Car n’est-ce pas l’aspiration ultime de la bourgeoisie : étendre sur le monde le somptueux linceul de l’immobilité et de la permanence. Que rien ne bouge, que rien ne change. Jamais, nulle part. Que tout soit sous contrôle. Que tout soit mort. Que tout soit tranquille !
Tandis que je jouais au poète famélique et tourmenté, drapé dans mon écharpe rouge et mon anarchisme romantique, Philippe, lui, préparait la révolution mondiale au fond de bistrots enfumés dont les murs, jaunis de tabac et de crasse, disparaissaient sous une multitude d’affiches périmées qui auraient pu offrir, à celui qui se serait donné la peine d’en déchiffrer la stratigraphie, une saisissante vue en coupe des grands conflits de la planète.