AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Ogrimoire


Voilà un roman policier atypique, dans lequel l'enquête compte en réalité moins que de savoir comment chaque personnage va – ou non – parvenir à tirer son épingle du jeu. Et il n'y en a pas vraiment un pour rattraper l'autre : l'ex-mao qui arpente les dunes à la recherche de femmes qui s'offrent au premier venu, le vieux raciste aigri, la jeune femme qui, chaque été, offre aux inconnus son corps pour faire le plein de sensations pour l'année, le rejeton de bonne famille qui espère juste pouvoir continuer à se fournir en cocaïne, l'agent immobilier prêt à fermer les yeux pour un bon paquet de billets… D'ailleurs, à la fin, l'enquête est davantage dissoute que résolue, mais ce n'est pas l'essentiel

Dominique Forma semble prendre un malin plaisir à explorer les zones d'ombre de chacun d'entre eux, à mettre en évidence les lignes de faille, à souligner les cassures intimes. le tout dans un monde désenchanté, individualiste, gouverné par l'argent et le sexe. Il n'y a plus de place pour les convictions ou les idéaux, semble-t-il nous dire.

On sent d'ailleurs comme une nostalgie de ces années 70 où les manifestations pouvaient être violentes. Ainsi, lorsqu'il écrit, pages 139 et 140 :

« Milke se considère comme un homme qui ne plie pas. Pas souvent. Et s'il n'en reste qu'un, il voudrait être celui-là. Loin de ces jeunes manifestants qui pleurnichent, vidéos en HD sur leur smartphone à l'appui, parce qu'ils ont reçu un coup de matraque dans les pattes ou une lacrymo. Ces soutiens de la révolutionviendront bientôt manifester accompagnés de l'avocat de papa. »

Et c'est d'ailleurs autour de cette droiture, de ce « sens de l'honneur » que les deux retraités vont se retrouver, eux qui peinent à comprendre ces nouvelles générations qui leur paraissent si creuses, si superficielles, et, au final, assez peu compréhensibles. Mieux un bon ennemi qu'un ami fade, en quelque sorte… « Nous étions faits pour nous détester, et nous l'avons bien fait », semblent-ils se dire avec une certaine fierté.

Ce livre se lit très bien : c'est fluide, on sourit autant qu'on grince des dents avec ces personnages tellement faillibles, faillis, faibles. Si je devais émettre un bémol, ce serait effectivement sur le choix – que je crois délibéré – de faire vraiment passer l'intrigue policière au deuxième plan – : certes, les pièces du puzzle se mettent en place progressivement, mais simplement parce qu'elles nous sont racontées par les différents personnages, pas tant sous l'effet de leurs « investigations ».

Il faut préciser que l'ensemble est assez trash, depuis la scène d'entrée, exploration de la Baie des cochons, puis autour du personnage d'Alexe, dont Clovis, son voisin, nous dit au sujet de la première fois qu'il l'a vue : « … elle sortait d'une voiture quasiment nue cette fois-là, hilare et souillée. Truie, profanée et superbe à la fois ».
Lien : https://ogrimoire.com/2021/0..
Commenter  J’apprécie          220



Ont apprécié cette critique (21)voir plus




{* *}