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Critique de l-ourse-bibliophile


Dès les premières pages, j'ai été chamboulée par la poésie des descriptions. La rencontre avec Ursus et Homo fut juste sublime et m'apporta dès les premières pages cette réconfortante sensation de plonger à nouveau dans un roman d'exception.
Par la suite, chapitre après chapitre se déroule un ouvrage grandiose, parfois grandiloquent certes mais extraordinaire. Car, au-delà de l'intrigue résumée, avec Hugo, tout est prétexte à digressions qui viennent servir l'histoire. Ainsi, outre le fait qu'il prend son temps pour poser le cadre et développer ses personnages, il sublime également la nature et ses affres, ses beautés et ses violences tout en exaltant en parallèle l'intériorité des personnages, les émotions et les dilemmes qui les traversent. le récit s'ouvre sur les pièges de la mer, de la neige et de la nuit avant de raconter ceux – cruels et révoltants – des hommes. Oreilles bouchées et coeurs fermés.
Au coeur des injustices, des pauses, à l'instar de la rencontre poignante d'Ursus et des enfants Gwynplaine et Dea. Misanthropie bougonne immédiatement emplie de tendresse. Après le silence au milieu des éléments, un dialogue, un échange. Après la solitude, des âmes qui se trouvent et s'adoptent.
Ce quatuor est tout simplement magnifique. Autant j'avais bien souvent entendu parler de Gwynplaine et Dea, autant j'ai pu découvrir – et quelle rencontre ! – Ursus et Homo. S'ils sont souvent archétypes, ils sont aussi sincérité, poésie et émotion. La luminosité protectrice de Dea, les tirades d'Ursus et ses marmonnements attendris, la présence réconfortante d'Homo, Gwynplaine tiraillé, tenté, furieux, majestueux…

Retrouver la verve d'Hugo fut à nouveau un plaisir immense et jamais démenti. Sa plume, précise, foisonnante, éclatante, érudite, recherche constante d'un vocabulaire parfait. Ses portraits tout de vie, d'images, de fureur et d'émotions. Ses parenthèses, ses développements d'une richesse inouïe. Son intelligence, qui va bien au-delà des références historiques, mythologiques, bibliques que je ne peux prétendre toutes saisir. Ses apostrophes au lecteur. Ses touches d'ironie qui critiquent une société, une injustice, ce cynisme s'opposant aux personnages romantiques et idéalistes.

Hugo, à travers ses protagonistes, dénonce la roulette du pouvoir, la justice dévoyée, la peur des petits constamment écrasés, l'oisiveté immorale de l'aristocratie, le gouffre entre ceux qui ont tous et ceux qui ne sont rien. En ces temps d'instabilité politique où l'Angleterre oscille entre république et monarchie, Gwynplaine affute son esprit critique, constate les inégalités et la toute-puissance écoeurante des lords jusqu'à cet aboutissement : un discours déchirant et éclairant, criant de vérité. de là un drame : l'impossibilité pour cette voix sensible, intelligente et raisonnable de se faire entendre à travers son masque de chair.
À l'instar de Notre-Dame de Paris, Hugo interroge : qui sont les véritables monstres ? Question rhétorique, me direz-vous… Josiane et Barkilphedro – dont je ne dirai rien pour vous laisser le plaisir de la découverte – m'auront marquée à l'image d'un Javert ou d'un Frollo…

Certes, l'on se demanderait presque parfois si l'intrigue avance dans ce roman bavard et dense (où l'abondance de mots semble tenter de s'affranchir des frontières des mots et donner à ressentir le caractère vaporeux et fourmillant de la pensée), intimidant plaidoyer politique. Et pourtant, oui. Car cette histoire superbe est une plongée dans une société, dans les classes sociales qui dessinaient l'Angleterre des XVII-XVIIIe siècles ainsi que dans des destinées individuelles magnifiques. Une plongée dans la misère, l'inhumanité, le sordide et, malgré tout, l'espoir. Encore une fois, Hugo, perpétuel virtuose, m'a transportée et bouleversée, c'est un souffle puissant, à la fois magistral et déchirant. Je suis émerveillée et éblouie, que dire de plus.
Lien : https://oursebibliophile.wor..
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