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Critique de Tachan


[Sur les tomes 1 et 2]

Adolescente, j'ai longtemps déploré de ne pas trouver de plume française qui me plaisait en fantasy. C'était jusqu'à ce que je rencontre Mathieu Gaborit et ses Chroniques des Crépusculaires. Avec sa gouaille et son sens de l'aventure, il avait su m'emporter dans son univers. Éloignée un temps à nouveau de la production française, j'ai été ravie de le retrouver en 2019 avec sa suite Abyme que j'avais adorée. Alors forcément quand l'auteur nous propose de retourner dans cet univers le temps d'une aventure en deux tomes, ça ne peut que me faire envie.

Avec ces superbes couvertures signées Daniel Balage, j'ai été plus que ravie de replonger dans l'univers de la ville-personnage Abyme aux côtés du farfadet le plus célèbre du monde : Maspalio. Dès les premières pages, Mathieu Gaborit redonne le ton de ce récit de cape et d'épée plein de gouaille qui promet d'être plus sombre que sa précédente aventure. Maspalio a vieilli, il revient après 10 ans d'absence et sa ville, tout comme ses habitants, ne sont plus les mêmes.

Sous une plume encore plein d'allant et d'humour, j'ai senti une vraie maturation de l'univers. L'auteur ne se contente plus qu'une petite aventure en mode polar, il nous offre ici une véritable épreuve pour le héros avec des pages bien plus sombres aux limites de la dark fantasy parfois, dans cette ville en pleine déchéance, mais toujours avec cet humour grinçant qu'on lui connaît et qui fait tellement de bien.

Le rythme est enlevé dans les deux tomes. On plonge dès les premières pages du tome 1 pour n'avoir qu'une courte respiration en court de route. le premier tome se veut assez rapide pour présenter tous les enjeux et les évolutions de la ville, tandis que le second - malgré une pagination similaire, l'éditeur jouant sur la police et les marges - est plus copieux et dense en informations, personnages et enjeux complexes entre eux. J'ai apprécié chacun d'eux, les lisant l'un après l'autre dans la foulée, tellement j'étais prise par les événements.

Abyme est à nouveau le théâtre de bien des drames. La ville est tombée aux mains des prudes, austères et liberticides en l'absence de Maspalio après qu'il ait refusé la place d'Artificier. Il est rappelé des années plus tard par l'amour de sa vie, Cyre, qui ne se sent pas en sécurité et voudrait qu'il protège sa famille, sauf que quand il arrive, elle est déjà morte. Maspalio va se retrouver embarqué dans tout un tas de manigance du pouvoir mais aussi des camps en place pour tenter de redonner sa splendeur d'antan à la ville ou la garder sous ce joug oppressif, selon le camp.

Dans un premier temps, le récit se veut très intime avec un vieux héros qui réapprend à connaître sa ville et découvre ce qu'elle est devenue. Il tente également de comprendre ce qui est arrivé à son amour de toujours et à apprivoiser sa fille en l'aidant, tandis que le gouvernement de la ville les poursuit. On court partout dans la ville avec eux sans bien comprendre pourquoi. Cela s'éclaire par la suite et on découvre alors de multiples camps aux aspirations diverses qui s'affrontent et ont tous à leur tête ou dans leurs rangs des personnages charismatiques par les drames qu'ils vivent. Ainsi alors que le récit semble simple au début, il se complexifie joliment au fil des chapitres qui défilent, au point qu'on suit une belle flopée de personnages dans le tome 2.

Nous sommes ici dans un récit qui se veut celui d'une fin de règne, d'une passation de témoin entre les générations. Cela se sent d'entrée de jeu avec cette ambiance plus sombre et délétère où il faut reconquérir la lumière et la liberté. Les débuts sont donc un peu oppressants et la tension monte rapidement jusqu'à ce qu'on se sente un peu coincée, mais l'auteur apporte un très beau dénouement qui, quoique classique, clôt avec émotion et justesse l'histoire de Maspalio.

J'ai beaucoup aimé l'ensemble de l'aventure dans cette ville-personnage dont j'ai aimé retrouver les lieux célèbres, les ruelles anonymes, les odeurs et les us et coutumes nouveaux ou anciens. L'auteur a toujours un talent aussi vif pour raconter des scènes d'action et rendre celles-ci très visuelles. J'aime aussi l'imagination dont il fait preuve pour la magie et la mythologie de son histoire avec un je ne sais quoi de tragique et de grec avec ces Salanistres (serpents/dragons qu'on voit sur la couverture du tome 2). La scène finale qui consacre Maspalio est ainsi un vrai petit bijou où j'ai senti entre autre l'influence de Robin Hobb et son univers des Anciens. Je me suis régalée.

Dévorés en une longue après-midi, La cité exsangue offre un divertissement palpitant où humour grinçant côtoie vrai tragédie et aspiration à une nouvelle liberté après des années de tentative d'extinction de celle-ci. Ainsi le diptyque porte son titre à merveille avec cette cité sur le point de s'éteindre mais qui va renaître de ses cendres et offrir un superbe cercueil à son héros pour une ultime aventure lui permettant de passer la main. Ce fut riche, passionnant, tendu et même sombre parfois, mais que j'aime la plume enlevée de Mathieu Gaborit ! Je serai ravie de le retrouver dans de nouvelle aventure.
Lien : https://lesblablasdetachan.w..
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