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Critique de Chouchane


Platon a commenté l'Odyssée et des millions d'autres après lui et me voilà, moi, anonyme du XXI°siècle, devant ma feuille à vouloir dire le tourbillon qui m'a emportée sur le « dos énorme des eaux », car l'écriture homérique ne laisse personne sur le rivage. Mais, il faut commencer par le début car début il y a : l'école communale. C'est là que l'on rencontre Ulysse pour le première fois parmi des extraits choisis, des dessins, des chromos délavés, des films des années 70 avec la très belle Irène Papas en Pénélope… les années passent et sans avoir vraiment lu l'Odyssée on a l'impression de tout savoir. Chemine alors le sentiment que lire Homère sera différent mais en sera-t-on capable ? sera-t-on à même de saisir la beauté de 15 000 vers, de suivre XXIV chants ? Ce « plus grand chef d'oeuvre de la littérature » n'est-il pas réservé à l'élite helléniste ? ne doit-on pas se contenter d'extraits choisis ? Je peux vous le dire maintenant : non ! l'Odyssée c'est une expérience monumentale, captivant, poétique (évidemment), époustouflant, on entre dedans sans effraction la porte s'ouvre toute grand dès le premier vers « O muse, conte-moi l'aventure de l'Inventif ».
L'Odyssée c'est la source de tout notre imaginaire occidental, Pallas Athéna la déesse qui touche de sa baguette d'or (comme les fées) Ulysse, lequel se couvre d'une vieille peau de cerf pour n'être plus reconnaissable (comme peau d'âne), Pénélope qui attend avec ferveur 20 ans son époux (les romantiques allemands), Ulysse qui descendu aux enfers donne son sang aux morts pour réveiller leur vigueur (un peu de vampire là dedans…), c'est à l'avenant, la littérature occidentale ne serait pas ce qu'elle est et nous non plus si Homère n'avait pas écrit cela il y a 2700 ans !
La langue homérique n'est pas seulement poétique elle possède une puissance d'évocation qui provoque une succession d'images éblouissantes dans l'esprit, la mer déchaînée, le geyser de Charybe qui avale et recrache en morceaux les navires et les hommes. Epuisé de ces tempêtes, Ulysse qui s'endort sur la couche d'un « berceau d'oliviers emmêlés », les feuilles sèches constituent épais matelas et couverture protectrice, on entend le crissement des feuilles, on sent l'odeur de la végétation méditerranéenne, on écoute la mer. La nature est propre, des troupeaux gras paissent paisiblement dans les vastes prairies des plaines grecques. C'est vraiment beau. Les dieux sont accessibles puissants mais négociables. La violente est présente, les morts sont brutales, les vengeances terribles, les Dieux nous paraissent souvent injustes mais n'est pas ainsi que nous percevons la vie parfois tellement injuste et absurde à l'image des Dieux. Avant de conclure, je voudrais insister sur la qualité de la traduction, j'ai feuilleté plusieurs Odyssée, une mauvaise ou trop ancienne et vieillotte traduction peut anéantir toute cette magie. J'ai eu la chance de lire celle de Jaccottet, elle est parfaite pour nos esprits et notre siècle. Lire Homère c'est se relier à tous ceux qui avant nous l'on lu, c'est s'inscrire dans le monde et prendre sa place entre les humains vivants ou morts, peu importe.
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