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Critique de colimasson


Comme je n'en suis plus à ma première lecture de Jung, vénéré en mon cartel, je dois bien reconnaître que cet ouvrage me parut assez plat. C'est qu'ici, la majorité des textes datent de la période au cours de laquelle Jung n'était encore que le petit disciple de Bleuler. On sait ce que provoque ce genre de situation : timidité, prudence, soumission au dogme en vigueur. Si bien que Jung, dans ce premier recueil d'essais, émet d'abord l'hypothèse d'une origine physiologique à la schizophrénie, ce qui plaît bien à son éducateur.


Les essais, classés par ordre de parution chronologique, nous montrent l'évolution de ce point de vue. Contre l'idéologie dominante, Jung affirme qu'on ne peut étudier la schizophrénie sans prendre en compte à la fois son origine physiologique et à la fois son origine psychologique (cf. le psychoïde). Il remarque en effet que les conditions environnementales du psychotique influent beaucoup sur l'évolution de sa maladie et si les psychiatres considèrent que leurs malades forment un bloc monolithique de symptômes, c'est parce qu'ils ne fréquentent que les cas les plus graves, reclus dans leurs asiles. Jung, à ses heures psychanalyste de ville, rencontre quant à lui des cas plus modérés et reconnaît que le tableau clinique montre une variété foisonnante de profils. Les états-limites ne sont pas encore désignés comme tels, mais nous en voyons ici une claire description.


Ne crachons pas dans la bonne soupe : même si Jung se montre ici moins spectaculaire que dans nombre de ses autres publications, il n'en reste pas moins d'une lucidité et d'une intelligence rares dans le milieu. Il évoque la nécessité pour le thérapeute de connaître les origines psychologiques de l'humanité –ce qui implique de ne pas céder à la mode athéiste moderne- et de chercher à comprendre son malade en pénétrant avec lui dans son univers –non en essayant de lui imposer celui du moment.


Enfin, c'est dans ces essais que Jung jette les bases de sa pensée constructive, à l'opposée de la pensée causaliste. Respectant l'oeuvre de Freud, il prend toutefois ses distances et opère contre sa manie à rejeter vers le passé tous les contenus de l'inconscient d'un individu.


« L'esprit scientifique, dans la mesure où il a une pensée déterministe, est incapable de compréhension prospective, il ne comprend que rétrospectivement. […]
Comprendre l'âme selon le principe de causalité signifie n'en comprendre qu'une moitié. […] Dans la mesure où la vie réelle et actuelle est quelque chose de nouveau qui triomphe de tut ce qui est du passé, on ne doit pas voir la valeur principale d'une oeuvre d'art dans son développement causal mais dans son action vivante. […]
L'âme n'est que d'un côté une réalité devenue, qui est, comme telle, soumise au point de vue causal, mais d'un autre côté, l'âme est en devenir, et cet autre côté de l'âme ne peut être saisi que de façon synthétique et constructive. le point de vue causal se borne à se demander comment cette âme actuelle est devenue ce qu'elle est aujourd'hui. A l'opposé, la perspective constructive se demande comment jeter un point entre cette âme ainsi devenue et son avenir ? »


Que sait l'âme de notre avenir ? Ses troubles, ses désirs et ses terreurs ne renvoient pas seulement au passé. Sa principale nourriture reste l'espoir et en ceci, lui demander dans quelle direction elle veut s'orienter peut permettre de résoudre ses principaux tourments.
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