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Citations sur Oeuvres poétiques : Anthologie (33)

Le poëte s’en va dans les champs ; il admire,
Il adore ; il écoute en lui-même une lyre ;
Et le voyant venir, les fleurs, toutes les fleurs,
Celles qui des rubis font pâlir les couleurs,
Celles qui des paons même éclipseraient les queues,
Les petites fleurs d’or, les petites fleurs bleues,
Prennent, pour l’accueillir agitant leurs bouquets,
De petits airs penchés ou de grands airs coquets,
Et, familièrement, car cela sied aux belles :
— Tiens ! c’est notre amoureux qui passe ! disent-elles.
Et, pleins de jour et d’ombre et de confuses voix,
Les grands arbres profonds qui vivent dans les bois,
Tous ces vieillards, les ifs, les tilleuls, les érables,
Les saules tout ridés, les chênes vénérables,
L’orme au branchage noir, de mousse appesanti,
Comme les ulémas quand paraît le muphti,
Lui font de grands saluts et courbent jusqu’à terre
Leurs têtes de feuillée et leurs barbes de lierre,
Contemplent de son front la sereine lueur,
Et murmurent tout bas : C’est lui ! c’est le rêveur !
(Les Roches, juin 1831)
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Le firmament est plein de la vaste clarté ;
Tout est joie, innocence, espoir, bonheur, bonté.
Le beau lac brille au fond du vallon qui le mure ;
Le champ sera fécond, la vigne sera mûre ;
Tout regorge de sève et de vie et de bruit,
De rameaux verts, d’azur frissonnant, d’eau qui luit,
Et de petits oiseaux qui se cherchent querelle.
Qu’a donc le papillon ? qu’a donc la sauterelle ?
La sauterelle a l’herbe, et le papillon l’air ;
Et tous deux ont avril, qui rit dans le ciel clair.
Un refrain joyeux sort de la nature entière ;
Chanson qui doucement monte et devient prière.
Le poussin court, l’enfant joue et danse, l’agneau
Saute, et, laissant tomber goutte à goutte son eau,
Le vieux antre, attendri, pleure comme un visage ;
Le vent lit à quelqu’un d’invisible un passage
Du poëme inouï de la création ;
L’oiseau parle au parfum ; la fleur parle au rayon ;
Les pins sur les étangs dressent leur verte ombelle ;
Les nids ont chaud. L’azur trouve la terre belle ;
Onde et sphère ; à la fois tous les climats flottants ;
Ici l’automne, ici l’été, là le printemps.
Ô coteaux ! ô sillons ! souffles, soupirs, haleines !
L’hosanna des forêts, des fleuves et des plaines,
S’élève gravement vers Dieu, père du jour ;
Et toutes les blancheurs sont des strophes d’amour ;
Le cygne dit : lumière ! et le lys dit : clémence !
Le ciel s’ouvre à ce chant comme une oreille immense.

Le soir vient ; et le globe à son tour s’éblouit,
Devient un œil énorme et regarde la nuit ;
Il savoure, éperdu, l’immensité sacrée,
La contemplation du splendide empyrée,
Les nuages de crêpe et d’argent, le zénith,
Qui, formidable, brille et flamboie et bénit,
Les constellations, ces hydres étoilées,
Les effluves du sombre et du profond, mêlées
À vos effusions, astres de diamant,
Et toute l’ombre avec tout le rayonnement !
L’infini tout entier d’extase se soulève.
Et, pendant ce temps-là, Satan, l’envieux, rêve.

(La Terrasse, avril 1840)
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LES VOIX INTÉRIEURES


À DES OISEAUX ENVOLÉS

Enfants ! ‒ Oh ! revenez ! Tout à l'heure, imprudent,[…]
Belle perte, en effet ! beau sujet de colère !
Une strophe, mal née au doux bruit de vos jeux,
Qui remuait les mots d'un vol trop orageux !
Une ode qui chargeait d'une rime gonflée
Sa stance paresseuse en marchant essoufflée !
De lourds alexandrins l'un sur l'autre enjambant
Comme des écoliers qui sortent de leur banc !
Un autre eût dit : ‒ Merci ! Vous ôtez une proie
Au feuilleton méchant qui bondissait de joie
Et d'avance poussait des rires infernaux
Dans l'antre qu'il se creuse au bas des grands journaux. ‒
Moi, je vous ai grondés. Tort grave et ridicule !
Nains charmants que n'eût pas voulu fâcher Hercule,
Moi, je vous ai fait peur. J'ai, rêveur triste et dur,
Reculé brusquement ma chaise jusqu'au mur,
Et, vous jetant ces noms dont l'envieux vous nomme,
J'ai dit : ‒ Allez-vous-en ! laissez-moi seul ! ‒ Pauvre homme !
Seul ! le beau résultat ! le beau triomphe ! seul !
Comme on oublie un mort roulé dans son linceul,
Vous m'avez laissé là, l'œil fixé sur ma porte,
Hautain, grave et puni. ‒ Mais vous, que vous importe !
Vous avez retrouvé dehors la liberté,
Le grand air, le beau parc, le gazon souhaité,
L'eau courante où l'on jette une herbe à l'aventure,
Le ciel bleu, le printemps, la sereine nature,
Ce livre des oiseaux et des bohémiens,
Ce poème de Dieu qui vaut mieux que les miens,
Où l'enfant peut cueillir la fleur, strophe vivante,
Sans qu'une grosse voix tout à coup l'épouvante !
Moi, je suis resté seul, toute joie ayant fui,
Seul avec ce pédant qu'on appelle l'ennui.
Car, depuis le matin assis dans l'antichambre,
Ce docteur, né dans Londre, un dimanche, en décembre,
Qui ne vous aime pas, ô mes pauvres petits,
Attendait pour entrer que vous fussiez sortis.
Dans l'angle où vous jouiez il est là qui soupire,
Et je le vois bâiller, moi qui vous voyais rire !

p.123-124
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La Légende des siècles/Le titan

IV L'EFFORT


               À plat ventre, ainsi que la panthère,
Il s'aventure ; il voit ce qui n'a pas de nom.
Il n'est plus prisonnier ; s'est-il échappé ? Non.
Où fuir, puisqu'ils ont tout ? Rage ! ô pensée amère !
Il rentre au flanc sacré de la terre sa mère ;
Stagnation. Noirceur. Tombe. Blocs étouffants.
Et dire que les dieux sont là-haut triomphants !
Et que la terre est tout, et qu'ils ont pris la terre !
L'ombre même lui semble hostile et réfractaire.
Mourir, il ne le peut ; mais renaître, qui sait ?
Il va. L'obscurité sans fond, qu'est-ce que c'est ?
Il fouille le néant et le néant résiste.
Parfois un flamboiement, plus noir que la nuit triste,
Derrière une cloison de fournaise apparaît.
Le titan continue. Il se tient en arrêt,
Guette, sape, reprend, creuse, invente sa route,
Et fuit, sans que le mont qu'il a sur lui s'en doute,
Les olympes n'ayant conscience de rien.

p.355-356

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CHÂTIMENTS - IX

L'ART ET LE PEUPLE - I


L'ART, c'est la gloire et la joie ;
Dans la tempête il flamboie,
Il éclaire le ciel bleu.
L'art, splendeur universelle,
Au front du peuple étincelle,
Comme l'astre au front de Dieu.

L'art est un champ magnifique
Qui plaît au cœur pacifique,
Que la cité dit aux bois,
Que l'homme dit à la femme,
Que toutes les voix de l'âme
Chantent en chœur à la fois !

L'art, c'est la pensée humaine
Qui va brisant toute chaîne !
L'art, c'est le doux conquérant !
À lui le Rhin et le Tibre !
Peuple esclave, il te fait libre ;
Peuple libre, il te fait grand !

p.36
Extrait ŒUVRES POÉTIQUES II, édition établie, présentée et annotée par Pierre Albouy, Bibliothèque de la Pléïade ,Gallimard 1967.
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Les Chansons des rues et des bois
Sagesse


« J'ai des ennemis chez les hommes,
je n'en ai point parmi les fleurs. »

Extrait ŒUVRES POÉTIQUES III, édition établie, présentée et annotée par Pierre Albouy, Bibliothèque de la Pléïade ,Gallimard 1974, p.196
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Autour de « L'Art d'être grand-père »


Que voulez-vous ? Je suis indulgent pour l'aurore.

Extrait ŒUVRES POÉTIQUES III, édition établie, présentée et annotée par Pierre Albouy, Gallimard 1974, p.707
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La peine de mort est le signe spécial et éternel de la barbarie. (mouvement) Partout où la peine de mort est prodiguée, la barbarie domine ; partout où la peine de mort est rare, la civilisation règne (sensation)...
Messieurs, il y a trois choses qui sont à Dieu et qui n'appartiennent pas à l'homme : l'irrévocable, l'irréparable,l'indissoluble. Malheur à l'homme qui les introduit dans ses lois ! (mouvement) Tôt ou tard elles font plier la société sous leur poids... et alors il arrive ceci... que la loi épouvante la conscience.
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AUTRE GUITARE

Comment, disaient-ils,
Avec nos nacelles,
Fuir les alguazils ?
- Ramez, disaient-elles.

Comment, disaient-ils,
Oublier querelles,
Misère et périls ?
- Dormez, disaient-elles.

Comment, disaient-ils,
Enchanter les belles
Sans philtres subtils ?
- Aimer, disaient-elles.
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5
Entendez-vous Marat qui hurle dans sa cave !
Sa morsure au tyran s’en va baiser l’esclave.
Il souffle la fureur, les griefs acharnés ;
La vengeance, la mort, la vie, aux déchaînés ;
A plat ventre, grinçant des dents, livide, oblique,
If travaille à l’immense évasion publique ;
Il perce l’épais mur du bagne, et, dans son trou,
Du grand cachot de l’ombre il tire le verrou ;
Il saisit l’ancien monde, il en montre la plaie ;
Il le traîne de rue en rue, il est la claie ;
Il est en même temps la huée ; il écrit,
Le vent d’orage emporte et sème son esprit,
Une feuille de fange et d’aurore inondée,
Espèce de guenille horrible de l’idée ;
Il dénonce, il délivre ; il console, il maudit ;
De la liberté sainte il est l’âpre bandit ;
Il agite l’antique et monstrueuse chaîne,
Hideux, faisant sonner le fer contre s’a haine ;
On voit autour de lui des ossements humains.
Charlotte, ayant le cœur des stoïques romains,
Seule osera tenter cet antre inabordable.
Il est le misérable, il est le formidable ;
Il est l’auguste infâme ; il est le nain géant ;
Il égorge, massacre ; extermine, en créant ;
Un pauvre en deuil l’émeut, un roi saignant le charme ;
Sa fureur aime ; il verse, une effroyable larme ;
Fauve, il pleure avec rage au secours des souffrants !
Il crie au mourant : Tue ! Il crie au volé : Prends !
Il crie à l’Opprimé : Foule aux pieds ! broie ! accable !
Doux pour une détresse et pour l’autre implacable,
Il fait à cette foule ; à cette nation,
A ce peuple, un salut d’extermination.
Dur, mais grand ; front livide entre les fronts célèbres !
Ténébreux, il attaque et détruit lés ténèbres.
Cette chauve-souris fait la guerre au corbeau.
Prêtre imposteur du vrai, difforme amant du beau,
Il combat l’ombre avec toutes, les armes noires,
Pierres, boue et crachats, affronts, cris dérisoires,
Hymnes à l’échafaud, poignard, rire infernal,
Il puise à pleines mains dans l’affreux arsenal ;
Cet homme peut toucher à tout, hors à la foudre.
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4
Danton parle ; il est plein de la rumeur d’un monde ;
C’est une idée et c’est un homme ; il resplendit ;
Il ébranle les cœurs et les murs ; ce qu’il dit
Est semblable au passage orageux d’un quadrige ;
Un torrent de parole énorme qu’il dirige,
Un verbe surhumain, superbe, engloutissant,
S’écroule de sa bouche en tempête, et descend
Et coule et se répand sur la foule profonde.
Il bâtit ? non, il brise ; il détruit ? non, il fonde.
Pendant qu’il jette au vent de l’avenir ses cris
Mêlés à la clameur des vieux trônes proscrits,
Le peuple voit passer une roue inouïe
De tonnerre et d’éclairs dont l’ombre est éblouie ;
Il parle ; il est l’élu, l’archange, l’envoyé !
Et l’interrompra-t-on ? qui l’ose est foudroyé !
Qui pourrait lui barrer la route ? qui ? personne.
Tout ploie en l’écoutant, tout vibre, tout frissonne,
Tant ces discours tombés d’en haut sont accablants,
Tant l’âme est forte, et tant, pour les hommes tremblants,
Ces roulements du char de l’esprit sont terribles !

Auprès des flamboyants se dressent les horribles ;
Justiciers, punisseurs, vengeurs, démons du bien.
― Grâce ! encore un moment ! grâce ! Ils répondent : Rien !
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