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Critique de Eve-Yeshe


C'est une histoire touchante, celle de Mathilde et de sa famille. le père, Paulot tient, avec son épouse Odile, un bar tabac épicerie, le Balto, dans la proche banlieue parisienne. Il est aux petits soins pour tout le monde, oubliant souvent de faire payer, hébergeant des campeurs gratuitement et faisant danser tout le monde au son de son harmonica. Tout va bien, on est dans les trente glorieuses.

Ils ont eu une fille Annie, puis perdu leur deuxième enfant un garçon et quand Mathilde arrive, elle ne sera pour son père que le substitut de l'enfant mort. Il ne l'appellera jamais autrement que « petit gars ». Elle vit dans l'ombre de sa soeur qui fait la fierté de Paulot qui la fait danser, alors qu'elle doit se contenter de les regarder.

Quand la tuberculose frappe Paulot, tout change. La clientèle se fait rare, oubliant tous les services qu'il a pu rendre. Ils deviennent des « Tubards » comme on disait à l'époque, des pestiférés que tout le monde fuit.

Certes, il y a la Sécurité Sociale, mais ils ne sont pas salariés, et n'ont pas payer de cotisations faute de moyens. Quand il faut partir au sanatorium d'Aincourt, la situation dégénère, Mathilde, qui n'a que treize ans, et son petit frère Jacques sont placés dans des familles d'accueil différentes, tandis qu'Annie se tourne vers le mariage, et ne s'occupe de rien, mise à part elle-même. Elle aura toujours un prétexte pour se dérober, ne pas aller voir ses parents. L'égoïsme dans toute sa splendeur alors que son père l'a toujours privilégiée.

« C'est une maladie silencieuse, celle de la famille Blanc, au début des années 1960. Un récit en marge, celle de la maladie et de la misère au temps miraculeux de la prospérité, de la Sécurité Sociale et des antibiotiques qui semblent clore l'histoire de la tuberculose. »

C'est Mathilde qui assume tout, la misère, la faim et que se tient debout, vaillant petit soldat qu'on ne reconnaît jamais, car il est normal qu'elle assume tout, y compris le petit frère… sa famille d'accueil n'a rien à envier aux Thénardier… Elle est adulte avant l'heure, son enfance a été volée et ses parents se comportent quand même comme de grands enfants…

Valentine Goby nous raconte plusieurs histoires dans ce roman : celle d'une famille qui devient paria, terme vraiment utilisé à bon escient, car issu du mot tamoule « paraiyar » qui signifie hors caste. On l'a oublié car, avec l'arrivée des antibiotiques, de la vaccination, elle est moins fréquente mais n'a pas disparu. C'était le SIDA de l'époque. Son nom faisait peur, provoquait le rejet par crainte de la contamination.

Les sanatoriums, ces immenses bâtiments, au milieu des forêts, aux grandes baies vitrées, aux balcons ou verrières face au soleil, comme des « grands paquebots sur les arbres », aussi sont à l'abandon comme celui d'Ainville ou recyclés en maisons de repos comme en Haute Savoie (on les appelait aussi des paquebots).

On parle de ces années, comme les trente glorieuses, mais elles ne l'ont pas été pour tout le monde, avec la guerre d'Algérie en toile de fond.

J'ai aimé la façon dont Valentine Goby commence son récit : Mathilde revient en pèlerinage cinquante ans plus tard, ne trouve que ruines, bâtiments abandonnés, tagués et cherche à retrouver ses souvenirs.

L'auteure s'est inspirée d'une histoire vraie pour nous raconter un destin de femme hors du commun, comme dans « Kinderzimmer » que j'ai bien aimé également. La couverture est très belle. le style est soigné, parfois lapidaire, avec une ponctuation limitée.

Note : 8,5/10
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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