Citations sur Le Livre des martyrs, tome 5 : Les Marées de minuit (20)
- Nous n'avons pas d'herbes à infuser, maître. J'ai dû improviser.
- Avec quoi ? De la peau de mouton ?
- Presque. Il me restait quelques chutes de laine.
- La jaune ou la grise ?
- La grise.
- Ah. Dans ce cas tout va bien.
Il but une petite gorgée.
- Très bonne.
- Oui, je pensais bien que ça pourrait convenir.
- Nous ne risquons pas de nous empoisonner j'espère ?
- Pas outre mesure, maître.
- Il y a des jours, intervint Shurq Elalle, où je regrette d'être morte. Mais pas aujourd'hui.
Les deux hommes la dévisagèrent d'un air spéculatif tout en sirotant leur infusion.
- Idéalement, poursuivit-elle, je devrais m'éclaircir la gorge pour évacuer cet instant de gêne. Mais je suis incapable de me sentir davantage gênée que dans mon état normal. Deuxièmement, il serait fâcheux que je me racle la gorge, vu les fluides qui risqueraient d'en sortir.
Tehol Beddict, Bugg et Shurq Elalle.
- Ma foi, les sols ne saffaissent plus et demeurent parfaitement secs. Le plâtre nouvellement posé ne se fissure pas. Les propriétaires sont ravis.
- Je croyais que c'était moi le propriétaire de ces entrepôts.
- Et vous n'êtes pas ravi?
- Ma foi, si, tu as raison. Chacun de mes moi.
Tehol et Bugg
- Ce ne sont pas vos souvenirs qui vous font souffrir, Acquitteuse. C'est la manière dont vous les appréhendez. C'est le vous de maintenant qui guerroie contre le vous d'avant. J'aurais du mal à vous fournir une meilleure explication...
Corlo
- Imaginez que vous soyez assise dans un chariot à roues carrées et que vous vous félicitiez du confort de votre voyage. Voilà ce que sont les Antres, Acquitteuse. Ils ont été créés dans un monde qui a depuis longtemps disparu, un monde dans lequel les forces étaient plus rudes, plus sauvages, moins ordonnées. Les garennes, eh bien, elles disposent de roues sans coins.
Corlo
Sur une plage de galets, un homme regardant à ses pieds verra un caillou, puis un autre et encore un autre. Une femme regardant à ses pieds verra... des cailloux. Mais peut-être ce constat s'avère-t-il encore trop simpliste. L'homme est singulier tandis que la femme est plurielle. Probablement sommes-nous tous un peu de chaque, une partie de l'un se trouvant incluse dans l'autre.
Même si nous n'aimons pas l'admettre.
Seren Pedac
Quand bien même l'argent n'est qu'une idée, il recèle un certain pouvoir. Sauf qu'il ne s'agit pas d'un vrai pouvoir. Seulement d'une promesse. Mais cette promesse suffit tant que chacun l'estime réelle. Qu'on cesse de le prétendre et elle s'effondrera comme un château de cartes.
Tehol Beddict
- Quoi ? Mais où sont nos armes ?
- Nous n'avons pas d'armes, maître.
- Aucune ? Et nous n'en avons jamais eu ?
- Non. Mis à part quelques cuillères en bois ...
- Et tu sais les manier ?
- À la perfection.
- Dans ce cas, tout va bien.
Pour ce que ça vaut, Plume Sorcière, la liberté n'a rien d'une bénédiction. Chaque voie est jalonnée de pièges, d'embûches destinées à t'entraîner dans des jeux dont les forces se placent au delà de ton entendement. Des forces qui préfèrent probablement les esclaves lorsqu'elles décident de se servir de mortels, vu que les esclaves comprennent intrinsèquement la nature de la relation qui leur est imposée.
Udinaas, à Plume Sorcière.
La mort est semblable à l'ombre de chaque mortel, sa véritable ombre, et le temps représente son serviteur, lui qui fait lentement tourner cette ombre sur elle-même jusqu'à ce que ce qui s'étend derrière chaque personne finisse par s'étirer devant elle.
Le langage était une guerre, plus vaste que n’importe quelle armée d’épées, de lances et de sortilèges. Le soi livrant bataille à tout le reste. Promulguant, défendant ses propres frontières. Saillies et brèches, champs de cadavres pourrissant comme des fruits tombes à terre. Des mots toujours en quête d’alliés, d’une iconique vraisemblance dans la cohue.