Ronde chinoise des cerfs-volants
Des enfants joyeux font signe,
Courant, lançant leurs cerfs-volants.
Tu vois, petit frère, le mien est plus grand !
Mais, petite sœur, le mien va plus vite !
Va mon cerf-volant, mon cœur pour bagage,
Entre deux nuages, entre deux courants,
Va de fleuve en fleuve et de ville en ville,
Va, mon papillon, va, ma libellule,
Va, mon fier dragon, mon cerisier blanc.
Jacqueline Held
L’océan d’ici
Quand je touche l’eau
De l’océan Atlantique
J’effleure le sel
Qui a caressé d’autres mers
Qui ont touché d’autres continents.
Toutes les pluies communiquent.
L’Europe est comme une île
Et le monde une noix
Rempli d’eau.
Je jette au sel ma voix,
Il me répond : « Hello ! »
Je donne à la vague mon poème,
Elle me prend mon chapeau.
Je suis un enfant qui aime
Regarder fondre les bateaux.
Alain Serres
Petit-grain-de-riz
Ils m'appellent
Petit-grain-de-riz
J'ai la peau jaune ils disent
oui jaune comme la fleur
qui a bu tous les soleils de l'été
J'ai les yeux bridés ils disent
oui bridés comme ceux du chat
qui voit plus loin que la nuit
J'ai un chapeau pointu ils disent
oui pointu comme des mains jointes
pour faire bonjour merci et bienvenue
Je suis un enfant d'Asie ils disent
oui d'Asie ou de hasard
d'Asie ou pas
d'ici ou là
comme on est tous grands ou petits
un petit grain du grand bol de riz
Jean-Pierre Siméon
Cité
Six ans
Au quatorzième étage
A la lisière du silence
L’enfant
Sur la pointe des pieds
Habite un instant la lumière.
Et c’est dans le feu du regard
Que la feuille au bout du rameau
Devient la forêt qu’il espère.
Alain Boudet
Toto
Dis d’où viens Toto ?
Je viens par ma mère
De Quito et par mon père de Toronto.
J’ai sept frères
Et sœurs et un manteau
Plein de courants d’air
Comme la cordillère et les hauts plateaux
Mon père a une grande voiture vert eau
Et ma mère cette vielle photo
Où son père et sa mère
S’embrassent sur le bateau
Qui un hiver
Les conduisit de Quinto à Toronto.
Bernard Chambay
Le tapis indien
Il existe près de Jaipur
Un tigre bleu
Qui dort sur un tapis à poil court.
Quand on lui marche sur la queue
Il ne crie pas « au secours ! au secours ! »
Parce que la jeune fille qui l’a tissé
Ne savait ni dire
Ni écrire
« au secours ! au secours ! »
Plaignons caressons
Ce tigre en pure laine de mouton
Sur lequel on s’essuie les pieds
Sans qu’il ne puisse protester.
Alain Serres