AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Apoapo


L'essai introductif du recueil de nouvelles a pour thèse principale la réfutation de la distinction entre érotisme et pornographie. Cette distinction a été (et continue d'être) invoquée selon des arguments d'esthétique (mis à mal par l'historicité de la réception), ainsi que féministes :
"L'idée que la femme et l'homme conçoivent différemment la sexualité est à la base de la distinction entre érotisme et pornographie, distinction associée, chez bon nombre de féministes militantes, à des questionnements de genre, la pornographie étant liée au plaisir masculin et l'érotisme à un désir féminin qui aspire à se construire." (p. 19)
A l'encontre de ce raccourci qui paraît quand même un peu facile, Etxebarria expose une gamme plus subtile et nuancée de critères de distinction (presque entièrement dus à des auteures femmes et peut-être féministes ?) qui sont présentés cependant peu ou prou comme autant de sophismes. (D'où, sans doute, la perplexité de Swann...)

En contrepartie, l'auteure loue sans réserve l'apport de la littérature érotique féminine - parce que féminine et parce qu'elle "a une portée politique et non pas seulement littéraire.
L'écrivaine contemporaine rompt avec le statu quo pour créer un univers correspondant à ses propres valeurs, sans pour autant renier sa propre biologie. Il en résulte un nouveau canon littéraire : une image de la réalité captée par un regard de femme, et portée par un discours non androcentrique. Une vision nouvelle de la femme conçue comme agent provocateur, vision façonnée par une profusion de textes qui ont fini par constituer un corpus ayant ses propres références, sa propre voix et son propre système." (p. 24)

[Et déjà deux notions me font légèrement grincer les dents : "la portée politique" de la littérature et le passage de la rupture du statu quo à un "nouveau canon littéraire"...]

Cette littérature érotique féminine diffère(rait) de la prose érotique masculine en six points:
1. "les hommes sont directs, les femmes sont sinueuses" (p. 33)
2. "les femmes sont prolixes, les hommes sont concrets" (p. 34)
3. "les hommes sont visuels, les femmes sont sensorielles" (p. 36)
4. "les hommes sont simples, les femmes sont compliquées" (ibid.)
5. "soumission et sadomasochisme sont nettement plus présents dans les écrits de femmes" (p. 37)
6. "les images sexuelles des femmes sont différentes de celles des hommes" (p. 39)

Le choix des nouvelles, au moins pour les six premières, semble être fondé sur un désir d'exemplification de la liste sus-indiquée.

Je ne suis pas suffisamment expert dans le genre érotique pour confirmer ou infirmer la thèse de cet essai. Comme prévu par l'auteure, certaines nouvelles m'ont touché plus que d'autres, certaines pas du tout, et c'est sans doute une question personnelle.
D'instinct, je me sens assez dubitatif face à l'essentialisation d'un genre dans la littérature, érotique ou non. Il me semble bon de réserver aux arts (dont la littérature), comme aux autres productions de l'esprit, le bénéfice de ce que Belinda Cannone appelle le "neutre".
Par conséquent, si je recherchais un "questionnement de genre", ou dans la mesure où c'était le cas, je demeurerais assez insatisfait.
Commenter  J’apprécie          10



Ont apprécié cette critique (1)voir plus




{* *}