La poétesse Eva Marzi a répondu au décalé et intimiste Questionnaire de Trousp, autant inspiré par celui de Proust que des questions de Bernard Pivot.
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Chapitres:
0:00 Intro: Lecture de poèmes (Nuit scribe)
1:18 Dans quel contexte avez-vous écrit votre premier poème?
2:13 Que pensez-vous de cette citation? «La poésie doit être faite par tous. Non par un.» Lautréamont
2:52 Que pensez-vous de cette citation? «Il n'y a plus de solitude là où est la poésie.» Charles Ferdinand Ramuz
4:09 Quel est votre poète ou votre poème favori?
5:00 À quoi sert la poésie?
6:30 Comment construit-on un poème?
9:14 Pourquoi écrivez-vous de la poésie?
11:19 Remerciements
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"J'ai reçu la vie comme une blessure et j'ai défendu au suicide de guérir la cicatrice."
[...] beau comme la rétractilité des serres des oiseaux rapaces ; ou encore, comme l'incertitude des mouvements musculaires dans les plaies des parties molles de la région cervicale postérieure ; ou plutôt, comme ce piège à rats perpétuel, toujours retendu par l'animal pris, qui peut prendre seul des rongeurs indéfiniment, et fonctionner même caché sous la paille ; et surtout, comme la rencontre fortuite sur une table de dissection d'une machine à coudre et d'un parapluie !
Les Chants de Maldoror, chant VI, dans Œuvres complètes, Librairie José Corti, 1969, p. 327.
Le doute est un hommage rendu à l’espoir.
L’homme s’est cru beau dans tous les siècles. Moi, je suppose plutôt que l’homme ne croit à sa beauté que par amour-propre ; mais qu’il n’est pas beau réellement et qu’il s’en doute ; car pourquoi regarde-t-il la figure de son semblable avec tant de mépris ?
Race stupide et idiote ! Tu te repentiras de te conduire ainsi. C’est moi qui te le dis. Tu t’en repentiras, va ! tu t’en repentiras. Ma poésie ne consistera qu’à attaquer, par tous les moyens, l’homme, cette bête fauve, et le Créateur, qui n’aurait pas dû engendrer une pareille vermine. Les volumes s’entasserons sur les volumes, jusqu’à la fin de ma vie, et, cependant, l’on n’y verra que cette seule idée, toujours présente à ma conscience !

"Pour construire mécaniquement la cervelle d'un conte
somnifère, il ne suffit pas de disséquer des bêtises et
abrutir puissamment à doses renouvelées l'intelligence du
lecteur, de manière à rendre ses facultés paralytiques pour
le reste de sa vie, par la loi infaillible de la fatigue; il
faut, en outre, avec du bon fluide magnétique, le mettre
ingénieusement dans l'impossibilité somnambulique de se
mouvoir, en le forçant à obscurcir ses yeux contre son
naturel par la fixité des vôtres. Je veux dire, afin de ne
pas me faire mieux comprendre, mais seulement pour
développer ma pensée qui intéresse et agace en même temps
par une harmonie des plus pénétrantes, que je ne crois pas
qu'il soit nécessaire, pour arriver au but que l'on se
propose, d'inventer une poésie tout à fait en dehors de la
marche ordinaire de la nature, et dont le souffle pernicieux
semble bouleverser même les vérités absolues; mais, amener
un pareil résultat (conforme, du reste, aux règles de
l'esthétique, si l'on y réfléchit bien), cela n'est pas
aussi facile qu'on le pense: voilà ce que je voulais dire.
C'est pourquoi je ferai tous mes efforts pour y parvenir! Si
la mort arrête la maigreur fantastique des deux bras longs
de mes épaules, employés à l'écrasement lugubre de mon gypse
littéraire, je veux au moins que le lecteur en deuil puisse
se dire: « Il faut lui rendre justice. Il m'a beaucoup
crétinisé. Que n'aurait-il pas fait, s'il eût pu vivre
davantage! c'est le meilleur professeur d'hypnotisme que je
connaisse! » On gravera ces quelques mots touchants sur le
marbre de ma tombe, et mes mânes seront satisfaits!"
La grande famille universelle des humains est une utopie digne de la logique la plus médiocre.
Vaste océan aux vagues de cristal…
Tu es un immense bleu appliqué au corps de la Terre.
J'ai vu, pendant toute ma vie, sans en excepter un seul, les hommes, aux épaules étroites, faire des actes stupides et nombreux, abrutir leurs semblables, et pervertir les âmes par tous les moyens. Ils appellent les motifs de leurs actions : la gloire. En voyant ces spectacles, j'ai voulu rire comme les autres ; mais cela, étrange imitation, était impossible.

« Hélas ! Qu’est-ce donc que le bien et le mal ! Est-ce une même chose par laquelle nous témoignons avec rage notre impuissance, et la passion d’atteindre à l’infini par les moyens même les plus insensés ? Ou bien sont-ce deux choses différentes ? Oui… que ce soit plutôt une même chose… car sinon que deviendrais-je au jour du jugement ! Adolescent, pardonne-moi ; c’est celui qui est devant ta figure noble et sacrée, qui a brisé tes os et déchiré les chairs qui pendent à différents endroits de ton corps. Est-ce un délire de ma raison malade, est-ce un instinct secret qui ne dépend pas de mes raisonnements, pareil à celui de l’aigle déchirant sa proie, qui m’a poussé à commettre ce crime ; et pourtant, autant que ma victime, je souffrais ! Adolescent, pardonne-moi. Une fois sorti de cette vie passagère, je veux que nous soyons entrelacés pendant l’éternité ; ne former qu’un seul être, ma bouche collée à ta bouche. Même, de cette manière, ma punition ne sera pas complète. Alors, tu me déchireras, sans jamais t’arrêter, avec les dents et les ongles à la fois. Je parerai mon corps de guirlandes embaumées, pour cet holocauste expiatoire ; et nous souffrirons tous les deux, moi, d’être déchiré, toi, de me déchirer… ma bouche collée à ta bouche. O adolescent, aux cheveux blonds, aux yeux si doux, feras-tu ce que je te conseille ? Malgré toi, je veux que tu le fasses, et tu rendras heureuse ma conscience. » Après avoir parlé ainsi, en même temps tu auras fait le mal à un être humain, et tu seras aimé du même être : c’est le bonheur le plus grand qu’on puisse concevoir. Plus tard, tu pourras le mettre à l’hôpital ; car le perclus ne pourra pas gagner sa vie. On t’appellera bon, et les couronnes de laurier et les médailles d’or cacheront tes pieds nus, épars sur la grande tombe, à la vieille figure. O toi dont je ne veux pas écrire le nom sur cette page qui consacre la sainteté du crime, je sais que ton pardon fut immense comme l’univers. Mais, moi, j’existe encore !