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Critique de SebastienFritsch


Après avoir lu le Dahlia Noir, de James Ellroy, j'ai été fortement intrigué de découvrir, dans une étagère de la bibliothèque municipale où j'ai mes habitudes, un volume intitulé L'Affaire du Dahlia noir. Un plagiaire ? Un jeune écrivain désireux de surfer sur la célébrité d'Ellroy ? Non, Steve Hodel n'est rien de tout cela : il est un ancien flic du Los Angeles Police Department, à la retraite depuis plus de vingt ans. Et son livre n'est pas un remake de celui d'Ellroy ; ce n'est d'ailleurs pas un roman : là où Ellroy bâtissait une intrigue autour d'un fait divers ignoble et créait les personnages qui lui permettaient de dépeindre le Los Angeles des années quarante, Hodel, lui, s'en tient à la réalité des faits. Et, tandis qu'Ellroy était obligé d'inventer une solution à un meurtre jamais résolu (et qu'il créait, par la même occasion, les conditions pour expliquer l'impossibilité de le résoudre), Hodel nous propose tout autre chose : la vraie solution, c'est-à-dire le nom de l'assassin de Betty Short, alias le Dahlia noir, et les raisons pour lesquelles cette solution, connue à l'époque, a été étouffée par le LAPD.
Mais pourquoi Steve Hodel ne s'est intéressé à cette affaire qu'au début des années 2000 ? Cela s'explique par le fait que sa curiosité sur le sujet n'a été attisée qu'après le décès de son père, le Docteur George Hodel, survenu en 1999. Un homme au destin extraordinaire, pianiste prodige à 9 ans, qui a bourlingué en Chine et aux Philippines, qui a connu beaucoup de grands noms d'Hollywood (il était très proche de John Huston et de Man Ray), qui a été marié de nombreuses fois, a multiplié les conquêtes extraconjugales, a été chauffeur de taxi, journaliste, homme d'affaire, photographe amateur, et, surtout, médecin, un richissime médecin, d'abord chirurgien, puis psychiatre, et qui fut très haut placé dans les services médicaux de la Cité des Anges.
A la mort de cet homme, son fils Steve découvre dans ses affaires un petit album photo dans lequel apparaissent diverses personnes proches du défunt : ses enfants, quelques unes de ses ex... et une jeune femme, photographiée dans des poses lascives, et qui ressemble fort à Elisabeth Short. Intrigué, Steve Hodel va se lancer dans des investigations qui vont le mener à cette conclusion : l'assassin du Dahlia Noir était son père, George Hodel ; et cette femme n'est pas la seule qu'il ait tuée.
Analyses graphologiques, recoupements de multiples témoignages, coïncidences entre les meurtres et ressemblances avec des oeuvres de Man Ray, que le docteur Hodel admirait, l'auteur s'appuie sur des éléments très troublants, il faut le reconnaître, pour justifier cette conclusion. Par ailleurs, son livre est assez bien construit (il reconnait, à la fin, avoir été aidé pour cela... mais on s'en serait douté). On en ressort convaincu, mais avec quand même quelques interrogations qui viennent, malgré tout, nuancer cette conviction : des portraits robots criant de ressemblance avec le docteur Hodel... mais sans moustache (alors que celle qu'on voit sur la couverture du livre est quand même assez caractéristique), une insistance sur des détails qui semblent secondaires (notamment la présence près des lieux de plusieurs crimes d'une berline noire... quoi de plus banal ?) ; ou encore la façon avec laquelle Steve Hodel s'appesantit sur les raisons qui ont poussé le LAPD à étouffer l'affaire à l'époque, raisons qui sont exposées avec de multiples conditionnels dont on attend toujours confirmation. Par ailleurs, cette partie-là du livre, à l'inverse de l'enquête elle-même, tourne un peu en rond, comme si Steve Hodel pensait pouvoir convaincre en rabâchant.
Quoi qu'il en soit, ce livre, sans être de la grande littérature, reste tout de même prenant : même si on connait dès le départ le nom du coupable, on veut savoir si la démonstration est sérieuse et, surtout, si elle obtient, finalement, des confirmations issues du dossier lui-même (mais là, je ne peux rien dire, pour garder un peu de suspense). Par ailleurs, ce texte est également fascinant par l'image qu'il donne d'un monde étrange dans lequel raffinement, élégance, plaisirs, perversité, cruauté, étaient les ingrédients d'un mode de vie réservé à une élite riche et cultivée. Mais peut-être cela n'est-il pas propre au LA d'après-guerre ?
Lien : http://sebastienfritsch.cana..
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