Il n'y aura pas de révolution en Allemagne, à cause du panneau "Interdit de marcher sur la pelouse ".
Lénine.
Hitler et ses partisans, encouragés par les succès de la guerre éclair, prévoyaient de mettre rapidement l'Union Soviétique sous leur joug. Seulement, Hitler ne savait pas que toute l'horreur et toute la misère que la Wehrmacht voulait lui infliger en l'envahissant étaient son lot quotidien depuis longtemps. Que la terreur soviétique des dernières années avait déjà bien préparé les gens à la terreur que voulait semer le Führer.
Ils se prêtaient mutuellement le bonheur. Ils se prêtaient mutuellement le présent et s'offraient des souvenirs futurs.
Andro se consolait dans les livres, qui semblaient être un pont avec sa mère. Elle lui avait toujours fait la lecture, lui parlant de la littérature comme d'une " ancre dans la mer noire de la vie". Il voulait se sentir proche d'elle, il voulait qu'elle sache qu'il ne la décevrait pas et se mit à lire de façon obsessionnelle.
Comme tout autre pays totalitaire, la Russie souffre depuis des siècles de complexe d'infériorité.
La guerre avait expulsé tous les rêves de son corps et de sa tête, les avait pulvérisés, anéantis. p.358
La langue anglaise fleurait bon l'air marin et un crépuscule d'automne sur une mer du Nord, les cabanes de pêcheurs et la pluie. Le français, que je n'avais jamais appris, devait fondre sur la langue comme une gelée d'abricots et avoir un goût de vin blanc sec. Le russe évoquait des étendues sans fin, des champs de blé, la solitude et les illusions. Mais le géorgien avait quelque chose de poussiéreux, de plein, presque trop plein, et quelquefois aussi un goût de jeu de cache-cache en forêt. L'allemand que Severin m'apprenait avait au début un goût ferreux et amer, qui prit ensuite des saveurs d'algues et de mousse vert sombre, avant de redevenir plus sévère mais agréable, et plus tard encore, beaucoup plus tard, l'allemand eut le goût de châtaignes mûres et d'altitude, d'altitudes vertigineuses.
Revenir au temps où l'on naspirait pas à remonter le temps parce que tout était un avenir.
La neutralité était une illusion.
Autrefois, quand j'avais ton âge, Brilka, je me suis souvent demandé ce qu'il en serait si, au fil du temps, la mémoire collective du monde avait retenu et oublié toutes sortes d'autres choses. Si toutes les guerres, tous ces innombrables rois, les souverains, les chefs et les combattants étaient tombés dans l'oubli et qu'il n'était resté dans les livres que des êtres humains qui avaient construit une maison de leurs mains, cultivé un jardin, découvert une girafe, décrit un nuage et chanté la nuque d'une femme ; je me suis demandé ce qui nous donne à croire que ceux dont le nom demeure sont meilleurs, plus intelligents et plus intéressants pour la seule raison qu'ils ont résisté au temps. Où sont les oubliés ?