Nous ne partageons pas la même couche. Mes sommeils en petites coupures font qu'il vaut mieux que je dorme seul. Avoir en son lit un corps tremblant, brûlant de fièvre parfois, n'invite pas au repos réparateur. Le peu de mes nuits en son autre chambre voisine m'appelle. J'ai envie d'elle. Tard la nuit se fait. Comme un rêve, je quitte duvet pour flotter et me poser à ses côtés. Silence et certaine timidité règnent. J'effleure à peine les tissus de soirée qui recouvrent sous un léger drap. "C'est moi", lui dis-je. Ses courbes m'invitent. Nos souffles ne souffrent d'aucun interdit. Le drap se fait absent tandis que nos émotions corporelles s'enchevêtrent plus que ne s'emmêlent. Elle s'ouvre à moi et émoi me prend. La nuit devient petite mort. Un tourbillon me vrille le crâne er je viens en elle. La Terre cesse de tourner et suspend le temps. Un râle pour toute incidence sur le silence nocturne. Je baise ses épaules comme j'ai baisé son intimité. J'aimerais rester plus longtemps encore en elle.
Déchiré
Elle me lance et des rires, des bribes de sens, je m'en détourne, fatigué. Il me reste un pas de danse mais le chant se repose, essoufflé parce que déchirée.
Tant de souffle amer jeté en semence sur mon âme écorchée, tant de soufre à même le feu se défend des regards détournés parce que déchirés.
Déchirés comme le sont les rêves, balbutiement de songe, dans ces endroits de nuits sans sommeil un papillon qui se brûle les ailes.
Des carrousels d'ombres sur des yeux misogynes, des chagrins si longs, ces affreux fantômes qui devraient peupler le vide au lieu de chansons.
Si elle me lance des rires, des bribes de sens, je m'en détourne, fatigue, même s'il me reste un pas de danse, le chant se repose, essoufflé parce que déchirée...
Déchiré comme le sont les rêves, balbutiement de songe, dans ces endroits de nuits sans sommeil un papillon qui se brûle les ailes.
On a beau essayer de faire des détours, la destination ne change pas. Cas social tu es né, cas social tu restes. Comme gravé sur le front. Ma plaie de naissance. Mon tatouage permanent. La déchirure infrangible de mon mal être. je ne serai jamais autre que ce sale gosse mal né et je vais devoir faire avec .
Je m'éternise. La nuit est calme, un vent léger porte une pluie fine. Les reflets sur les rues nues de monde m'invitent à stagner. J'ai bu un peu mais je ne suis pas ivre. J'ai compris depuis longtemps que s'enivrer était un luxe et que se défoncer était un suicide. Je continue à picoler à ma mesure. Je traverse dans les clous des bandes blanches qu'on inflige. Tant que le monde se tient. Tant que ce monde tient.
On a beau la connaître et s'y être baigné, l'odeur de la misère reste sans nom.
J'aime passer beaucoup de temps au bord de cet étang à lire, à rêvasser en taquinant l'ennui. Et pleurer beaucoup aussi. Souvent l'étang est en crue de mes larmes.
Dans la rue, il y a deux façons de partir : les pieds devant ou tracer sa route pour un hypothétique meilleur ailleurs.
Je n'ai aucune prétention. Pas même d'estime. Je n'aime pas la gueule que j'ai. Je me contente de celle que je fais. J'aime le beau pourtant. Même le beau-laid. Ce dernier est plus intéressant. J'ai toujours aimé les bâtards. J'en suis un. Un humain bâtard. Mais le plus beau et fidèle des bâtards reste le chien. Il peut vivre longtemps parce que sans pedigree. Il sait qu'il vient de nulle part mais a beaucoup d'affection à prendre et à donner. Il est fidèle parce qu'il ne veut pas perdre ce qu'il a pu trouver. Il sait sa condition, fait profil bas sans pour autant se soumettre. Voilà, c'est ça: je n'ai pas de pedigree. Beau bâtard, je suis.
On a beau la connaître et s'y être baigné, l'odeur de la misère reste sans nom.
Le peuple Belge est, à mon sens, le plus ouvert du monde et au monde. Tu pourras jouer de la merde, il te payera quand même une bière