Je referme le livre de
David Foenkinos particulièrement émue. C'est un vibrant hommage qu'il rend à l'artiste peintre,
Charlotte Salomon, juive berlinoise, assassinée à Auschwitz alors qu'elle portait la Vie.
Ce livre, à sa sortie, m'avait quelque peu dérangée par sa présentation. Ecrit sous l'apparence d'un poème qui n'en est pas un, décontenancée, j'avais renoncé à sa lecture. C'est feu notre amie ClaireG avec laquelle j'avais tissé des liens quotidiens, qui m'a incitée à lire ce livre. Claire avait eu le plaisir d'admirer les toiles de
Charlotte, plus de 800 gouaches. En regardant sur internet quelques tableaux de l'artiste, j'y ai retrouvé Chagall avec lequel je partage une même sensibilité. J'écris ces quelques lignes en pensant à Claire et je lui dédie cette chronique qui, sans ses conseils, n'aurait peut-être pas vue le jour.
Selon moi,
David Foenkinos se livre à un travail d'écriture pas si évident mais réussi. L'économie des mots, leur choix, les retours à la ligne qui lui sont imposés afin de mieux respirer tant il est passionné par
Charlotte, lui permettent d'aller à l'essentiel et font émerger à la fois le drame d'une jeune femme, l'horreur d'une époque mais aussi la pulsion de vie de
Charlotte afin d'exorciser ce dialogue funeste qu'entretient sa famille avec la mort. C'est un dialogue qu'il tisse avec son lecteur et je me suis retrouvée contaminée par les mots de l'auteur.
Les émotions affleurent de l'écriture, c'est un homme amoureux qui exprime sa quête, dans son obsession de sortir
Charlotte de l'oubli comme il l'écrit page 69 :
« Je devais déjeuner avec une amie qui travaillait dans un musée.
Elle m'a dit : tu devrais aller voir l'exposition.
C'est tout ce qu'elle a dit.
Peut-être a-t-elle ajouté, cela devrait te plaire.
Mais je ne suis pas sûr.
Rien de prémédité.
Elle m'a guidé vers la salle.
Et ce fut immédiat.
Le sentiment d'avoir enfin trouvé ce que je cherchais.
Le dénouement inattendu de mes attirances.
Mes errances m'avaient conduit au bon endroit.
Je le sus dès l'instant où je découvris
Vie ? ou Théâtre ?
Tout ce que j'aimais.
Tout ce qui me troublait depuis des années.
Warburg et la peinture.
Les écrivains allemands.
La musique et la fantaisie.
Le désespoir et la folie.
Tout était là.
Dans un éclat de vives couleurs.
La connivence immédiate avec quelqu'un.
La sensation étrange d'être déjà venu dans un lieu.
J'avais tout cela avec l'oeuvre de
Charlotte.
Je connaissais ce que je découvrais. »
Aujourd'hui, je voudrais pouvoir admirer les toiles de
Charlotte afin de lui rendre hommage.
Et après cette magnifique lecture, la question lancinante s'impose : On ne peut pas réparer de telles atrocités et comment cela a-t-il pu exister ?