C'est toujours une entreprise ardue que d'établir, de manière irréfutable, l'authenticité d'une œuvre d'art, sauf dans les cas, relativement rares, où la provenance de l'œuvre même s'avère détaillée et certifiée. Ainsi, c'est presque toujours le goût et l'opinion subjective de l'expert qui établissent si un tableau doit figurer parmi les chefs-d’œuvre d'un musée, ou moisir dans une réserve pour l'éternité, s’il vaut la somme considérable qu’un collectionneur est disposé à payer, ou s’il faut le considérer comme une croûte sans valeur, Ce caractère arbitraire, et inévitable du jugement critique peut alimenter une spirale perverse. Les faussaires - pour des raisons évidentes - ne revendiquent jamais, en général, les faux qu’ils produisent. Si un expert de renom établit, par exemple, qu’une peinture discutable est tout de même un Vermeer (histoire de rester dans le sujet) il est difficilement démenti par un autre expert, même si ce dernier est aussi renommé que lui. Son confrère pourra exprimer une opinion diamétralement opposée, mais ne reviendra pas sur l'attribution du tableau. Ainsi, si un musée important expose un nouveau Vermeer, cette peinture - même si elle ne l'est absolument pas - devient automatiquement, et dans tous les sens, un authentique Vermeer.
La polémique entre Coremans et Decoen servit en tout cas à démontrer ,de manière lumineuse,que dans le domaine de l'art,il n'existe aucune certitude,même lorsqu'il d'étudier les résultats techniques des analyses de laboratoire.
Toutefois,si Vermer fascinait Proust à ce point,c'est parce qu'il restait l'un des peintres les plus énigmatiques ,les plus ambigus et les plus hermétiques de toute l'histoire de l'art.
En ce qui concerne les pigments ,VM obsédé par la perfection, se trouva face à un autre problème épineux. Les pigments disponibles dans le commerce étaient tous synthétiques: il fallait donc essayer de se procurer les matériaux bruts utilisés par Vermeer ,puis les traiter suivant les mêmes méthodes que le maître de Delft.
Pendant longtemps ,il n'avait pas su comment réagir devant l'hostilité universelle, puis, très lentement mais inexorablement,cette idée ,aussi sournoise que fascinante, folle et diabolique, avait éclos en lui.Il porterait un coup d'une audace incroyable aux conventions sur lesquelles reposait tout le monde de l'art, un milieu gluant et hypocrite ,qu'il duperait avec une férocité raffinée, en peignant un faux impossible à distinguer d'un chef-d'oeuvre d'un des plus grands maîtres du XVII è siècle.
Il haïssait de plus en plus viscéralement l'art moderne ,qu'il considérait comme vide de tout contenu,ennemi de la forme et fruit d'un narcissisme infantile de l'artiste.
Magnifique histoire vraie, et si vous aimez la peinture un réel plasir!!