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Critique de Foxfire


Donald Goines est un auteur que j'affectionne énormément. Déjà, je trouve son histoire assez touchante. Ce type, venu d'un milieu pas vraiment défavorisé, est devenu accro à l'héroïne à l'armée. La drogue a changé sa vie, le faisant entrer dans un milieu auquel ses origines sociales ne le prédestinaient pas. Toxico, dealer, braqueur, maquereau, Goines a aussi connu la prison et c'est là qu'il a découvert la lecture et l'écriture. Malheureusement, ce n'est pas une histoire qui finit bien, la littérature ne l'a pas sauvé. Il est mort assassiné sur un parking, sans doute dans le cadre d'un deal de drogue. Mais, il a laissé sa trace, à travers des romans d'une force extraordinaire. A l'instar d'un Iceberg Slim, il s'est attaché, de roman en roman, à faire découvrir les bas-fonds de l'Amérique, celle des dealers, des toxicos, des putes et des macs. J'aime bien Iceberg Slim mais j'ai toujours eu une petite préférence pour Goines. Je trouve que dans tous ses récits, même les plus durs, et c'est le cas de cet « enfant de putain », il y a une petite part de tendresse, une dose d'humanité que je ne trouve pas chez Slim.

La tendresse, il faut pourtant vouloir la voir dans « enfant de putain », sans doute le récit le plus violent que j'ai lu de l'auteur. Ce roman est parfois très difficile à lire, à la limite du soutenable, tout particulièrement en tant que femme. En effet, dans « enfant de putain », les femmes sont maltraitées, battues, violées, prostituées, humiliées. Mais, ce faisant, Goines ose montrer une certaine vérité, il n'édulcore jamais. Et cette violence sert avant tout à appuyer son propos. A travers le destin de ce jeune homme, fils de pute au sens propre du terme, maquereau brutal, Goines évoque le problème du déterminisme social et la façon dont chacun, dans un climat social délétère ou l'Homme est un loup pour l'Homme, va exploiter plus faible que lui. En tant qu'homme noir, né dans le ghetto d'une mère prostituée, Whoreson est une victime de la société mais il va se trouver des victimes encore plus faibles à exploiter sans vergogne. L'humanité ne ressort pas grandie de cette évocation réaliste du monde de la prostitution. Et pourtant, comme je l'ai dit, chez Goines, il y a toujours une lueur d'humanité. Ici, elle se trouve au début du roman et à la fin. La première partie du roman, qui raconte l'enfance de Whoreson, est illuminée par l'amour que porte cet enfant à sa mère prostituée. J'ai trouvé cela très touchant. Quant à la fin, comme dans « l'accro », terrible roman sur la toxicomanie, Goines renonce au réalisme et à la véracité pour offrir un happy end à son personnage. On peut y voir de la naïveté ou une forme de faiblesse dans le fait de ne pas aller jusqu'au bout. Moi, j'y vois de l'humanité et de la tendresse pour cette saloperie qu'est l'être humain.

Encore une fois, Goines m'a secouée, m'a choquée et m'a émue. Je trouve que cet auteur n'est pas assez connu en France, il mériterait largement d'être aussi lu que Slim. Si vous vous sentez d'attaque à plonger dans cet univers sordide, n'hésitez pas, vous y trouverez peut-être, comme moi, une lueur de tendresse qui, étrangement, raffermira votre foi en l'humanité.
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