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Critique de sandrine57


Princeton, 1980. Un peu malgré elle, beaucoup grâce à son père, Anna est documentaliste à l'IAS (Institut de Recherche Avancée). le directeur lui confie la tâche de récupérer les documents laissés par le grand mathématicien Kurt Gödel après sa mort. Mais cet héritage, si précieux pour la science, est entre les mains de sa veuve. La revêche Adèle a des comptes à régler avec l'université et compte bien faire attendre les chercheurs le plus longtemps possible. D'autres, avant Anna, ont essayé de l'amadouer, en vain. Pourtant, cette fois-ci, la vieille dame indigne accepte de revoir Anna, à condition qu'elle l'écoute raconter son histoire. C'est ainsi que la jeune documentaliste découvre comment une petite danseuse de cabaret viennoise rencontre en 1928 un génie de la théorie des mathématiques, saura l'apprivoiser et ne le quittera plus jusqu'à sa mort 50 ans plus tard, malgré l'hostilité de sa famille, malgré aussi ses manies, son hypocondrie, sa folie, son égoïsme. Elle sera sa femme, sa mère, son infirmière, le sauvera de l'Europe en guerre et surtout le sauvera de lui-même et cela sans jamais espérer une marque de reconnaissance, d'affection ou d'attention en retour. Une vie de sacrifice au service d'un génie, mais au nom de l'amour.


Pour moi qui sais tout juste compter jusqu'à 10, lire la vie d'un mathématicien logicien était une gageure. Mais j'ai relevé le défi et ce fut un bonheur de chaque instant. Alors bien sûr, je me suis souvent sentie dans la peau d'Adèle face aux explications de son mari. Comme elle, je n'ai rien compris à toutes ses théories et cela ne s'est pas amélioré quand Gödel s'est soudain passionné pour Husserl et la phénoménologie...J'ai alors tellement compris les sentiments d'Adèle, petite danseuse autrichienne sans culture, sans éducation, qui tous les jours vivait aux côtés de cet homme hermétique et froid, dans un monde d'universitaires, un cercle d'amis tous férus de sciences, dont le plus célèbre n'était rien de moins qu'Albert Einstein! Et j'ai surtout compris la force de son amour! Car il fallait une bonne dose d'amour pour supporter la condescendance de certains, le sentiment perpétuel d'infériorité. D'autant que Gödel, tout génie qu'il soit, est totalement inadapté socialement, incapable de s'occuper de lui-même, sujet à des névroses, anorexique, paranoïaque, monstrueusement égoïste. Celle qui a souvent été considérée comme l'autrichienne inculte, la mégère vulgaire, prononce à un moment une phrase très juste. Elle s'indigne que tout le monde se soit toujours interrogé sur le choix du génie pour une telle femme et que personne ne se soit jamais posé de questions sur son choix à elle. C'est qu'il n'était pas facile à aimer ce Kurt! Son amour, son abnégation, ses sacrifices, si peu reconnus, si souvent bafoués, ont pourtant été la force qui permettait au grand homme de travailler sans soucis d'aucune sorte.
Au final, La déesse des petites victoires est un livre bouleversant et fort qui nous promène de la Vienne des années folles jusqu'à l'austérité de Princeton, en passant par les grands évènements qui ont marqué le siècle : la montée du nazisme, l'Anschluss, la deuxième guerre mondiale, le maccarthysme, l'assassinat de Kennedy. Et toujours, au delà les aléas de l'Histoire, l'amour,le génie, la folie, la vie en sont les fils conducteurs. Alors même si vous êtes réfractaires aux maths et allergiques à la logique, n'hésitez pas à découvrir l'incroyable destin de cette femme qui comme souvent, se cachait derrière le grand homme.
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