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Critique de GeraldineB


Lumineuse et profonde comme le bleu du ciel de Provence, délicate comme le vert des amandiers, la poésie d'Ile Eniger se nourrit de nature.
Par son écriture pure et dénuée de tout lyrisme, la poétesse semble s'être affranchie des contraintes du beau, préférant creuser l'essentiel, la naissance de l'émotion. Penchée avec tendresse et respect sur l'infiniment petit, elle nous invite à agrandir notre regard, faisant d'un simple cailloux un élément primordial du paysage. Elle nous invite aussi à accepter le temps qui passe, la vie qui prend quand chaque jour nous donne.

Dans "Les mains frêles", recueil de la maturité, Ile Eniger apprivoise sa solitude. L'homme aimé, le complice, le compagnon, n'est plus là et son absence est comme une fenêtre ouverte qui laisse entrer le froid. Celui-là qui manque n'est pas mort mais sa mémoire, en s'effaçant, en a effacé les contours. Par des mots simples, bouleversants, Ile Eniger le ramène chez lui, dans son atelier, dans son jardin, au creux de ce qui fut leur bonheur.

"Je t'écris au présent malgré ton enveloppe vide, tes mots perdus, ta mémoire absente. Je t'écris dans chacun de mes actes, sur la pierre d'angle de nos noms qui signent le parcours. Si le printemps plus jamais ne sera le printemps, ta main invisible plante toujours nos lilas, taille toujours nos rosiers."

Berçant ses chagrins d'une infinie douceur, elle ravive ses souvenirs de femme mais aussi ceux de son enfance, évoquant ses chers disparus, sa mère, son père, son grand-père, s'entourant de leur bienveillante présence. Parce que l'hiver de la vie est venu, il est bon de se réchauffer à leur mémoire, à ces gestes hérités que l'on fait sans y penser et qui nous inscrivent dans une histoire.

Cette poésie généreuse, qui jaillit du plus intime, m'a profondément touchée. C'est un regard vers le passé mais un regard sans regrets. La force qui sourd de cette poésie est faite de gratitude, d'espoir en la vie. A lire ces poèmes, on apprend que, par delà la douleur, on peut encore sourire aux nouveaux matins, que cela est possible. Et c'est comme si la fenêtre se refermait sur le grand froid, ne laissant entrer qu'un rayon de soleil vivifiant.

"Tu marches sur la dernière partie du chemin. Tu vas en toute solitude. En toute gratitude. Huile vieille pour lampe pauvre, tu brûles encore. Des grains de soleil lèchent une assiette vide et un verre ébréché. Ta fenêtre s'ouvre sur la patience du sillon. D'anciennes belles souvenances et d'intenses moments d'allégresse t'accompagnent. Il n'y aura rien d'autre que ces traces de lumière. Une abondance."

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