Embrasez-moi

Elle sent qu’elle est au bord de se désagréger. Cela monte du ventre, sous la friction incessante, se répand sur les cotés, jusqu’au bout des doigts envahis de picotements. Elle aimerait pouvoir se retenir, comme d’une envie de pisser. Au milieu de tous ses sentiments, la honte de s’abandonner reste le plus vaillant, réfugiée dans la dernière tour, une épée à la main, prête à défendre chèrement son existence.

L’amour, comme le crime, adhère-t-il aux murs ? Les nouveaux occupants, inconscients et sensibles, auraient-ils respiré son parfum, avant de convertir la pièce en une chambre d’enfant ?

Car Charles aurait voulu s’emparer de tout : les épaules de porteuse d’eau ; l’orbe parfait des seins lourds, aux larges aréoles grenues, rose bonbon ; le ventre légèrement proéminent sous lequel un lopin de poils noirs n’avaient pas tout à fait fini de repousser ; les cuisses dont des ombres sculptaient les massif quadriceps.

La pluie dégoulinait sans interruption le long de la fenêtre qu'un balcon luisant, au delà, semblait vouloir escalader comme un chat. Le plaisir de Brigit se réfugiait dans ses humeurs, larmes et, plus bas, huile de karité, onguent indien, épice suave produite au creuset de sa peau d'amande

Au dehors, le boulevard s’endormait, la respiration devenue tranquille, ses rêves uniquement traversés par un piéton solitaire, une voiture de police, un taxi.