Découvrez les secrets de l'importance du retravail du texte avec neuf écrivains français de renom ! Dans cette vidéo captivante, des auteurs tels que Franck Thilliez, Caryl Férey, et Pierre Lemaitre partagent leurs méthodes et astuces pour créer des histoires inoubliables. Vous apprendrez comment construire des intrigues passionnantes, développer des personnages mémorables et maîtriser l'art de la réécriture. Rejoignez-nous pour une plongée profonde dans l'univers fascinant de la création littéraire. Que vous soyez écrivain en herbe ou amateur de littérature, cette vidéo est une mine d'informations pour stimuler votre créativité ! Abonnez-vous pour plus de conseils d'écrivains et d'autres contenus sur l'écriture.
00:10 Franck Thilliez
01:06 DOA
05:17 Caryl Férey
05:54 Valentine Goby
09:11 Vincent Hauuy
09:36 Susie Morgenstern
11:44 Jacky Schwartzmann
12:42 Pierre Lemaitre
16:04 David Diop
17:23 Pierre Lemaitre
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Ce qu'ils font à ce corps il s'en fout, il pèse le poids d'un noyau de pêche, vingt et un grammes maximum, ce que pèse l'âme selon les calculs de Duncan MacDougall, médecin américain.
p80
"[...] être utile ça maintient en vie."
- Donc, tu es différente, dit Léna, mais pas handicapée ?
- Handicapé ça veut dire qu'il te manque quelque chose. Je trouve qu'il ne me manque rien. Et on dit pas handicapé, en fait. On dit : en situation de handicap.
- C'est pareil.
- Pas vraiment. Je sais pas comment expliquer... Ce n'est pas la "personne" qui est handicapée. C'est le corps "dans certaines situations". Par exemple moi à l'escalade. Mais des fois, vous êtes vous-mêmes en situation de handicap. Devant des baguettes chinoises, tiens, pour Aurélien.
Laissez-vous faire dit la directrice. La vie est dure avec vous, vous n’y êtes pour rien, avec moi elle est douce et je n’y suis pour rien non plus. La seule chose possible, c’est confier la malchance à la chance, compter sur la contagion vertueuse, vous comprenez.Ça plaît à Mathilde ces mots-là, contagion vertueuse. La chance aujourd'hui c'est moi, je peux vous aider.
Le froid saisit le garçon à la descente du train. Détoure son corps osseux, les saillances enfouies sous ses vêtements trop larges, l’arête du nez, les phalanges au bout des mitaines. Il se fige sur le quai, sa valise à la main, enveloppé de son souffle. Il perçoit exactement ses contours, la mince frontière qui le sépare du dehors à la jonction de la peau tiède et de la gangue d’air glacial. La sensation est si aiguë qu’il se figure sa silhouette dissociée du décor, pareille aux personnages découpés d’un théâtre d’ombres. Mais déjà ses formes se dissolvent. La neige lui monte aux chevilles, s’agrippe en gros flocons à son bonnet, son pantalon et son manteau de laine, s’amoncelle sur sa valise, ses chaussures, s’applique à l’absorber comme elle gomme toute chose.
(Incipit)
Hormis la merde, l’urine, le pus, le corps s’économise : il stocke le sang. Lisette n’a pas ses règles, Georgette n’a pas ses règles, ni aucune des Françaises du Block. Ni les Polonaises, ni les Tchèques, les anciennes le disent, au bout d’un moment personne n’a plus ses règles au camp : la muqueuse est sèche. Tout le sang va aux fonctions vitales, artères, veinules, veines irriguant le cœur, chaque goutte utile. Les femmes n’ont plus de sexe, à seize ans, comme à soixante. (page 62)
La mémoire est une somme d'images vivantes et de fenêtres murées.
"[...] il faut des historiens, pour rendre compte des événements ; des témoins imparfaits, qui déclinent l'expérience singulière ; des romanciers, pour inventer ce qui a disparu à jamais : l'instant présent."
Mais je ne suis pas handicapée. Je suis différente. On est tous différents, les cheveux, les yeux, la taille, la voix, disons que je suis un peu plus différente.

Mila pose sa gamelle. Elle dit :
— J'ai faim, c'est pas une vie.
Et Teresa rigole :
— Ah oui ? C'est quoi la vie ? C'est où ?
— C'est dehors, dit Mila. C'est acheter du pain à la boulangerie, vendre des partitions de musique, embrasser ton père et ton frère le matin, repasser une robe, aller danser avec Lisette, faire du riz au lait...
Teresa se marre.
— Tu n'y es pas ! Être vivant, elle dit, c'est se lever, se nourrir, se laver, laver sa gamelle, c'est faire les gestes qui préservent, et puis pleurer l'absence, la coudre à sa propre existence. Me parle pas de boulangerie, de robe, de baisers, de musique ! Vivre c'est ne pas devancer la mort, à Ravensbrück comme ailleurs. Ne pas mourir avant la mort, se tenir debout dans l'intervalle mince entre le jour et la nuit, et personne ne sait quand elle viendra. Le travail d'humain est le même partout, à Paris, à Cracovie, à Tombouctou, depuis la nuit des temps, et jusqu'à Ravensbrück. Il n'y a pas de différence.