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Le Livre des Martyrs tome 3 sur 10
EAN : 9782253242338
1440 pages
Le Livre de Poche (11/01/2023)
4.39/5   161 notes
Résumé :
Le continent ravagé de Genabackis a donné naissance à un nouvel empire terrifiant : le Domin de Pannion.
Telle une marée de sang corrompu, il dévore ceux qui refusent de se soumettre à la sainte parole de son tyran fanatique.
Pour l’affronter, l’Ost de Dujek Unbras et les Brûleurs de Ponts de Mésangeai et de Ganoes Paran devront forger une alliance avec leurs vieux ennemis : les forces du seigneur de guerre Caladan Rumin, les Tistes Andii d'Anomand... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (24) Voir plus Ajouter une critique
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La première chose qui frappe une fois la lecture de ce tome achevée, c'est son incroyable densité ! J'ai, en fait, presque l'impression d'avoir lu plusieurs livres, le nombre de thèmes, d'arcs narratifs (et leur ampleur) étant assez ahurissant.

Dès le prologue, on comprend qu'avec ce volume, Erikson semble vouloir lever une partie du voile reposant sur les zones d'ombres de son cycle, mais aussi sur son envergure démesurée. Les premiers chapitres des Jardins de la Lune couvraient une période de 10 ans. Ici, c'est 300 000 ans !

Cette envergure pourrait effrayer, pourtant, bien au contraire, tout le début des Souvenirs de la Glace va en partie se concentrer sur le fait d'expliciter les enjeux du récit global et de son univers (les garennes, l'ascendance, les maisons Azath, cela principalement via Paran et Renarde Argentée). À mon sens, c'est en réalité le tome le plus limpide depuis le début du cycle, et qui clarifie même bien des points obscurs des 2 livres précédents.

D'ailleurs, un léger bémol à ce niveau (qui ne concerne fort heureusement que de rares cas) : le parti pris d'Erikson (de plonger le lecteur dans des scènes parfois uniquement compréhensibles rétrospectivement) montre parfois ses limites dans certaines de ces révélations, ou plutôt leurs mises en scène.
En effet, certaines des révélations (du fait de leur complexité) se limitent parfois à un simple dialogue d'exposition « pourquoi, comment » entre 2 personnages.
J'ai tendance à préférer quand ce type de révélation est directement imbriqué dans récit, de manière organique, dans l'action. Ou alors quand Erikson parvient à nous faire reconstituer le puzzle par nous-même, sans qu'un dialogue explicite clairement quoi que ce soit. C'est heureusement le cas, la plupart du temps.

C'est ensuite un réel plaisir de retrouver les Brûleurs de Ponts et leurs antagonistes du premier tome, désormais alliés. Je suis en général bon client des histoires d'ennemis qui se retrouvent forcés à faire alliance, du fait des circonstances, et celle-ci est particulièrement bien menée.
Cette rencontre forcée entre les deux camps va donner lieu à une succession de scènes mémorables (que ce soit par leur tension, la justesse des relations et interactions, voir l'humour de certaines situations), le tout admirablement bien servi par le casting quatre étoile mis en place par Erikson (réunir sous une tente des personnages tels qu'Anomander Rake, Mésangeais, Dujek, Caladan Rumin, Ben le Vif, Kallor, Kruppe, Renarde argentée, et bien d'autres, crée nécessairement un cocktail détonnant).

Surtout, cela va permettre à Erikson de déployer une histoire aux multiples arcs et thèmes, qui m'ont pour le plupart pris aux tripes à un moment ou un autre.

Car, les Souvenirs de la Glace, a été, me concernant, un tourbillon d'émotion.

C'est toujours aussi décomplexé, donc on passe du rire à l'horreur pure, de la poésie et des considérations historico-philosophique (le passé et le point de vue d'archéologue de l'auteur sont, selon moi, une des grandes forces de la saga) aux scènes grivoises ou directement sorties de la fantasy bad ass la plus régressive et jouissive.

Et encore une fois, la densité et la richesse de livre sont saisissantes !

Il n'y a quasiment aucun manichéisme dans cette histoire (à l'exception de quelques crevures ou fanatiques que l'on va adorer détester). Que ce soit du côtés des « bons » ou de leurs opposants, Erikson construit constamment des personnages complexes. Les plus admirables ne sont pas exempt de défauts, de parts d'ombres, ou d'actes discutables (voir pire). Leurs antagonistes ont des mobiles qui demeurent généralement compréhensibles, une histoire nous permettant de saisir leur personnalité et actions, ou bénéficient au moins d'une scène qui nuance notre jugement.

D'ailleurs, maintenant que la menace de la saga est enfin révélée, je dois dire que je la trouve vraiment brillante. Ce n'est, ni plus ni moins, que la brutalité, le chaos et l'horreur de l'existence que nos héros doivent affronter.
À ce niveau, les Tenescowris (l'armée de paysans fanatiques et affamés du Pannion) en est sans doute l‘image la plus sidérante, offrant au livre ses moment les plus cauchemardesques et horriblement stupéfiants (comment stopper une armée issue de la misère et de la famine).

J'adore les idées développées au sujet des dieux et de l'ascendance : où les croyances sont plus ou moins les mêmes depuis l'aube des temps, évoluant quelque peu ou ressurgissant au gré des êtres (souvent des mortels devenant des mythes) qui prennent possession de leurs trônes et deviennent des dieux (encore une fois, je pense que le point de vue de l'archéologue n'est pas étranger à la richesse de cette symbolique).

Le livre paraît vouloir dresser le portrait sans concession de ce qu'il y a de pire, mais aussi de meilleur dans l'existence humaine (même s'il faut avouer que le premier aspect surnage quelque peu par rapport au second). Opposés aux horreurs du Pannion, nous avons droit à de superbe récit d'amitié et d'humanité, à de magnifiques histoires d'amours et à des actes d'une incroyable noblesse.

Erikson excelle une nouvelle fois à conférer un souffle épique à ses scènes d'action. La siège de Capustan me restera longtemps en mémoire. J'ai rarement lu une bataille arrivant à ce point à me faire ressentir le sentiment d'horreur absolu, d'apocalypse, de chaos de fureur et de sang d'un champ de bataille. Où même les actes de courage sont empreints de barbarie.
Cela m'amène d'ailleurs à deux grosses réussites du roman : Grognard (un personnage d'emblée mythique à mes yeux, qui personnifie toute l'ambivalence de la guerre ) et les épées grises. Je ne pensais qu'Erikson arriverait à m'intéresser autant à ce groupe de mercenaires. La palme revenant sans hésitation à Itkovian, dont le portrait et le récit sont à mes yeux incroyablement beaux et touchants (l'une des histoires les plus fortes de ce tome).

La bataille de Capustan aurait d'ailleurs pu être le final du roman (on est à bout de souffle lorsqu'elle s'achève) et pourtant Erikson choisit de continuer, amenant son histoire dans des directions étonnantes. Certains pourront y voir un ventre mou, pour moi, cette partie et ce qui s'y passe prend tout son sens rétrospectivement, une fois que l'on a pris en pleine gueule l'uppercut des 100 dernières pages !

Car le final est dantesque, mais aussi et surtout dantesque émotionnellement !

Et avec tout ça, je n'ai même pas réussi à évoquer la mémorable apparition des terribles K'Chain Che Malle, Dame Envie et ses incroyables Segulehs, le récit de la naissance de Brûleurs de Ponts, les T'lan Imass qui passent de la typique armée de morts vivants à un peuple dont l'histoire est terriblement tragique, de la mhybe (cette mère qui doit accepter de se laisser dévorer par son enfant, et qui trouve un parallèle, une opposition thématique étonnante avec l'histoire de la matriarche K'Chain Che Male, mère à l'amour abusif et destructeur (physiquement et psychologiquement)), le dilemme de Caladan Rumin, le portrait des Tiste Andii et de Rake qui gagne en profondeur (êtres à la recherche d'idéaux illusoires afin de supporter leur existence sans fin), des dieux barghast ou de l'incroyable combat de Gogues pour être accepté par les clans, et j'en passe. Un livre énorme à tous les niveaux !

Pour le moment le livre ne me sort pas de la tête. Certains personnages sont entrés dans mon panthéons personnel des personnages cultes de la pop culture, même chose pour nombre de scènes marquantes.

Et cet épilogue désenchanté et mélancolique…

Brûleurs de Ponts, premiers entrés, derniers sortis ! Et dire que ce n'est que le troisième livre du cycle !
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Voilà le monstre épique de Steven Erikson, un récit long, dense et d'une extrême richesse. Une lecture intense et mémorable.

Nous sommes de retour sur le continent de Genabackis et l'action se déroule en parallèle de celle du deuxième tome. Les personnages du premier livre reviennent, et bien des nouveaux font leur apparition. Un vrai défilé de héros, de dieux, d'aspirants dieux et de bien d'autres créatures qui vont, chacun, évoluer de la plus intéressante des manières sous la plume de Steven Erikson.
Une plume que j'ai trouvée fantastique, grâce aussi à un très bon boulot de la traduction. L'auteur va arriver à distiller un humour qui fonctionne à côté de moments épiques, de réflexions philosophiques, de sublimes passages spirituels ou encore de l'horreur la plus terrible.

Nous retrouvons les boss des Brûleurs de Ponts, Dujek Unbras et Mésangeai. Ils vont s'allier à Anomander Rake et Caladan Rumin, ainsi qu'a d'autres peuples : Barghasts, Rhivis, Irréguliers de Mott... pour contrer une menace commune. Une menace qui a pour nom le Domin de Pannion, une armée de fanatiques mystérieuse et terrible, puisqu'elle compte dans ses rangs les paysans asservis et affamés qui sont transformés en cannibales.
Un autre ennemi s'immisce peu à peu dans ce conflit par l'intermédiaire des garennes. Un poison que rien n'arrête, une force très ancienne.

Dans ce récit, passé et présent se rejoignent, mais personne n'est capable de prédire l'avenir. Les anciens peuples ressurgissent, les dieux oubliés se cachent. Certaines divinités tombent en disgrâce, d'autres émergent et c'est grâce à une fantastique mythologie que l'auteur déroule un récit d'une profondeur et d'une complexité qui font de ce livre un chef d'oeuvre !
Les implications sont nombreuses, à travers ce roman, mais aussi par rapport aux précédents, ce qui accentue le sentiment de monstre épique que l'on est en train de dévorer...

Impossible de résumer la chose en quelques lignes, je peux citer les facéties de Piocheuse et Mêle, les Brûleuses de Ponts, ainsi que les parties de jambes en l'air de Hetan (pauvres hommes...) pour les nombreux sourires que j'en ai tirés. Je peux également parler des capacités hors normes de Ben le Vif, qui se révèle enfin dans ce tome. Ou encore le tragique destin des T'lan Imass, histoire monumentale aux nombreux événements qui semble ne jamais prendre fin.
Mais ce sont surtout les aventures d'Itkovian et de la Mhybe qui m'ont le plus marquées.
La compassion sans faille du Bouclier-Enclume est bouleversante, tellement bien racontée et profondément spirituelle. le destin de la Mhybe est terrifiant, et trouve une conclusion elle aussi très profonde qui montre qu'Erikson a énormément travaillé son histoire pour en arriver à un tel résultat d'interactions entre ses personnages.

Une chose, une seule m'a déplu :

Les autres personnages sont fantastiques, ils ont tous un énorme intérêt, à l'instar des Seguleh, dont j'espère en savoir plus dans les prochains tomes.
Le traitement de Grognard est superbe, sa transformation singulière et sa psychologie en font un personnage attachant. Et que dire de Kruppe ? Rien qu'à le mentionner j'ai envie de me marrer, mais aussi de l'admirer et surtout de me poser pleins de questions...

Beaucoup de choses nous sont ici révélées et c'est parfois difficile de faire tous les rapprochements. Mais le plaisir est bien là, un plaisir qui prend différentes formes.
Si les garennes, les anciens peuples et le rôle de Paran sont plus développés dans ce tome, de nombreuses choses restent encore à découvrir à leur sujet. Steven Erikson a encore beaucoup à raconter...
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Dans ce troisième tome, Steven Erikson augmente encore la qualité de son oeuvre et vient peaufiner et enrichir les deux premiers.
On replonge dans une lecture incroyablement épique, avec des personnages d'une envergure et d'un charisme formidable, des événements marquants, à vous faire dresser les cheveux ou venir les larmes aux yeux, certains d'entre eux resteront à jamais gravés dans ma mémoire .
La profusion de personnages, bénéficiant d'une personnification de qualité les rendant pour le moins intéressants, attachants ou haïssables, les pouvoirs incroyables de certains d'entre eux, pourrait faire peur si tout cela n'était pas traité avec finesse et sans manichéisme. Même les plus puissant d'entre eux ont leurs faiblesses, leur part d'ombre. Cette qualité dans la caractérisation est une des grosses forces de ce cycle.
L'autre grosse force est bien entendu l'histoire en elle même toujours contée sans nous prémâcher le travail, il faut toujours recoller les morceaux dans l'ordre et dans ce tome ci, repositionner des morceaux dans les trous des tomes précédents. Bien sûr il reste en fin de lecture des zones d'ombres que viendront combler et polir les futurs récits.
Avec les tomes 2 et 3 de son cycle, Erikson a réussi à me faire ressentir des choses physiquement, lecture en apnée, rire, quasi larmes, mélancolie douce-amère que j'ai rarement ressenti dans mes lectures fantasy à ce point.
Je ne rentre pas dans les détails pour ne rien spoiler d'une part et d'autre part il y a tellement à dire que ça en deviendrait indigeste. Mais il faut savoir que tout ces destins qui se croisent, ces histoires personnelles ou collectives, forment un tout et s'imbriquent de manière tellement fluide que s'en est bluffant.
Un immense coup de coeur pour moi et l'aventure va continuer en octobre !
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La première chose qui frappe en prenant en main Les Souvenirs de la Glace est qu'il s'agit d'un beau bestiau ! 1152 pages en grand format, autant dire que le premier tome et ses quelques 650 pages ont l'air d'un gringalet à côté ! Au moins, on se muscle les bras, même si un bundle avec l'ebook serait sympa pour ceux qui ont une liseuse…

Allez, retour sur le continent de Genebackis où, après la conquête de Pale et surtout Darujhistan, le Haut poing Unbras a été déclaré hors-la-loi par l'Impératrice. Avec ses troupes, dont le charismatique Méseangeai et les Brûleurs de Ponts, il va alors s'allier… à ses ennemis ! Excusez du peu mais il y a là Elric Anomander Rake, ses Tiste Andii et leur cité volante, Kallor l'ancien souverain qui annihila son propre empire, Rumin, un Ascendant possédant un marteau qui peut déclencher des séismes et créer des chaînes montagneuses (si, si…), le capitaine Ganoes Paran avec du sang de Molosse du dieu de la Mort dans les veines, Renarde Argentée qui est la réincarnation de trois magiciens… et Kruppe le petit gros amateur de pâtisseries (et bien plus que cela, comme on le sait déjà) ! Ajoutons-y un capitaine de caravane qui escorte deux nécromanciens et va se révéler possédé par un Dieu, une Tiste Andii qui se transforme en dragon, une demi-déesse fantasque escortée de guerriers surpuissants (dont un squelette ambulant) et d'animaux géants…

On le voit, le nombre de personnages est (très) important (il y a bien un dramatis personae de 4 pages mais il est plus que laconique), mais surtout ils sont tous très bien écrits et leurs interactions sont réussies, dans un camp très hétéroclite. Il faudra bien ça pour arrêter l'Oracle de Pannion, venu du sud et qui déferle avec ses troupes sur la région. Des troupes forcément hors normes avec soldats d'élite, morts-vivants aux bras constitués de lames aiguisées et dizaines de milliers de guerriers cannibales ! Comme je l'ai déjà dit, Erikson pousse le potard à 11 et on se retrouve dans ce tome avec des scènes dantesques, au sens infernal du terme, notamment lorsque la ville de Capustan, défendue par un ordre de mercenaire-paladins, se trouve assiégée par les hordes du mal. Tombereaux de morts, hectolitres d'hémoglobine, scènes éprouvantes à déconseiller aux lecteurs les plus sensibles (qui logiquement n'auront de toutes façons pas fini le premier tome)… Steven Erikson n'y va pas à moitié et déroule la logique de ses protagonistes de façon magistrale, enfin, façon de parler ! Quant à la scène finale dans la cité de Corail, arf, que dire ? (rien, d'ailleurs, car je ne spoilerai pas !)

Et ce n'est que la partie visible de l'iceberg (si j'ose dire vu le titre du bouquin), puisqu'en toile de fond il y a le Dieu Estropié, qui s'en prend à Brûle, l'incarnation de la Terre elle-même, et manipule tout ce petit monde, corrompant les Garennes (les passages ou lieux inter-dimensionnels), rendant la tâche des lanceurs de sorts, magiciens ou prêtres, comme Ben le Vif, bien plus délicate. Ah oui, et on en apprend plus sur le jeu des cartes qui gouverne les Maisons, les Dieux et leurs Ascendants… Stop, j'arrête là tant l'univers est copieux – et complexe.

Par contre, peut-être est-ce parce que j'ai relu le premier tome juste avant, mais j'ai trouvé que malgré la multitude de personnages et d'histoires entremêlées, dont certaines remontent à des centaines de milliers d'années (si, si), ce tome restait lisible et surtout compréhensible. Alors, certes, il faudra parfois faire des retours en arrière, relire des paragraphes ou des bouts de chapitres, mais l'articulation de l'ensemble se fait dans l'esprit du lecteur, toujours sollicité par l'action, les personnages, les lieux… Et le ton employé utilise souvent l'humour, parfois discret dans les dialogues ou situations, parfois franchement cocasse (Kruppe !) sans doute afin d'alléger un peu l'ambiance qui est plus que pesante face aux exactions du Domin de Pannion. Une aventure hautement épique qui transcende la dark fantasy, il est clair que Les Souvenirs de la Glace m'a réconcilié avec Steven Erikson après mon sentiment mitigé quant aux deus ex machina du tome 2. Un volume qu'il faudra d'ailleurs que je relise avant de passer à la suite, La Maison des Chaînes (qui ne fait que 900 pages !).

Côté édition, bravo à Leha pour un gros bouquin qui reste solide, la traduction de Nicolas Merrien est fluide (seuls les « Ouaip » des personnages sont parfois agaçants) et Marc Simonetti continue avec une couverture très réussie, que demander de plus ? le pari est quasiment transformé pour l'éditeur puisque le tome 8 sort bientôt et que les deux autres sont programmés.
Lien : https://bibliosff.wordpress...
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Les souvenirs de la glace est le troisième tome du cycle Du Livre des Martyrs, une saga de fantasy épique et intelligente qui explore un univers riche et complexe. Dans ce volume, nous retrouvons les personnages du premier tome, Les jardins de la lune, sur le continent de Genabackis, où ils doivent affronter une nouvelle menace : le Domin de Pannion, un empire fanatique et sanguinaire dirigé par un tyran mystérieux. Pour faire face à cette invasion, les forces malazéennes de Dujek Unbras et les Brûleurs de Ponts de Mésangeai et de Ganoes Paran doivent s'allier avec leurs anciens ennemis : les Tistes Andii d'Anomander Rake, les Rhivis des plaines et le seigneur de guerre Caladan Rumin. Mais cette alliance fragile cache bien des secrets et des trahisons, et les enjeux dépassent largement le sort d'un continent.

Ce tome est sans doute le plus dense et le plus émouvant de la série jusqu'à présent. L'auteur nous plonge dans une histoire aux multiples facettes, où se mêlent intrigues politiques, guerres sanglantes, magie puissante, créatures fantastiques, dieux capricieux et personnages attachants. le style d'Erikson est toujours aussi maîtrisé et captivant, alternant entre des scènes d'action haletantes, des dialogues savoureux, des descriptions poétiques et des réflexions philosophiques. le rythme ne faiblit pas malgré la longueur du livre (plus de 1400 pages), et le lecteur est constamment surpris par les rebondissements et les révélations qui éclairent progressivement les mystères de cet univers.

Les personnages sont le point fort de ce roman. Ils sont nombreux, variés et profonds, chacun ayant sa personnalité, son histoire, ses motivations et ses failles. On retrouve avec plaisir les héros du premier tome, comme Paran, Mésangeai, Toc l'Ancien ou Rake, mais on découvre aussi de nouveaux protagonistes tout aussi intéressants, comme Gratteroc le Rhivi, Itkovian le Protecteur ou Korlat la Tiste Andii. Les relations entre les personnages sont complexes et nuancées, oscillant entre amitié, rivalité, amour, haine ou respect. Certains passages sont particulièrement touchants ou drôles, comme les échanges entre Mésangeai et Coll ou entre Kruppe et Iskaral Pust. L'auteur n'hésite pas à mettre ses personnages en danger ou à les faire souffrir, ce qui renforce l'émotion et l'implication du lecteur.

Les souvenirs de la glace est donc un roman exceptionnel, qui confirme le talent de Steven Erikson et son ambition de créer une oeuvre majeure dans le genre de la fantasy. C'est un livre qui demande de l'attention et de la patience, mais qui offre en retour une expérience de lecture inoubliable. Je le recommande vivement aux amateurs de fantasy épique et intelligente.
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critiques presse (2)
SciFiUniverse
20 août 2019
L'intrigue alterne avec brio les différentes perspectives, navigue entre l'intime et l'épique et dépeint une menace réellement effrayante. Bravo au passage à la traduction de Nicolas Merrien. Une lecture exigeante mais gratifiante, profitez d’un moment calme pour savourer ce cycle hallucinant !
Lire la critique sur le site : SciFiUniverse
Elbakin.net
25 avril 2019
L’auteur mêle donc toujours avec brio les événements d’un passé maintes fois millénaires au présent où la guerre embrase l’ensemble des continents habités, pour former une fresque riche et vivante d’une incroyable complexité.
Lire la critique sur le site : Elbakin.net
Citations et extraits (43) Voir plus Ajouter une citation
Pour moi, ce passage est le moment où Kallor se conforte dans sa décision :

"L’eau dégoulinait le long des mailles de son surcot complet, de sorte que ses longs cheveux gris, plaqués sur ses épaules aussi maigres que larges, demeuraient au contact des anneaux métalliques jusqu’en bas de son dos. Son casque gris terne reflétait le ciel d’étain qui, sur la surface métallique, paraissait laiteux et indistinct. Il se tenait debout, immobile, tête baissée, au milieu d’un bassin peu encaissé, tandis que son cheval l’attendait à une dizaine de pas en arrière.

Ses yeux éteints observaient sans ciller le sol saturé d’eau de la prairie à travers les fentes de la visière fixe de son grand casque. Il contemplait les flaques boueuses que venait cingler la pluie diluvienne, les petits ruisselets, les rigoles plus larges, le flot incessant qui emplissait de minuscules canaux, engloutissant la pierre exposée, s’insinuant entre les racines noueuses et les touffes d’herbe.

L’eau s’écoulait vers le sud.

Et là, dans le bassin, charriant des limons d’une étrange couleur au gré de ruisseaux empressés, elle dévalait la pente de la colline.
Kallor fit demi-tour et rejoignit son cheval.

Il suivit ses propres traces et, alors que le crépuscule tombait rapidement, il regagna le campement sous les nuages de plomb et la pluie battante. Personne n’avait allumé de feu à l’extérieur des tentes alignées, et la lueur des lanternes se diffusait à peine à travers les toiles éparses. Les Grands Corbeaux s’étaient regroupés dans les allées boueuses, voûtés et immobiles sous le déluge. (...)
(...)
Kallor pivota et sortit de la tente. Une fois à l’extérieur, il s’approcha de son cheval.

Seuls quelques misérables Grands Corbeaux blottis les uns contre les autres sous un chariot furent témoins de son fugace sourire."
(et là, je me dis que ce n'est pas bon du tout...)
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Et peut-être s'agit-il là de la vérité ultime, la plus dévastatrice de toutes. Les dieux n'ont que faire des obligations ascétiques que les mortels s'imposent à eux mêmes. Ils n'ont que faire des règles de conduite, de la morale pervertie des prêtres et des moines des temples. Peut-être même se rient-ils des chaines que nous nous forçons à porter, de notre besoin incessant, insatiable, de nous chercher des imperfections dans ce que la vie exige de nous. Ou peut-être ne se rient-ils pas de nous, peut-être sont ils furieux. Peut-être cette négation de la vie célébrée constitue-t-elle la plus grande insulte adressée à la face de ceux que nous vénérons et que nous servons.
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Grognard se tassa en grommelant dans sa barbe.
"Par tous les dieux, si seulement le monde pouvait n'être peuplé que de femmes passives et pleurnichardes".
Il songea quelques instants à cette assertion, puis fit la grimace.
"D'un autre côté, quel cauchemar ce serait. La tâche d'un homme est de faire en sorte que l'étincelle devienne flamme, pas de l'étouffer ..."
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Ganoes Paran était tourmenté par des images de noyade. Seulement il ne se noyait pas dans de l’eau, mais dans un puits de ténèbres. Désorienté, cédant à la panique en un endroit inconnu et impossible à connaître. À chaque fois qu’il fermait les yeux, il se sentait pris de vertiges, et des nœuds se serraient dans ses entrailles. C’était en tout point comme s’il était redevenu un enfant. Terrifiée, incapable de comprendre, son âme était percluse de douleur.
Le capitaine quitta la barricade de la Division alors même que les derniers marchands de la journée luttaient encore pour franchir la masse de gardes, de soldats et de clercs malazéens. Il avait agi comme Dujek le lui avait ordonné en installant son campement en travers du col. Les taxes et les fouilles des coches avaient permis d’engranger un butin substantiel, même si les prises diminuaient à mesure que la nouvelle de la présence malazéenne se répandait. C’était un bel équilibre que de maintenir les taxes à un niveau supportable pour les marchands tout en laissant transiter suffisamment de contrebande de peur que l’étouffement ne vire à la strangulation et que le trafic entre Darujhistan et Pale ne s’assèche complètement. Paran contrôlait la situation, mais de justesse. En vérité, c’était bien là la moindre de ses difficultés.
Depuis la débâcle de Darujhistan, le capitaine était à la dérive, bringuebalé de-ci de-là à mesure que Dujek et son armée de renégats opéraient leur chaotique transformation. Les amarres malazéennes avaient été rompues. Les structures de soutien s’étaient effondrées. Le fardeau que le corps des officiers devait supporter s’était considérablement alourdi. Dix mille soldats s’étaient tout à coup changés en enfants qui nourrissaient un besoin urgent de réconfort.
Et Paran était bien incapable de réconforter qui que ce soit. Son désarroi n’avait cessé de croître, si tant est que cela fût encore possible. Des filets de sang bestial lui parcouraient les veines. Des souvenirs fragmentés – rarement les siens – et des visions étranges et surnaturelles hantaient ses nuits. Les heures de la journée s’écoulaient au sein d’un brouillard confus. D’incessants problèmes matériels et logistiques se succédaient, et leur gestion se voyait érigée tel un rempart face au flot grandissant des maux physiques qui l’obsédaient désormais, encore et encore.
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— Reine des Songes, marmonna Piocheuse tout en sanglant le harnais de cuir autour des membres de Ben le Vif, je ne t’ai jamais vu aussi effrayé, Magicien. Tu as une tête à m’en faire pisser des glaçons.

Ce furent les dernières paroles que Ben le Vif mémorisa de cette nuit-là, mais à l’évidence, il n’était pas prêt de les oublier.
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Vidéo de Steven Erikson
Le livre des martyrs de Steven Erikson, trad. Emmanuel Chastellière, chez Editions Leha https://editions-leha.com/catalogue-details/martyrs-t1-les-jardins-de-la-lune/ plus d'informations : https://www.actualitte.com/article/livres/epique-ambitieux-eclatant-ainsi-s-ouvre-le-livre-des-martyrs/88929
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