Voyage de classes

On m'a récemment demandé quels essais je recommanderais aux personnes qui n'ont jamais lu de sociologie : ce livre me semble une excellente réponse !
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Enseignant à l'université Paris 8 de Saint-Denis, Nicolas JOUNIN raconte les enquêtes qu'il a menées avec ses étudiants de première année de sociologie, dans le quartier dit du « triangle d'or », au sein du prestigieux 8ème arrondissement parisien.
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En 230 pages, la lectrice découvre en même temps que les étudiantes les différentes étapes d'une enquête sociologique. Jounin rappelle que les classes populaires sont plus volontiers étudiées, les classes aisées semblant réservées à des sociologues plus chevronné.e.s. Il prend donc ce constat à contrepied en proposant à des débutants d'enquêter dans l'un des quartiers les plus riches de France.
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L'essai est très narratif et se lit comme un roman. On découvre avec effarement la difficulté de telles enquêtes : comment observer un magasin de luxe ou un hôtel 5 étoiles sans se faire expulser ? Comment encaisser la violence symbolique, le racisme et le sexisme lors des entretiens ? Comment, surtout, trouver la juste distance avec son objet d'étude, celle qui permet de faire de ces interactions du matériau de recherche ?
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Car Jounin montre bien que la sociologie doit faire feu de tout bois, et le vrai sujet de VOYAGE DE CLASSES n'est pas tant la bourgeoisie du 8ème que l'enquête sociologique en elle-même. Un essai très enthousiasmant, politique et enlevé, où le plaisir du récit ne cède en rien à la rigueur et à l'érudition. Très gros coup de coeur.

Le concept est merveilleux : venir du 93 et aller dans les quartiers chics de Paris, faire une observation sociologique chez Chanel et autres grandes enseignes. Ce livre m'a littéralement sciée ! Quand même, plantons le tableau : nous faisons partie de la même espèce, j'ai nommé là l'espèce humaine. Alors comment se fait-il que les habitudes puissent être si radicalement éloignées entre deux êtres, prenons par exemple un habitant du 16ème arrondissement de Paris et un résident de Saint-Denis ? Notre espèce a pour avantage de défier toute logique. Quand certains ne portent que de la soie et que d'autres triment pour s'acheter des vêtements en polyester, et que dans les deux cas la personne est humaine, ni plus ni moins, on se demande ce qui a pu nous mener là. Le professeur est génial, et, moi qui étudie la psychologie, j'ai presque voulu me convertir dans la sociologie tant ce livre m'a happée. Il est passionnant et surprenant à chaque page. Il faut dire que tout a été pensé au mieux; le titre, "Voyage de classes", excellent jeu de mots prenant toute son ampleur à la lecture de ce livre, annonçait déjà un excellent ouvrage. Je recommande aux habitants du 16ème, ceux d'Ivry sur Seine, de Penmarch', d'Orgon et d'ailleurs; car les chocs culturels, loin de nous accabler, nous enrichissent.

Plus qu'un livre sur les élites, il s'agit d'un manuel méthodologique et pédagogique sur la manière de pratiquer et d'enseigner les sciences sociales en général, et la sociologie en particulier. Écrit sans fioriture et mêlé à des témoignages analysés, la lecture en est très facile et agérable.

Un livre qui est d'une richesse incroyable! C'est bien plus qu'un livre universitaire. C'est un roman avec des personnages attachants! Il nous ouvre les yeux sur le monde bourgeois du 8 ème arrondissement!
Un vrai régal!

Cet ouvrage est juste incroyable. Je suis également chercheure et enseignante à l'université donc on pourrait dire pas très objective. Et pourtant, ce voyage de classe est celui de tous les lecteurs qui embarque dans ce voyage. Tout est déconstruit et démontré: on découvre les mécanismes et processus qui structurent, alimentent et renforcent les inégalités entre ce Paris inaccessible (sauf pour les bonnes installées dans les étages de maisons) et ces étudiant.es de Seine Saint Denis. La condescendance, les clichés, les stéréotypes m'ont estomaqué. Un travail pédagogique remarquable, j'ai hâte de lire la suite!

Nicolas Jounin, sociologue, a enseigné à l'Université de Paris-8-Saint-Denis pendant 7 ans. Il travaille au Centre de recherches sociologiques et politiques de Paris (CRESPPA).

Je pense que cet essai est une très bonne porte d'entrée pour comprendre ce qu'est la sociologie et comment s'exercent les différents rapports de domination qui s'exercent au sein de notre société. Avec un style qui se rapproche du roman, car on y découvre par étape en même tant que les étudiant.e.s, comment se construit la sociologie, de la découverte du quartier à l'analyse de l'entretien de l'enquêté. On y découvre les difficultés auxquelles doivent faire face des étudiants issus de la banlieue de Saint-Denis face à la bourgeoisie du 8e arrondissement de Paris. Difficultés dû à la fois au travail de sociologue mais également dû aux rapports de domination. Nicolas Jounin grâce aux différents éléments amassés par ses étudiant.e.s nous fournit des commentaires nous éclairant sur certaines notions, comme celle de la violence symbolique.

« En France, les recherches sur les riches, l'élite, la bourgeoisie, sont le fait de chercheurs confirmés et appointés. Comme si cet objet était trop gros, ou trop beau, pour les apprentis qui font leurs premières armes. Comme si cette population était trop cuirassée de mérites et d'honneurs pour être accessible aux novices. »
J'ai beaucoup aimé l'angle d'attaque de Nicolas Jounin dans cet ouvrage, c'est-à-dire de prendre à revers la coutume en sociologie de faire étudier par les plus aguerris la bourgeoisie. Ce qui lui permet à la fois de dénoncer les discriminations et d'expliquer aux lecteurs.rices le processus d'enquête sociologique.

Pour ce livre, Nicolas Jounin présente le travail réalisé par ses étudiants issus de plusieurs promotions d'une université de Seine-Saint-Denis. le but est ici d'aller mener une enquête sociologique dans un quartier qui est a priori étranger aux étudiants : le 8ème arrondissement de Paris, qui comprend les quartiers du Parc Monceau, du Triangle d'Or et de l'Élysée.

Confrontés aux "indigènes" (tels qu'ils sont nommés dans le livre) du 8ème arrondissement, les étudiants en sociologie vont apprendre à appréhender cette population, dont une grande partie est issue de la bourgeoisie. Pour ce faire, ils vont à la fois mener des études quantitatives mais également des entretiens. La partie sur les entretiens menés avec les habitants du 8ème est particulièrement intéressante et enrichissante :
c'est surtout à cette occasion que les étudiants prennent conscience (parfois de manière violente) de la distance sociale qui les sépare avec les enquêtés.

Un livre vraiment accessible, même sans être forcément sensibilisé aux sciences humaines et sociales, et une lecture particulièrement recommandable à toute personne souhaitant mener une enquête sociologique, tant cette méthode est bien décrite.