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Critique de Nastasia-B


Ce recueil bilingue regroupe trois nouvelles de Iouri Kazakov : La Petite Gare, Une Matinée Tranquille et Nocturne. Kazakov fait partie des rares élus dont je trouve l'écriture somptueuse. Il me rappelle fort, tel un miroir soviétique au meilleur de la guerre froide, l'un de mes auteurs américains fétiches ; j'ai nommé l'immense John Steinbeck.

Vous vous rendez sans doute compte que dans ma bouche ou sous mes doigts, cette comparaison n'est pas un mince compliment ; c'est un Goncourt, un Pulitzer, un Nobel et une Palme d'Or réunis tellement c'est rare et prestigieux.

J'ai hésité longuement à mettre quatre ou cinq étoiles. Me pensant peu objective et ayant un tout petit peu moins goûté la dernière des trois nouvelles par rapport aux deux autres, absolument sublimes à mes yeux, j'ai préféré opter pour quatre, pour vous qui peut-être allez me lire et pas forcément vibrer à l'unisson de ce que j'exprime ici, mais mon coeur est à cinq, indubitablement.

À ce niveau d'écriture, on comprend que la littérature est réellement un art. À ce niveau d'écriture, on s'aperçoit que l'outrage d'une traduction ne peut entacher que très faiblement la lumière du propos. Iouri Kazakov parvient à écrire de la prose comme vous rêveriez la poésie : simple, limpide, évidente, belle, puissante, essentielle, magique.

Il vous raconte des petites histoires infimes, des gens de rien perdus au fin fond du trou du cul de la Russie (l'U.R.S.S. à l'époque), il vous parle d'une rivière, d'un bois ou d'un quai de gare d'une bourgade dérisoire et pourtant, il vous prend aux tripes. En quatre mots, il a évoqué toute une vie, tout un lieu, toute une relation entre des êtres, toute une alchimie entre des gamins et le milieu où ils vivent.

Waouh ! C'est beau, monsieur Kazakov. Ça se passe de commentaire, ça se passe de tout. La seule fois où j'avais ressenti ça auparavant, c'était à la lecture de certaines nouvelles de la Grande Vallée de Steinbeck, notamment, la toute petite intitulée le Petit Déjeuner ou bien encore cette autre du même recueil qui s'appelle le Meurtre. Ici, la même puissance d'évocation, la même sensibilité, le même amour des gens et des lieux qu'il décrit.

En deux mots, mais c'est presque sacrilège de dévoiler quoi que ce soit, La Petite Gare nous parle du départ d'un jeune homme de la campagne pour aller vivre une autre vie en tant qu'haltérophile à la ville tandis que sa petite amie reste au bercail. Une Matinée Tranquille évoque une partie de pêche entre un gamin autochtone et un petit qui vient d'arriver de Moscou. Enfin, Nocturne nous plonge dans une forêt, la nuit, alors qu'on essaie de gagner un bon coin de chasse avant l'aube. Sachez qu'il peut toujours s'y faire des rencontres insolites…

Oh oui, assurément, il y a du talent sous cette plume qui fut révélée à la France par Louis Aragon ; il y a une maîtrise aussi grande à nous parler de l'humide et fraîche Russie campagnarde des années 1950 que celle d'un Steinbeck à nous portraiturer la poussiéreuse et chaude Californie des années 1930.

Qu'est-ce que vous risquez à le lire dans le fond ? Une superbe émotion ou, au pire, une vague indifférence, n'est-ce pas ? Un petit livre minuscule, qui pourra rafraîchir quelques souvenirs de russe à certains et si vraiment vous le trouvez nul et inintéressant, vous aurez le droit de m'insulter mais j'ai vraiment trop envie de vous le recommander pour m'arrêter si près du but. D'ailleurs, souvenez-vous que ce que je baragouine ici n'est que mon avis, donc fatalement pas le vôtre, c'est-à-dire, très peu de chose.
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