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Critique de syannelle


Voici le premier livre de Louise Erdrich que je lis, après avoir consulté les divers critiques de cette auteure sur Babélio, et je ne suis pas déçue. Je suis sortie de cette lecture assez remuée, car le thème et le propos sont durs à traiter. Erdrich évoque les difficultés d'un couple à la dérive qui n'arrive plus à vivre harmonieusement au quotidien et qui se déchire sans cesse. Problème d'autant plus grave que l'un des deux protagonistes, Gil, ne veut pas quitter sa femme et s'accroche à elle de façon morbide, ne supportant pas la perspective d'une séparation.
Gil et Irène son mariés depuis de nombreuses années. Gil est un peintre reconnu, qui s'est fait remarquer notamment en peignant Irène, nommant ses oeuvres America 1, America 2 etc.., du nom de celle-ci. Irène est une Native American, une Amerindienne, et Gil aussi. Leurs trois enfants, Florian, Riel et Stoney réagissent différemment à leur appartenance Amérindienne, Riel est la plus passionnée et fière.
Ce couple ne fonctionne plus. Irène reproche à Gil de l'avoir dépossédée de son âme en la représentant comme un objet de consommation sous des angles si intimes. Et pourtant, si Gil l'a fait, c'est parce que sa femme est pour lui une déesse qu'il place au-dessus de tout.
Irène découvre un jour, au hasard d'une discussion, que son mari lit régulièrement son journal intime, elle décide donc de la piéger à son propre jeu. Elle utilisera deux cahiers, le premier, son vrai journal, où elle décrit ce qu'elle ressent en toute sincérité, et le second, le cahier rouge, où elle écrit une histoire qui n'est qu'un fantasme de la sienne, pour tromper son mari et le faire souffrir.
Ce jeu pervers m'a profondément interloqué. Je me suis demandée comment Irène pouvait trouver autant d'énergie à vouloir manipuler et faire du mal à son mari, comment une telle idée pouvait être réaliste et possible dans la vraie vie.

Louise Erdrich
Contrairement à d'autres points de vue dans d'autres blogs, je pense qu'une telle manipulation est loin d'être hors de propos ou surréaliste, mais totalement possible dans la tête d'une femme qui cherche à se réapproprier une place dans son couple, qui cherche une place où exister et agir. Car Irène se sent dépossédée d'elle-même depuis toujours par ce mari glouton et possessif. Leur couple est très fusionnel, voire trop fusionnel. Elle cherche à se détacher de lui,d'une façon très perverse. J'ai du mal à comprendre cette perversité, le temps et l'énergie qu'elle consume.
Le texte est donc à trois voix, la voix omnisciente d'un narrateur, celle du cahier rouge et du cahier bleu.

La description des sentiments éprouvés par les uns et les autres est très pointue, et devient souvent touchante voire désarmante tant on se sent proche de ce que l'on lit. Je n'ai jamais vécu une telle tension, mais les disputes arrivent, et le texte entre en résonance avec soi lorsque l'on se remémore les moments difficiles de son couple.
Les enfants adoptent eux aussi des stratégies diverses pour se protéger du naufrage. Riel s'invente des histoires où elle sauve sa famille, Florian commence à boire et fumer du shit pour s'oublier ou ressembler à sa mère dont il se sent proche, et qui boit trop, Stoney prend ses peluches et s'en fait une barrière de doudous. La tension qu'ils supportent est presque constante.

J'ai beaucoup aimé la précision avec laquelle Erdrich évoque la lente agonie de ce couple, j'ai aussi aimé le fait que ce livre traite des coutumes et de l'histoire des Amérindiens. On apprend aussi beaucoup sur l'art, Gil étant peintre, les références à d'autres artistes peintres sont fréquentes.

Une bonne lecture.
Lien : http://syannelle.blogspot.fr..
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