AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de eaubrac


Ayant bien apprécié Alexis Jenni pour sa biographie de John Muir c'est avec curiosité que je me suis allé à découvrir sous sa plume cet autre personnage tout aussi étonnant et méconnu, tout du moins pour moi, qu'est le norvégien Fridtjof Nansen. Je n'ai pas été déçu, le style un peu décalé, voir teinté d'ironie mais sans une once de méchanceté, m'a conquis. Sans dire qu'il m'a permis de combler une des nombreuses brèches de ma culture générale.
Le livre commence par un prologue, à ne pas sauter en allant directement au premier chapitre, où l'auteur rend visite à sa voisine, une arménienne centenaire encore alerte Madame Abkarian, qui au cours de conversations de courtoisie lui confie, ébauche devrais-je dire, ses mémoires et notamment l'histoire du "lépapié". On devine rapidement qu'il s'agit d'un document d'identité dont Nansen est à l'origine. Mais le lecteur n'en saura pas plus.
Les chapitres suivants sont consacrés à une narration chronologique classique de la vie de Fridtjof Nansen, tour à tour sportif, scientifique, dessinateur, explorateur polaire. Tout lui réussit mais toujours ceint d'une ténébreuse mélancolie, dont l'auteur se plait à trouver l'origine dans l'héritage viking de Nansen mâtiné du romantisme très en vogue en cette fin XIXème. le personnage n'apparaît pas toujours sympathique. Peut-être sa ressemblance avec le garde du corps de Kaamelott dont il semble également partager l'intégrité obtuse. Peut-être sa conception de la vie familiale qui date, ou encore sa considération pour ses chiens de traîneau qui, les kilomètres défilant, servent tout naturellement de nourriture, n'est plus très d'actualité même si de nos jours ceux qui fournissent le principal de la valeur ajoutée ne sont pas beaucoup mieux lotis dans bien des domaines.
Le récit défile mais point de passeport en vue, le suspens monte, modéré, la 4ème de couverture ayant vendu la mèche. On y découvre un explorateur obstiné et pragmatique, un peu visionnaire, un peu tyran, un peu naïf, un peu chanceux également même s'il a su aider sa chance. Ce n'est que dans les dernières pages que sa vie de diplomate apparaît et avec elle le fameux passeport. Certains pourront trouver le récit déséquilibré mais il faut garder à l'esprit les propos de Nansen tenus juste après l'obtention de son prix Nobel de la paix en 1922, rapportés page 191. S'il a été promu diplomate ce n'est pas de son fait. Bouillonnant d'agir et désoeuvré au sortir de l'époque des conquêtes polaires il a été utilisé pour son aura de héros citoyen d'une nation neutre, pour son opiniâtreté romantique qui exclut tout renoncement et pour son intégrité. Donner une part importante à sa vie "d'avant" est primordial pour comprendre Nansen. Son action diplomatique et humanitaire n'est qu'une suite logique, juste une autre expression de son caractère qui l'ont fait utilisé par d'autres dans un domaine qui effectivement n'était pas le sien. Et comme à son habitude il y a excellé, presque à l'insu de son plein gré.
On peut regretter qu'il n'y ait pas eu plus d'implication de Madame Abkarian. Mais deviner son histoire suffit, elle n'est qu'un prétexte, après tout c'est un livre sur Nansen.

Commenter  J’apprécie          20



Ont apprécié cette critique (2)voir plus




{* *}