)
COMME LANGUE on m'a donné le parler grec;
comme maison un pauvre abri sur les syrtes d'Homère.
Mon unique souci cette langue bâtie sur les syrtes d'Homère.
Là-bas sont sargues et perches
verbes qui vibrent sous le vent
soulevant leurs verdeurs à travers l'azur
tant que j'ai vu dans mes entrailles s'allumer
éponges et méduses
avec les premiers hymnes des Sirènes
coquilles d'or rose avec leurs premières fièvres noires.
Mon unique souci cette langue avec ses premières
fièvres noires.
Là-bas sont, dieux basanés,
cognassiers grenadiers, cognats et gens associés
versant l'huile translucide au fond des gigantesques jarres
et souffles divins qui montent des ravins fleurant bon
la lentisque et l'osier
les gingembres et les genêts
avec les premiers pépiements des pinsons
MES MAINS SOUILLÉES d'iniquités, comment les ouvrirais-je?
Mes regards hallucinés par la chiourme, où les porterais-je?
Ah fils des hommes, qu'ajouter?
La terre endure bien des horreurs mais l'âme endure cent fois pire!
Oh bravo ma prime jeunesse et à toi lèvre indomptable
qui du galet appris l'art de la tempête
et face aux rafales, la riposte du tonnerre
oh bravo ma prime jeunesse!
Tu m'as enraciné si fort dans le sol, que ma pensée a reverdi!
Mis tant de clarté dans le sang, que mon amour a même pris
le pouvoir et la signifiance du ciel.
Je suis à présent pur de bout en bout
tout ensemble objet inutile aux mains de la Mort
et proie décevante, entre les griffes du rustre.
Ah fils des hommes, qu'ai-je à redouter ?
Mes entrailles-prenez-les-moi,;j'ai chanté!
LOUÉE SOIT sur le belvédère de pierre
dominant la mer Myrthô droite dans la lumière
comme un splendide huit ou comme une amphore
avec dans une main le paillis de l'aurore
ET CELUI que j'étais véritablement Le pur devancier des siècles
Le brin toujours vert dans le nimbe ardent Point façonné de main d'homme
avec son index a tracé
dans la distance
ces lignes
qui grimpent de temps en temps vers l'altitude à angle vif
et d'autres fois en bosses plus moelleuses s'avachissent
les unes dans les autres
amples continents dont j'ai senti
que leur odeur de terre était celle de l'esprit
C'était si fort la vérité
que docile à suivre mon parcours
le sol
accumulait aux plis secrets plus de rougeur
et ailleurs tout un fin duvet d'aiguilles de pin
JEUDI, 7 M
A FORCE DE ME VOIR ne rien méditer ni ne m'émouvoir de rien, le temps s'est payé d'audace et m'a rendu la liberté au beau milieu des mers crétoises.
J'ai atteint les mille ans et déjà j'utilise l'écriture minoenne avec une telle aisance que le monde en est surpris et crie au miracle.
Le coup de chance c'est qu'il ne vient pas à bout de me lire.
ET DU FAIT QUE LES HEURES tournaient tout
comme les journées selon les larges feuilles violacées au cadran du jardin
Moi j'en étais le style
Mardi Mercredi Jeudi
Juin Juillet Août
J'affichais la nécessité qu'il m'arrive eau saline
en plein visage Insectes velus des filles
Lointains éclats des fulgurations d'Iris
Cadeau poème d'argent
"Je sais bien que tout cela n'est rien et que la langue que je parle n'a pas d'alphabet
Vu que le soleil et les vagues sont un genre d'écriture syllabique que l'on ne sait déchiffrer qu'aux époques de chagrin et d'exil."
(p. 221)
Louée soit cette larme, astre immotivé
dont l'aurore avec lenteur s'exprime en de beaux yeux d'enfants qui se tiennent la main dans la main
d'enfants qui se regardent et ne se disent rien.
Au coeur d'une innocente et lointaine contrée à présent je m'enfonce.
A présent m'escortent d'aériennes créatures
aux cheveux irisés d'aurores boréales
à la peau satinée de doux lacs dorés.
(p. 146)
Les fleurs douces pensionnaires de la nostalgie
les fleurs frêles héritières de l'ondée, qui tremblent
les petites à quatre pattes dans le sentier
les grandes mêlées aux soleils ou bercées de songes
(p.159)