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Critique de PrettyYoungCat


Ce livre est une merveilleuse rencontre.
Avec un écrivain tout d'abord, à la langue parfois sophistiquée mais sobre toujours, et dont la beauté des mots transfigure la réalité monstrueuse où explose la laideur des Hommes.
Mais Jérôme Garcin nous dit avant tout et surtout la lumière d'un résilient fabuleux, une force vive, un être hors du commun : Jacques Lusseyran.

Né en 1924, il nait une seconde fois à l'âge de huit ans lorsqu'un banal accident de la vie le prive de la vue. Mais il n'y voit là aucun motif de pitié et transcende la cécité et la pare de couleurs et de lumière. Elle lui confère une acuité visuelle qui vient de l'âme et nourrit l'intuition. Quelle extraordinaire force mentale de transmuter ainsi en atout ce que d'aucuns considèreraient comme un terrible handicap. Il nous rappelle la jolie phrase de Saint-Exupéry "On ne voit bien qu'avec le coeur, l'essentiel est invisible pour les yeux".

La vie le fracasse à nouveau quand la guerre éclate.
"Il y a simplement qu'il vécut la défaite de la France en cinq semaines et son occupation par les nazis comme un nouvel accident, un autre traumatisme. Neuf années après avoir perdu la vue, il perdait en effet son pays. C'était comparable, selon lui, à une seconde cécité : "Après la lumière extérieure, on m'ôtait la liberté extérieure. J'avais retrouvé la lumière intacte, augmentée, au fond de moi. Cette fois, je voulais retrouver la liberté tout aussi présente et exigeante. J'ai su qu'une deuxième fois le destin attendait de moi le même travail. Car j'avais appris que la liberté, c'est la lumière de l'âme. Il n'y a pas d'autre cause à mon engagement dans la Résistance."

Mais la Résistance le mènera finalement à la prison de Fresnes après dénonciation, puis à Buchenwald.
De la déportation, il y laissera un très cher ami et au lendemain de la libération, la lumière s'éteindra au fond de lui et il traversera un immense trou noir, une dépression longue de sept ans.

Intellectuel, érudit et sensible à l'ésotérisme, il fera une rencontre déterminante qui le fera émerger de sa détresse et renaître une fois encore. Il se mariera trois fois, aura des enfants et repartira pour une nouvelle vie, une de plus, en Amérique. Il est écrivain, mais la France, l'Allemagne et les États-Unis ne retiendront que "Et la lumière fut" où il raconte son expérience de la déportation. Elle sera réécrite plutôt que traduite quelques années plus tard sous le titre "The Blind Hero Of The French Resistance".

Ce destin inouï, cette vie si pleine d'ombres et de lumières, le fauchera dans un triste et absurde accident de la route en 1971 à 47 ans.

J'ai été absolument conquise par la plume de Jérôme Garcin qui nous raconte avec une beauté déchirante un être non moins bouleversant qui nous fait sentir si petits tant il nous apparait admirable.

Un livre sublime dont vous ne devez pas redouter le sujet car c'est de l'humain que vous y rencontrerez.
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