Bergström et Olofsson dirigeaient les recherches, lançant des ordres aux agents de police qui étaient soit au téléphone, soit le nez collé à leur écran d'ordinateur. La requête de leurs supérieurs : trouver des personnes liées au nazisme ou à la Seconde Guerre mondiale qui vivaient ou possédaient un pied-à-terre dans la région.
- Comme si c'était facile..., se plaignit une agente à son collègue. Tu crois vraiment que les sympathisants nazis portent leur brassard comme un sac à main ?
Il avait l'impression de se battre avec l'Hydre de Lerne : pour chaque meurtrier mis derrière les barreaux, il en découvrait deux autres encore plus monstrueux.
Malgré les compromis, les disputes et les blessures, certains préfèrent tout de même dire « nous »
Elle refusait de croire que le conformisme expliquait la cruauté des SS
Il aurait bien sûr préféré que le petit garçon soit encore là où il l'a laissé, paisible et sage, mais contempler sa sépulture délimitée par la bande blanc et bleu de la police l'excite terriblement. Sa tombe ressemble à une scène. Une scène grandiose avec des arbres fourchus qui se donnent l'accolade comme pour mieux griffer le ciel et le sol. Une couronne d'épines pour son petit prince déchu.
Olofsson devait l'admettre : le seul truc qu’il connaissait sur les camps, il le devait à La Liste de Schindler. Il pensait encore à la scène du balcon avec Ralph Fiennes. Le personnage incarné par Fiennes avait vraiment existé. Un taré pareil qui tirait les prisonniers comme des lapins en fumant une cigarette, c'était proprement incroyable, non ? Hitler avait invité tous les psychopathes du pays à tuer quiconque n’était pas aryen comme on écrase des fourmis. De gros, gros malades, ces SS. Des escadrons de serial killers à qui on avait donné le droit de tuer à volonté. L'œuvre de Hitler. Une sale page de l’Histoire.
Un de ses camarades de block, celui qui avait avalé son alliance lors de l'inspection d 'entrée et la récupérait inlassablement dans ses excréments, avait parlé de « déshumanisation des prisonniers », Erich avait trouvé le mot bien pudique. C’était comme identifier une maladie en en ignorant les symptômes. Ils n’étaient pas seulement déshumanisés, ils étaient assoiffés, affamés, exploités, torturés, avilis. Buchenwald, c’était une douloureuse étreinte avec la Mort qui n'en finissait pas. Dans chaque action, chaque tâche, à chaque pas.
Pourtant, Erich n'avait pas encore connu le froid. Le vent qui balayait le camp, « le souffle du diable », était aussi mortel que le Luger du SS, avait assuré un Polonais au torse rongé d'ulcères. Lorsqu'il évoquait l'hiver, ce gars pleurait. Il pleurait ses camarades gelés sur le sol qu'il avait dû décrocher à la pelle.
La profileuse sirotait sa Guinness comme un Bordeaux grand cru.
- Le block 46, c'est l'antichambre de la mort, intervient Michal, qui venait de quitter la table.
Ceux qui entrent n'en sortent pas.
-Je ne sais pas comment vont les vôtres après tant d’années, Pearce mais elle a broyé les miennes en cinq minutes. Bon courage, et tenez-moi au courant.