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Critique de motspourmots


Retrouver Boro c'est comme renouer avec mes jeunes années et me remémorer les quelques trente-cinq ans qui séparent la publication du premier tome, La dame de Berlin de celui-ci, surprise inespérée. Dans une préface émouvante et pudique, Dan Franck retrace l'histoire du compagnonnage qui noua sa plume à celle de Jean Vautrin décédé il y a quelques années, et créa un troisième écrivain baptisé Franck & Vautrin. Les aventures de Boro, reporter photographe devaient occuper 5 tomes, c'était sans compter la richesse de la période à traiter et sans doute l'enthousiasme des deux hommes pour leur créature. C'est donc seul que Dan Franck a entrepris de continuer, plus de dix ans après la parution du huitième volet (La dame de Jérusalem). Pourtant, l'influence de Vautrin est bien là, sa présence plane en creux et teinte d'une certaine nostalgie ces retrouvailles avec un Boro qui vient de passer le cap du demi-siècle. Et qui lui aussi a perdu un être cher.

Nous sommes en 1960, dans une France secouée par les vélléités d'indépendance de l'Algérie et dans un monde marqué par la Guerre froide. Les reporters ne chôment pas, Boro est bien sûr aux premières loges avec une collection d'appareils photo qui a eu le temps de grandir. Avec lui nous serons partie prenante de l'opération menée par les Israéliens en Argentine pour enlever Eichmann, nous reviendrons sur la triste année 1956 et l'écrasement de la révolte hongroise à Budapest par l'armée russe qui coûtera la vie à Maryicka, nous assisterons aux violentes répressions des manifestations pour l'Algérie par la police française et à l'incroyable opération d'édification du mur de Berlin en 1961. Dans les pas d'un Boro toujours décidé à se battre pour la liberté, et toujours sidéré de constater que l'horreur et la violence sont toujours là, réinventées à chaque nouvel épisode du désordre mondial. Un nouveau personnage fait son apparition en la personne de Jolan, jeune résistant hongrois ramené par Boro en 1956 et qui rappelle beaucoup ce que lui-même était à vingt ans. Y compris dans ses emballements amoureux.

J'ai trouvé cet épisode très réussi, avec toujours cette faculté de traiter les grands événements du 20ème siècle à la manière des grands romans d'aventures du 19ème siècle. On tremble pour le destin de ces personnages attachants et on revisite des moments clés de notre histoire sans aucune complaisance. Je me souviens encore de la violence des Noces de Guernica (tome 3), un livre qui m'avait beaucoup éclairée sur les enjeux de la guerre d'Espagne à l'époque. La façon dont sont relatées ici, sous les yeux de nos héros reporters, les violences policières du 17 octobre 1961 fait froid dans le dos. Tout comme le récit de l'opération d'enfermement de tout un peuple à Berlin en août de la même année. Les enjeux se sont déplacés vers une logique d'affrontement des blocs est-ouest mais le parti-pris narratif permet de mettre tout ceci en rapport avec ce qui a précédé depuis les années 30 et tous les événements dont Boro et ses confrères ont été témoins et partie prenantes. C'est habilement fait, à la fois pour permettre de renouer en douceur avec le petit monde de Boro et pour oeuvrer à la compréhension des évolutions du monde.

A la fin, la mention "à suivre" indique que Dan Franck n'en a pas fini avec Boro et les désordres du monde. J'espère qu'il ne faudra pas attendre dix ans pour le tome 10... surtout dans la position dans laquelle nous devons laisser notre héros. Vite, la suite !
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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