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Critique de secondo


Une ode d'une fille à sa mère :"Morte, je la porterai, dans mon ventre, sur mon dos. Partout, tout le temps".
Annick Kayitesi-Jozan porte sa mère désespérément mais jamais tragiquement car elle a une mission personnelle, retrouver le corps et l'esprit de sa mère assassinée en la racontant.
Par le récit de sa famille découpée, elle porte l'Effroyable Récit, celui qui doit être amené aux oreilles du monde, aux yeux et à la compréhension des terriens, pour être exposé et à jamais disséqué, analysé.
Pour cela elle choisit un style lucide, pragmatique, en mettant en miroir sa vie d'avant au Rwanda avec le génocide et sa vie de maintenant en France, en sécurité avec ses 2 enfants (quelquefois sa deuxième vie est presque trop insignifiante, trop banale face à l'indicible horreur de la fin de sa première vie).
La musicalité des poèmes Rwandais bercent les chapitres "Ibuka, Souviens toi, Ntukibagirwe na gato, N'oublie jamais".

Qu'est-ce qui pousse une partie d'un peuple à tuer une autre partie de ce même peuple ? Les voisins complices des tueurs, capables d'entendre gémir et agoniser un blessé sous leur fenêtre et qui ne s'offusque que de la gêne auditive, est-ce ententable, supportable, racontable ?

Annick cherche le corps de  sa mère, de son petit frère et  de tous ces autres, tués, coupés, écrabouillés, simplement parce qu'ils étaient Tutsies.
Coups de machettes, coups de gourdins,  agonies sans fin, humains appelés cafards, on voudrait n'avoir pas ouvert le livre, mais c'est trop tard, comme une vidéo dont on sait que les images nous poursuivront longtemps : une mère jetée au chien, tuée avec un ntampongano, une "arme fatale, une massue agrémentée de clous".

On pense à Petit Pays de  Gaël Faye, mais c'est différent car rien n'est romancé, c'est la vérité telle quelle, sans fard, avec les cris et les râles de ceux qui meurt dans l'indifférence et sous les rires de démons, sans permis d'inspirer, uniquement ce qui est arrivé, une histoire vraie, vécue, en lisant on entend presque un chant Rwandais pour une mère sans sépulture, une recherche de ces "quelqu'uns " qui manquent, qui manquent, qui crient, qui crient encore.
 
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