Pour pouvoir parler, il faut être écouté.
Vous vous dites que c'est impossible, que je n'ai pas pu vraiment oublier ? Vous vous trompez. On se trompe tout le temps. On confond, on mélange. on pense que, mais non. Les évidences sont les miroirs les plus trompeurs. Elles nous confortent dans ce que nous voulons voir. Bien sûr que, sur le papier, Frédéric et Lucile sont coupables. Tout les accuse. Mais est-ce qu'on ne peut pas n'y a pas être plus intelligents que ça ? Accepter qu'il n'y a pas qu'une vérité mais plusieurs qui s'entrelacent. Le contraire de la vérité, ce n'est ni le doute ni l'erreur. C'est la bêtise.
Bien sûr que personne ne meurt d'amour, mais peut-être par manque d'amour, de vigilance, de souvenirs suffisamment précis.
La parole ne suffit pas. C'est le silence qu'il faut écouter.
Il en faut de la lâcheté pour ignorer la douleur des autres. Pire, pour l'utiliser comme excuse. Je pensais faire barrière, je me suis cachée sous terre.
Il a raison. Qu'est-ce qui me bouleverse à ce point ? Le silence qui se brise comme un verre qu'on jette contre un mur. Les mille morceaux qui s'enfoncent dans mon ventre, dans mon cœur, qui écorchent ma peau. Ce qui déchire et soulage à la fois.
Est-ce que mon père était un homme bien ? Avait-il, comme un diamant brut, plusieurs facettes qui brillaient ? Le père tendre, le mari amoureux, le ferard, le pervers. Je ne suis pas sûre que je le saurai un jour.
Une mère, qu'est ce que c'est sinon l'inconditionnel, l'assurance d'être aimé, la permanence du sentiment? En théorie en tout cas. La mienne n'a pas du lire le contrat jusqu'au bout.
- C'est facile de dire que c'est la faute de Fred, qu'il n'aurait pas dû s'endetter, lance Ludovic, énervé, après avoir décliné son identité. Mais en vrai faut s'en prendre à la société. Pourquoi y a de la pub partout si c'est mal de consommer ? Pourquoi on nous file de l'argent s'il faut pas emprunter ? Fred, il avait plus de boulot, il se sentait pas bien, c'était sa manière de compenser. (...) Il n'y a rien de mal à vouloir un objet et à faire un crédit pour l'acheter. C'est même grâce à ça que le monde tourne.
(p. 126)
Les premières semaines, il avait l'impression que ça [le traitement] empirait son état. La nuit, il faisait des cauchemars atroces, mais avec le temps c'est devenu une béquille.
- Les antidépresseurs, ça n'enlève pas la douleur, mais ça aide à bouger.
(p. 86)