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Critique de NMTB


Il s'agit d'un livre sur-réaliste ou au réalisme outré. le style est brutal, les actions violentes, sexuelles, poisseuses.
Les références au réel sont limpides, dès les premières lignes on reconnait derrière la ville d'Ecbatane la situation de la France pendant l'occupation allemande et la chronologie suit, de loin, les grandes lignes des vingt années suivantes de l'histoire de France et de la guerre d'Algérie, dont la capitale est appelée Inaménas ; l'Allemagne est elle-même surnommée « le Septentrion », l'Angleterre « Buxtehude », le capitaine qui s'y est exilé est bien sûr De Gaulle, le « vieux chef » Pétain, etc. L'unité du temps est celle du vingtième siècle avec des chars, des blue-jeans, du linoléum, des équipements modernes, celle de l'espace ressemble plus au monde méditerranéen de l'antiquité avec ses cités, ses îles, ses colonies. Mais ce n'est pas un roman historique, toutes ces références servent uniquement de cadre, la part imaginative est grande.
L'essentiel se concentre dans le côtoiement constant de la guerre et du sexe, du sperme et du sang : l'union incestueuse d'Aphrodite et d'Arès pour le dire d'une manière mythologique, dont le fruit est ce cher Eros. L'érotisme de Guyotat n'est pas lisse, propre et sentimental, tout au contraire, il a assimilé Sade, sans être aussi maniaque et avec quelques différences. Les rapports de dominés et dominants sont peut-être moins systématisés que dans les oeuvres du marquis mais ils sont prépondérants, il y a des tortures et des viols. Toutefois, j'ai eu l'impression que les personnages de Pierre Guyotat étaient moins excités par le Mal que ceux de Sade. On pourrait dire que c'est du Sade passé à la moulinette hégélienne dans une dialectique du maître et de l'esclave ; Ecbatane semble en être l'allégorie entre l'occupation et la colonisation, mais les rebelles d'Inaménas sont aussi dans cette dialectique. D'une manière générale, tout humain qui ne dispose pas de son corps est esclave, avant tout un esclave sexuel : la prostitution est le paradigme de l'esclavage.
Ce livre marche également comme les fictions de Sade ou Lautréamont. Même s'il y a un semblant d'histoire (j'avoue, elle ne m'a pas du tout intéressé, je n'y ai rien capté et je n'avais même pas la curiosité d'en savoir plus), ce sont certaines images qui accaparent l'attention. Dans le premier chant par exemple, on trouve une scène où une vieille femme engraisse des rats avec des cadavres d'enfants : Lautréamont ne l'aurait pas reniée, tout à fait cauchemardesque. Mais c'est surtout les scènes de sexe qui s'enchaînent et tout le monde couche avec tout le monde : sans parler de la violence, on trouve de la zoophilie, de la nécrophilie et beaucoup d'enfants (ils tiennent un rôle très important tout au long du livre) sont l'objet de viols et de prostitution, il est même question d'un bébé servant de jouet sexuel, mais dans ce cas-là Pierre Guyotat ne s'est pas risqué à une longue description. Et, vous, maintenant, si vous avez l'intention de le lire, vous savez ce que vous risquez.
La putréfaction, la décomposition des corps, est l'élément naturel dans lequel barbotent tous les personnages, dans une négation constante de l'Esprit.
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