Éclairant, érudit et passionnant « L'assassinat de
Joseph Kessel » est une mise en abîme implacable. Il remet d'équerre la vérité. le ton est donné dès la première page,
«
Kessel avait rencontré un vif succès en publiant une nouvelle intitulée «
Makhno et sa juive ». Recopiant de larges passages d'un mémoire édité à Berlin par l'ancien colonel blanc Guerassimenko,
Kessel, juif né en Argentine, mais d'origine russe, y dépeignait Makhno en monstre assoiffé de sang.
Décrit comme un anarchiste révolutionnaire, ukrainien, communiste libertaire, avide de sang et responsable de tous les pogroms. Mais voilà,
Nestor Makhno fuit la Russie, s'installe en France à Paris. Il travaille et va régler ses comptes avec
Joseph Kessel.
« Les Blancs et les Rouges,
Kessel et Barbusse s'alliaient comme la carpe et le lapin non pour abattre un homme, qui était déjà à terre, mais pour souiller définitivement la seule chose qui lui restait encore, sa légende. »
Le récit est précis, magnifique de par son sérieux et sa volonté d'honneur. Makhno a de nouveau les ailes brisées. Cette nouvelle de
Kessel est plus puissante que les armes. Destructrice elle foudroie
Nestor Makhno. Son aura écartelée entre les lignes de «
Makhno et sa juive ». Il cherche à se venger. le hasard fait bien les choses.
Kessel et lui-même fréquentent les bas-fonds de Paris. Il va le revoir et enclencher une filature, un pistolet caché dans sa poche.
« N'ayant qu'un très faible langage littéraire – il n'avait lu qu'un peu des Frères Karamazov à Boutyrka -, l'anarchiste avait un don infaillible pour repérer les exaltés, les faussaires pathologiques et les mythomanes en tout genre, bref, les écrivains. »
« Il en faudrait tout de même plus pour me surprendre, déclara soudain
Kessel avec un air de défi. J'ai fait le tour du monde à vingt ans.
« L'assassinat de
Joseph Kessel » rend hommage à
Nestor Makhno. La réputation de ce combattant noircie par la plume de
Joseph Kessel. Faut-il que la littérature soit fatale, lâche et faussée pour arriver à ses fins ? Abolir l'emblème même d'un homme, victime d'un écrivain qui s'est imaginé en justicier. La guerre froide des mots assassins. Cette nouvelle est une balle en plein front pour
Nestor Makhno. Ce récit a plusieurs degrés de lecture. Il est d'un niveau intellectuel de haute voltige. Les historiens, les inconditionnels de
Kessel, les combattants pour la justice, les idoles de
Nestor Makhno, le lecteur lambda, tous vont découvrir un texte de renom certifié. le doigt pointé là où ça fait mal, son éveil à l'exactitude et sa droiture.
« La parodie du plagiat, calomnie et diffamation n'aura pas lieu. C'eût été le procès de la littérature elle-même ».
Makhno : « Il avait des faux-airs du personnage de vagabond immortalisé par
Charlie Chaplin. »
Ce récit-essai est original de par le thème porteur et une écriture aérienne. C'est une conférence à ciel ouvert et un ouvrage pour tous les étudiants en littérature. Apprendre à toujours se méfier comme le disait
Prosper Mérimée. Publié par les majeures Éditions
Serge Safran éditeur.