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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
°°° Rentrée littéraire 2019 #16 °°°

Ça démarre par une tempête tonitruante, des éléments déchainés en pleine nuit, une mer furibonde qui fait chavirer un bateau de pêche. Comme un tocsin qui retentirait pour annoncer les destins fracassés, un gâchis irrémédiable.

C'est un roman noir, très noir, admirablement construit. A partir de cette retentissante scène inaugurale, une tension sourde monte, on sait, on sent que ça va déraper, on attend de découvrir comment, pourquoi, avec quelles conséquences la gorge nouée.

Mais cette noirceur est éclairée par la profonde humanité qui affleure dans chaque page. Car c'est le coeur des hommes qui intéresse profondément l'auteur. Sa façon de tisser les liens entre ses cinq personnages, amis ou ennemis, est très forte. Chacun est traité avec beaucoup de dignité et de tendresse, avec une psychologie fouillée, leur parcours n'est pas linéaire mais évolue au fil des événements. Des êtres de chairs, imparfaits, qui trahissent, pleurent, se débattent .

Bien sûr, il y a les bons, Marc en tête, le généreux, plein d'assurance malgré son obésité, intelligent et fin, un magnifique personnage. Mais surtout, Ronan Gouézec nous offre un «  méchant » extraordinaire, le frère aîné Banneck, bloc monolithique de haine et violence qui se fissure jusqu'à devenir terriblement touchant. C'est rare en littérature de lire de tels mots pour décrire un être qui a semé le malheur dans les chapitres précédents :

« Ils s'étaient assis en silence. Et, très vite, ça aussi c'était inédit, une ou deux larmes avaient tenté une sortir sur le visage de Banneck aîné. Elles n'avaient pas pu rouler bien loin sur la peau tannée du grand frère, trop de rides, de cicatrices, d'obstacles à leur progression, de fierté aussi. Alors elles étaient restées accrochées au niveau des pommettes comme deux perles de givre, bientôt fondues et évaporées sans qu'il y touche, tant le sang qui circulait sous le cuir était vif et chaud. »

L'écriture de Ronan Gouézec offre un grand plaisir au lecteur dès les premières phrases. Très souvent, au fil de ma lecture, je me suis délectée de sa plume précise, généreuse, élégante.

Un roman intense et beau construit comme une tragédie universelle. Une belle réussite.
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J'ai laissé passer plusieurs semaines entre la lecture des deux ouvrages de Ronan Gouézec, "Rade amère" et "Masses critiques".
Non pas que le premier roman de Ronan Gouézec m'ait déplu, bien au contraire.
Mais c'est un récit policier fort, sombre, épais et dense.
Disons qu'une deuxième tartine de Maroilles à suivre, c'est un peu trop pour la petite nature que je suis.
Et que j'ai eu peur de gâcher le plaisir d'y revenir ...
J'y suis pourtant revenu.
D'aillleurs, on revient toujours à Brest lorsque l'on a eu la chance d'y passer.
Brest est une ville particulière, une ville qui n'est plus tout à fait à terre, une ville qui déjà semble avoir appareillé vers d'autres ailleurs ...
Et les mots de Ronan Gouézec lui collent bien à la peau.
Cela commence par un pont lessivé par les paquets de mer.
Pourtant mille fois décrites par d'autres écrivains, les images d'éléments déchainés semblent ici renouveler l'exercice.
Et, Ronan Gouézec s'y affirme comme une véritable plume marine ... tourmentée mais marine.
Le premier Chapitre est un véritable exercice de style, une scène qui prend aux tripes et nous laisse, comme l'aîné des frères Banneck, groggy au bord de la côte.
Car le vieux Banneck et ses deux fils se sont mis au sec sur une roche.
Le vieux est au fond !
Et René Joffre, un restaurateur avec lequel ils étaient en compte a refusé son aide ...
"Masses critiques" est un roman policier sombre, violent et colérique.
Il est captivant et remarquablement bien écrit.
Peut-être même trop bien écrit, car parfois l'opulence de la description et la richesse du style en viennent à polluer un peu la clarté du récit.
Sous la plume de Ronan Gouézec, les mots semblent se solidifier dans ces descriptions.
Point trop n'en faut !
Cependant, une fois lancé, le récit se révèle passionnant.
La lectrice, le lecteur se doutent bien que ça va mal finir ...
Ronan Gouézec n'est pas un auteur de demi-mesure.
Il n'est pas du genre à ménager ses personnages.
Il va leur charpenter une vraie stature, leur imposer son intrigue policière et tragique.
En arrière-plan, Brest est là, bien présente en toile de fond avec son tram tout récent.
Brest qui ne semble pas bouger.
Brest en a vu d'autres mais tout de même.
Brest où ont disparu les pompons rouges, les mâtures de son arsenal et quelques uns de ses emblématiques bouquinistes.
Un serrurier-rempailleur de chaises m'a autrefois vendu quelques bons vieux introuvables avant que je ne parte en mer.
C'était cela Brest, une rue de la soif qui se terminaient dans une boutique de vieux livres ; du soleil, de la pluie et de la brume tout à la fois et la mer Zizou qui vendait des frites aux marins en piste jusqu'au petit matin dans une baraque en tôle au bas de la rue de Siam ...
Quoi qu'il en soit, le livre de Ronan Gouézec , s'il fait la part belle à la cité, ne donne pourtant pas dans la moindre nostalgie.
Et surtout, il n'est pas à confondre avec toute cette littérature policière locale de gare dont les titres semblent rebondir d'un calembour à un autre.
Il y a fort à parier que l'auteur de "Rade amère" et "Masses critiques" se taille bientôt une belle renommée dans le genre.
Si ce n'est déjà fait ! ...


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Recevoir un roman intitulé "Masses critiques" dans le cadre d'une opération masse critique (merci à Babelio et aux Editions du Rouergue au passage), c'est plutôt amusant, non ?

Marc et René sont deux amis de trente ans, mais des vrais, unis, même si chacun a ses petites secrets. Et en face d'eux, il y a deux frères, les Banneck, dont l'aîné est du genre brutal, ivre de vengeance. L'affrontement (ou les affrontements plutôt) semblent inévitable(s). Haine et aveuglement sont mêlés, les rôles s'inversant après un terrible drame. Ce ne sera pas le dernier...

"Masses critiques" est une histoire forte, âpre, très sombre, possédant néanmoins quelques moments de franche lumière. L'écriture est très belle, brute, sèche, iodée. Les personnages sont bien campés, plutôt des taiseux, pleins d'une colère sourde, si difficilement contenue. Des personnages qui évoluent au fil de l'histoire, on trouve une forme de rédemption chez certains. Mais la colère et la violence les dépasseront...

Un roman assez remarquable donc, à lire de préférence avec du Miossec en fond sonore...
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Comme dans Rade amère, le précédent roman de Ronan Gouézec, le livre s'ouvre sur une scène d'anthologie : ici, une tempête en mer d'Iroise et le naufrage d'un bateau de pêche. L'écrivain a cette habileté, mais aussi ce talent, de nous projeter immédiatement dans son univers. C'est une affaire de style et Ronan Gouézec maîtrise un style à la fois ample et percutant. Lorsqu'il nous parle des éléments de sa Bretagne occidentale, du vent, de la mer, de la dureté du relief, sa phrase se fait aérienne, liquide, rugueuse. Quand il entreprend de cerner les travers d'une société gangrenée par l'argent, la rentabilité, l'épate, les mots sont durs, incisifs, ravageurs et le détail se fait assassin. le style au service du fond, un fond qui explore les marges, que ce soit le braconnage, les réussites bâties sur du sable, la souffrance au travail ou encore le handicap d'un corps hors norme.
La masse critique est la quantité de matériaux fissiles nécessaire pour déclencher une réaction en chaîne et une explosion. Ronan Gouézec, à la manière d'un entomologiste, va suivre le parcours de ses personnages, chargés comme des bombes nucléaires et hautement inflammables. le ton est juste, la mécanique de haute précision et le résultat conduit à un embrasement général. Cependant, dans une surenchère de noirceur, l'auteur pratique une politique de la terre brûlée à laquelle aucun de ses personnages ne survivra. Fallait-il aller jusque-là ? Je n'en suis pas certaine.
Petit clin d'oeil à Rade amère, les lecteurs croiseront Brieuc, le patron du bateau-taxi.
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