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Citations sur Les âmes rouges (27)

(...) il guettait les moindres sons émis par les voisins, au-dessus, au-dessous, sur les côtés. Mais les travailleurs, pour la plupart, s'acquittaient ailleurs de leur devoir envers le peuple. Puis il oublia bientôt tout- avalé par le roman, devenant, lecteur, l'acteur primordial de la fresque. Pendant ses trois jours d'arrêt, sans rien en dire à sa mère, replaçant avec précaution le roman là où il l'avait trouvé sur l'étagère, il dévora -Le Docteur Jivago- En le refermant, il se demanda pourquoi, au juste, on le censurait en U.R.S.S. Khrouchtchev, paraît-il, une fois destitué et après avoir enfin lu le livre, ne se demanda pas autre chose. (p. 61)
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Ce livre séminal -printed in the United States of America-, que Katouchkov lit sans se presser, est sorti des presses new-yorkaises en 1952. Il a mis plus de neuf ans à parvenir entre les mains du censeur, et son périple mérite à lui seul un roman. Ainsi Katouchkov en savoure -t-il chaque mot, en palpe-t-il chaque phrase, en soupèse t-il chaque chapitre - ici appelé "Note". Il prolonge le plaisir parce qu'il prolonge la transgression, le danger. Et dans ce danger, il est lié à sa mère. Olga Katouchka ignore qu'il a lu son - Docteur Jivago- Mais elle est dangereuse, comme lui, parce que portée par l'insatiable curiosité de l'esprit, par l'ardeur farouche de l'intelligence qui ne sait pas trouver le repos. Pour Olga Katouchkova, pour Vladimir Katouchkovv, pour des millions de Soviétiques, les années Khrouchtchev devaient rester comme un âge d'or relatif (...) Et ce court âge d'or suffit à semer le germe de l'impertinence. (p. 83)
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L'information est un pouvoir . Les états totalitaires, mieux que les autres, l'ont toujours compris; (p. 142)
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A cette époque moderne où personne ne lisait plus, censeurs y compris, l'opiniâtreté de Katouchkov à lire de bout en bout les manuscrits qui lui étaient soumis, à ne pas décoller l'arrière-train de son siège tant que la lecture d'une ligne, d'un paragraphe ou d'un chapitre n'était pas terminée, lui avait valu le sobriquet fleuri de "Sueur de cul!". Et comme tout en U.R.S.S. finissait par se voir désigner par son acronyme, on ne l'appela bientôt plus autrement que par S.D.C. Mais la phonétique en étant décidément tentante : on finit par s'accorder sur S.D.Q.

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Vladimir Sergueïevitch conduisait solitaire son coeur et sa raison sur une route de campagne dénuée d'éclairage, que nul panneau ne jalonnait. Et la lecture clandestine des samizdats, -tamizdat- et autre écrits réprouvés ne lui avait pas servi à se forger une opinion. Elle n'avait fait que confirmer celle-ci. "Si vous détruisez les statues, préservez les socles. Ils peuvent toujours servir ", écrivit Jerzy Lec. Vladimir Katouchkhov n'était plus très sûr de ce qu'il avait fait de son socle. (p; 260)
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Agraféna Kojoukhova, parce qu'elle aimait les meurtrissures dignes de ses poèmes, admirait son intégrité, voyait en elle l'incarnation de la femme courageuse et fière. (...) Katouchkov, parce que avec Akmatova disparaissait une figure littéraire incontournable, sans égale, un bout d'histoire avec lequel il avait toujours vécu- une sorte de tante éloignée, considérée comme un peu folle, à la gentillesse empruntée. Mais la mort d'Anna Akhmatova surtout le toucha parce qu'à travers elle il entrevit celle de sa mère. (p. 201)
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(...) l'être humain que fut le censeur, visiteur d'un zoo dont les loquets des cages auraient été relevés dans l'intention de nuire- l'environnement très hiérarchisé (...) projetait le censeur dans une course en sac absurde. Et dont il pouvait, en cas de défaite, payer le prix fort : du blâme à la perte d'emploi jusqu'à légalement, le goulag. Lorsque Katouchkov débute au GlavLit, pour reprendre les mots d'Ossip Mandelstam, poète révéré, mort en camp de transit près de Vladivostok, on ne respecte plus les écrivains dissidents : car on ne les exécute plus. Mais on les isole, on les appauvrit. On les exile. (p. 39)
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Mais il apparaissait que des dactylos aux administrateurs, des secrétaires aux éditeurs politiques de littératures ruse (dont il faisait partie) et étrangère, peu se souciaient de lire, et encore moins de contrôler la production littéraire. Pour leur rendre justice : la production littéraire soviétique vacillait comme une flamme que l'on soumettait trop souvent au vide d'une cloche renversée. (p. 23)
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Plus il lisait de samizdats, et plus Katouchkov aimait cela. Pour une raison simple : ils le faisaient rire. D'un rire un peu cruel, dirigé contre le monde, mais surtout contre soi- comme quand on rencontre un réverbère parce qu'on a suivi du regard une femme. D'un rire empoisonné, parce qu'il vous forçait à vous regarder dans la glace. Et à ne plus vous raconter d'histoires, ni à prendre "tout ça" très au sérieux. Il ne reprochait donc plus à Agraféna ses lectures. Il les guettait même avec impatience, ces précieux feuillets de toutes sortes, bientôt plus beaux à ses yeux que toutes les bibliothèques reliées d'U.R.S.S. ( p. 202)
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... Pour des millions de soviétiques, les années Khrouchtchev devaient rester comme un âge d'or relatif, coincé entre les tenailles terrifiantes et arbitraires du stalinisme et les années de plomb autarciques de Brejnev. Et ce court âge d'or suffit à semer le germe de l'impertinence. À lever une génération de malappris, qui iraient peupler les rangs de la dissidence.
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